Simple Minds au Lokerse Feesten, avec Olivier Gérard et sa SSL L200.

Les 24 K1 n’attendent que le line check de Simple Minds pour envoyer les dB.

Hier en Angleterre, demain aux Etats-Unis, c’est durant une tournée bien remplie avec les Simple Minds qu’Olivier Gérard, alias GG, nous accorde quelques heures de son temps, autour d’un café, pour nous raconter son histoire. Après plus de 35 années passées dans le milieu du son, il n’est pas question qu’on loupe cette chance. Voici GG, comme si vous y étiez !

Olivier Gérard devant sa L200

SLU : GG, beaucoup te connaissent grâce à Simple Minds, mais avant de parler tournée, explique-nous d’où tu viens et surtout comment tu es rentré dans le monde des dB ?

Olivier Gérard : Je viens d’un petit village belge qu’on appelle Beauvechain. En sortant du lycée, je rêvais d’une carrière dans le football. Ça n’a pas pu se faire, alors j’ai tenté l’examen d’entrée à l’IAD (Institut des Arts de Diffusion) en 1983. Loin de moi l’idée de devenir ingénieur du son, mais je pensais pouvoir ajouter une seconde corde à mon arc via ce type d’études. A l’époque, je passais beaucoup de temps dans mon groupe de musique et je me disais que ça renforcerait l’infrastructure du band.

Pour un étudiant qui ne deviendrait pas ingénieur du son, GG doit quand même gérer un mix en 56 lignes. Notez ici les nombreux micros DPA, notamment les 2011 dont il raffole. La batterie est entièrement repiquée avec cette marque

C’est pendant ma première année à l’IAD que j’ai pris le virus du live!
La société EML (société belge acquise par le groupe PRG en 2011) sonorisait un festival à Louvain-la-Neuve et ils ont eu besoin d’un coup de main.
Par rapport à d’autres, j’avais l’avantage de parler et néerlandais et français ce qui facilitait la communication, j’ai donc rejoint l’équipe d’assistants pour l’ensemble du festival.
De fil en aiguille, EML m’a proposé de les suivre en tant que roadie sur plusieurs événements en Belgique…

J’ai directement commencé sur des gros shows : Talk Talk, Prince… J’ai donc eu la chance d’être formé à la fois par le travail et par l’école. Ça m’a donné une ouverture sur le métier que l’IAD n’était pas en mesure de me fournir à l’époque. Par contre, je ne pensais pas du tout devenir ingénieur du son !
Ce job était réservé aux pros et, même si je trouvais le métier chouette, je ne me sentais pas vraiment concerné. D’ailleurs, à la fin de mes études, mon professeur de travaux pratiques m’a dit : « Écoute GG, je ne sais pas ce que tu vas faire de ton futur, mais en tout cas, tu ne seras pas ingénieur du son, ça, je peux te le dire».

Après mes études, j’ai dû faire mon service militaire. A ma sortie, j’ai trouvé un boulot d’employé dans une maison de production de disques. Ça m’intéressait toujours par rapport à mon groupe, mais surtout ça me laissait pas mal de temps libre pour continuer dans la musique. Après un an et demi, on est venu me chercher pour bosser pour la société Art-System. C’est là que j’ai vraiment pris goût au métier et que j’ai appris à travailler avec des gens comme Nicolas Haber, Rudy Coclet, Michel Andina…

La consécration. Être juste là ;0)

Durant cette période, nous tournions énormément sur les festivals de jazz et je faisais les retours. C’est triste à dire mais, à l’époque, les bons allaient à la face et les moins bons aux mon. Comme je ne me sentais pas techniquement au top, ça me convenait très bien d’assurer cette place.
Cette période m’a également appris une rigueur de travail ; je préparais beaucoup mes jobs, j’analysais les fiches techniques, je line-checkais chaque ligne, je préparais chaque rack moi-même (on est loin de l’époque des kits tout faits). Tout ça, afin de ne pas avoir de problèmes car je ne me sentais pas assez bon pour les régler en temps réel. C’est uniquement grâce à cette anticipation que mon travail était bien fait.

SLU : Tu n’as donc pas fait que de la face ?

Olivier Gérard : Bien au contraire, mon truc c’était surtout le mix mon à la base. Chez Art-System, j’étais le seul à vouloir assurer le poste. J’étais avec les musiciens. En fait, j’avais l’impression de faire de la musique avec eux et ça, ça me bottait !
Je crois ne jamais avoir eu affaire à un groupe qui sortait mécontent de scène. J’avais énormément de retours positifs tout le temps. C’était un travail enrichissant qui m’amenait beaucoup de reconnaissance.

SSL en FOH et aux retours GG semble prendre toujours autant de plaisir au mixage retour.

Et je suis persuadé que ce n’est pas grâce à un talent quelconque que ça marchait, mais bien grâce à mon travail en amont et à la compréhension que j’avais de la musique.

C’est également grâce à ça que j’ai assuré beaucoup de tournées pour Art-System jusqu’en 1995 : Salvatore Adamo, Philippe Lafontaine, Lucky Peterson, Channel Zero, Khadja Nin…

SLU : Ça fait un joli paquet de monde. Tu ne travaillais jamais en direct avec les prods à l’époque ?

Olivier Gérard : Si, mais pas tant que j’étais chez Art-System. A l’époque le noyau des techniciens était vraiment solide, nous vivions pour notre métier et il m’a fallu deux coups durs pour que je change de cap. Jim, un stagiaire que j’avais formé pendant deux ans au mix retour, est décédé d’un accident de voiture après un concert avec Jeff Bodart. Huit mois plus tard, Jules Kenens, un des fondateurs d’EML avec qui je travaillais régulièrement, s’est tué en camion en rentrant chez lui.
Le métier de technicien du spectacle est vraiment difficile sur le plan des horaires. C’est un job où l’on doit être passionné et avoir le feu sacré, mais si on arrête d’y croire, juste trois secondes, tout s’écroule. Ces deux accidents ont suffi à me donner envie de décrocher, j’ai quitté Art-System quelques semaines après.

SLU : Voilà un message qui devrait parler à plus d’un dans le métier ! Comment es-tu retombé dans le circuit ?

Olivier Gérard : Après avoir quitté Art-System, il n’a fallu que trois jours pour que Deus (groupe belge mené par Tom Barman) me demande de les suivre sur une tournée de 3 mois, aux retours. C’était la première fois que l’on me demandait d’assurer ce poste sans être attaché à la sono, mais bien à la production. J’ai donc bien évidemment accepté. J’ai ensuite obtenu un temps plein à l’Ancienne Belgique qui rouvrait ses portes.
J’y suis resté 7 ans de 1996 à 2003. Cette période m’a également permis d’assurer pas mal de remplacements de tournées car je ne faisais pas peur. Je n’allais pas prendre la place de la personne que je remplaçais puisque, de toute façon, j’étais en fixe à l’AB ! C’est comme ça que j’ai travaillé pour Axelle Red, Hooverphonic, K’s Choice, Novastar et Maurane.

La batterie des Simple Minds, un élément essentiel de leur son, avec le backliner en train de la régler. 14 lignes et un Beta 91 perdu dans une forêt de DPA.

SLU : Toujours au retour ?

Olivier Gérard : Non ! Petit à petit, j’ai commencé à faire de la face. Ce qui me plaisait car en bossant 350 concerts par an à l’AB, j’avais pu améliorer mes compétences de mixeur. Ça m’a également permis de me créer beaucoup de contacts. Je pense aussi que les gens étant contents de mon travail au retour, ils n’avaient pas trop peur de m’envoyer gérer la façade.
C’est comme ça qu’en 2006, Maurane m’a demandé d’assurer le mix FOH sur sa tournée. J’ai donc posé ma démission à l’AB pour repartir sur les routes avec elle. J’ai partagé mon agenda entre trois artistes principalement : Maurane, Hooverphonic et Philippe Lafontaine. Ce n’est que quelques années après, en 2008, que Patrick Demoustier (Night of the proms) me demande de le remplacer sur Simple Minds car le groupe part pour une tournée des arènes et lui ne peut pas assurer toutes les dates.

GG en train de discuter avec son backliner, et de vérifier le positionnement de ses microphones.

SLU : Comment vis-tu le passage de tournées franco/belges à des tournées internationales ?

Olivier Gérard : J’ai fait en quelques années un pas de géant. Je me retrouvais dans des tournées anglaises qui n’avaient rien à voir avec tout ce que je connaissais. L’ambiance dans ce genre d’équipe est fort différente, c’est beaucoup moins familial qu’en Belgique. C’est presque une usine, chacun à son poste, et certains sont dans le milieu de la tournée depuis plus de 30 ans…

SLU : Comment as-tu réussi à garder ta place chez Simple Minds ?

Olivier Gérard : Comme à chaque fois, en anticipant et en travaillant longuement à l’avance. J’ai écouté tout le répertoire du groupe pendant plus de deux semaines, je prenais des notes j’analysais les FX utilisés pour pouvoir essayer de m’en rapprocher en live. Je ne voulais rien laisser au hasard.
Le mix live c’est comme pour tout : plus on en fait, plus on devient bon ! Je suis intimement persuadé que je n’ai pas un don. Beaucoup de gens se disent « GG est bon donc il a beaucoup de boulot », c’est totalement faux ! Ça s’est passé dans l’autre sens : j’ai beaucoup travaillé et suis devenu « bon ». Au final, ce que je fais, tout le monde peut le faire, il suffit de bosser !

Un groupe britannique se doit de tourner avec une console de même origine isn’t it ?

SLU : 10 ans après avoir commencé avec Simple Minds, tu as dû tester quelques consoles. Avec laquelle bosses-tu maintenant ?

Olivier Gérard : Je suis en effet passé par beaucoup de consoles pour arriver à ma SSL L200 ! Au début je tournais sur une Innovason SY40 pour Hooverphonic et Maurane. J’adorais cette console qui avait un workflow très analogique. J’ai également travaillé sur une Digico D5 pour la tournée des 30 ans de Simple Minds. Là je partageais la console avec Patrick qui ne jure que par Digico.

J’ai ensuite bossé sur une SD8 et aussi sur une Avid Profile sur ma dernière tournée avec Hooverphonic. Cette console était vraiment intéressante car compacte et donc facilement transportable dans le tour bus. Après, pour la tournée de Millow, je suis passé sur une Soundcraft VI4, l’ergonomie était pas mal, j’ai tout de suite accroché. Bref, je suis passé par beaucoup de consoles avant d’arriver à la SSL.

GG aux commandes. Très concentré durant le show

SLU : On entend beaucoup parler de cette console. Ca change à ce point ?

Olivier Gérard : J’ai assisté à une démo chez SSL, et j’ai trouvé la console beaucoup trop complexe. J’avais la sensation de ne pas avoir assez de neurones pour comprendre son fonctionnement. J’ai donc passé pas mal de temps chez moi à réviser, lire le manuel et puis j’ai passé une semaine chez SSL en training.

Je l’ai ensuite eue à l’essai et c’est là que j’ai été bluffé. Pour moi, la grande caractéristique des consoles digitales c’est qu’elles ne sonnent pas tout le temps de la même manière. Selon moi, si je fais une balance d’un band, celle-ci doit sonner de la même manière pour chaque morceau du band! Or, c’est rarement le cas avec une digitale.
Quand je faisais mes tests avec le multitrack de Simple Minds, la SSL arrivait clairement à récréer cette « élasticité » de mix analogique. C’était la première fois que je découvrais une console numérique capable de cela, c’était remarquable.

SLU : En plus de ta table, utilises-tu des softs et des périphériques particuliers ?

Olivier Gérard : Pour être honnête, quand je suis passé sur la SSL, j’ai vite trouvé que les racks FX n’étaient pas compétitifs. A titre comparatif, sur une Avid profile, quand je mets un plug-in dans un slot, ce dernier ne dépend pas de la scène. C’est-à-dire que si je décide de changer mon chorus par un délai sur la seconde chanson, je le store et c’est enregistré automatiquement.

Tiens, disons-le en anglais : best of both worlds !

Sur la SSL, impossible de faire cela. Le plug-in va utiliser un slot, et si je veux utiliser un autre plug-in il me suffit d’utiliser un autre slot. Impossible de changer le plug-in à l’intérieur du même slot. Je peux évidemment changer les paramètres du plug-in mais pas plus.
La solution que SSL propose à ce défaut, c’est de créer davantage d’auxiliaires, mais cette solution ne me convient pas car je n’ai pas envie de faire des sessions avec 30 aux, j’ai déjà des difficultés à gérer mes 8 effets, je n’ai pas besoin de m’ajouter ce genre de challenge. C’est simplement pour cette raison que j’amène à chaque fois mon outboard.

Beaucoup de périphériques de qualité et difficiles à émuler.

J’ai une Bricasti, une M4000, et une Lexicon 300 qui sont des effets que je prends toujours avec moi parce que je les connais très bien. Je gère tous les délais en interne dans la console.
En plus de ça, j’utilise en insert un Distressor couplé à un BSS DPR901 sur la voix de Jim (Kerr chanteur de Simple Minds), un Tubetech multiband et un Distressor sur la basse, un Aphex et un SPL sur la caisse claire et un Avalon 747 sur le master, que j’utilise principalement car il a un sidechain qui me permet d’atténuer légèrement l’agressivité de mon mix quand les volumes grimpent trop.
En plus de tout ce hardware, j’ai un Tuning-Capture branché en permanence qui me permet de visualiser mon volume sonore et mon RTA.


Autant prendre les originaux !

J’ai vu récemment un ingénieur du son avec 240 plug-ins sur sa Digico SD7. Il avait 4 plug-ins sur chacun de ses deux micros grosses caisses. Autant dire que quand tu veux modifier l’aigu de ton kick… Tu ne sais pas trop où agir. Je ne doute pas que l’ingénieur du son en question maîtrisait son sujet, mais si j’avais été à sa place, je n’aurais pas su par où commencer (rires)!
De mon côté, je fais des mix qui sont construits de manière simple, et je fais tout pour rester dans cette simplicité. Je ne veux pas être encombré, je veux que tout soit plug-and-play. Autant dire que si je suis difficile dans mes choix de console et de périphériques, c’est avant tout pour ça !

SLU : Tu viens de terminer ton line-check pour ce soir et nous ne t’avons pas vu faire un virtual soundcheck. Pourtant tu as tout pour le faire. Pourquoi ce choix ?

Olivier Gérard : Le virtual soundcheck est un outil à n’en pas douter super, mais avec lequel je n’ai jamais réussi à travailler. Je sais que si j’en entame un maintenant, je ne vais pas aimer le résultat et vais vouloir commencer à tout modifier piste par piste.
Le virtual soundcheck ne me donne pas l’énergie apportée par le groupe, et moi, j’ai besoin de ça pour mixer. Quand on travaille avec des grosses prods, les musiciens viennent de moins en moins faire le soundcheck. Ils ont confiance et s’il faut modifier le mix, je le fais durant le show.

Jim Kerr en plein show. 12 K1 et 9 Kara pour les outfills, il y a de quoi faire.

SLU : Je suppose que tu es au courant qu’en France le gouvernement a instauré une nouvelle réglementation sur les niveaux sonores : à partir d’octobre, nous serons limités à 102 dB A Leq 15 minutes et 118 dB C Leq 15 minutes En tant que mixeur face, qu’en penses-tu ?

Olivier Gérard : Il faut savoir que la réglementation du son est un sujet qui me met directement en rogne. Je pense être assez ouvert au dialogue, mais s’il y a bien deux choses avec lesquelles j’ai du mal, c’est l’imbécillité et la connerie. La première question qu’il faut se poser lors de l’élaboration d’une loi de ce type c’est de connaître l’objectif poursuivi par cette dernière.
En l’occurrence, est-ce que le but est de garder un niveau sonore assez bas pour éviter de perturber l’hôpital situé à 3 km du festival, ou, est-ce que le but est de diminuer les niveaux sonores pour éviter des troubles auditifs aux nouvelles générations ? Dans le premier cas : je comprends sans aucun souci, dans le second je me permets quand même d’émettre de sérieux doutes.

Photo du MeTrao prise au moment du premier morceau. Ça tape. Mais le volume a été géré et atténué par la suite.

De mon point de vue, qui est celui d’un ingénieur du son travaillant depuis 35 ans dans le métier, je pense qu’un boulot énorme a été réalisé d’un point de vue technique sur les sonorisations d’événements.
En l’espace de quelques générations à peine, le son s’est amélioré, les haut-parleurs ont été placés à de grandes distances des spectateurs, non pas pour que les concerts jouent plus fort, mais bien pour que la qualité audio soit plus homogène (line-array, directivité des subs etc.).

A côté de ça, les générations actuelles n’ont jamais eu autant de problèmes d’écoute (acouphènes, etc). Pour moi, et je sais que ça risque de choquer certaines personnes, il n’existe aucun lien concret entre la sono de concert et les troubles d’audition des jeunes ! Je ne doute pas qu’une personne puisse sortir d’un concert avec un acouphène, je ne doute pas qu’il puisse parfois y avoir des dégâts physiologiques, mais jamais vous ne verrez le public d’une salle de spectacle entière sortir d’un concert avec des troubles auditifs.
Alors évidemment, regarder la TV pendant 40 heures d’affilée n’est pas bon pour vos yeux, boire 40 bières Duvel n’est pas bon pour votre foie et écouter de la musique à 115 dB pendant deux heures n’est pas top pour vos oreilles, mais ce n’est pas de ça dont on parle!
Prenons un exemple chiffré, un jeune qui aime la musique va voir un concert de 1 h 30 deux fois par mois. On arrive à un total de 36 heures par an, et l’on me dit que ce sont ces 36 heures de concerts annuels qui sont la cause des problèmes d’audition du mec ? Je n’y crois pas une seule seconde ! Pourquoi ne parle-t-on pas de tous les autres facteurs ? L’omniprésence des signaux RF produits par les portables par exemple ? L’utilisation prolongée d’iPod avec écouteurs ?

Cibler du doigt le milieu du concert n’est pas une solution selon moi. Politiquement, cette phrase ne plaît pas évidemment. Nous sommes dans une ère où tout doit être expliqué et contrôlé par la politique. Pour donner un équivalent assez concret, c’est comme si, suite à une noyade dans la partie côté plongeoir de la piscine locale, le gouvernement décidait d’interdire les bassins dépassant les 30 cm de profondeur.
Ça paraît ridicule ? Pourtant c’est exactement ce que notre milieu est en train de subir avec des lois aussi peu crédibles. Je suis d’accord que sur certains concerts, un boulot doit être réalisé pour éviter de tuer les oreilles des gens. En 1996, à l’Ancienne Belgique, j’étais le premier à dire à l’ingénieur du son de Mogwai de retirer son casque pour mixer. Le mec tapait à 120 dB à la console et il mixait avec un casque de chantier. Ce comportement-là est intolérable.

SLU : Quelle est la solution pour toi alors ?

Olivier Gérard : Il faut de la prévention, fournir des bouchons sur les concerts, et avoir des règles intelligentes. Par exemple changer les LEQ en fonction des types des salles/lieux est très pertinent, mais imposer une loi où le niveau puisse être mesuré à n’importe quel point de la salle, et focaliser les gens en leur disant « C’est à cause des concerts que vous avez des troubles d’audition ! » ça, je ne pourrai jamais l’accepter car c’est simplement une injustice.

Le public du Lokerse Feesten prêt à s’enflammer

Une dernière chose qui doit être prise en compte c’est que les programmateurs doivent faire leur boulot. Je me souviens très bien du 15 août 1997, je jouais au Marktrock à Leuven avec Channel Zero, et au moment de la balance, l’ingénieur du son d’accueil m’annonce que je suis limité à 92 dB. J’ai dû faire appel au programmateur pour lui dire de changer de métier. Channel Zero à 92 dB. C’est impossible ! Les programmateurs et les législateurs doivent comprendre que tout n’est pas lié à la puissance sonore, mais bien aussi au lieu, à la culture liée à l’événement.

Dans la même idée, il faut que les programmateurs laissent du temps aux ingénieurs du son pour faire leur travail. Un changement de plateau en 10 minutes, ça ne devrait jamais arriver. Même au casque, un ingénieur du son ne peut pas bien mixer un band en 10 minutes, c’est impossible. C’est comme si vous alliez commander des spaghettis bolognaise et qu’on vous les apportait froids parce qu’il faut aller vite en cuisine… Ok ça ressemble à des pâtes mais ça n’en est pas ! Évitons de faire ça à nos concerts et de rejeter ensuite la faute sur le mixeur !

SLU : Comment imagines-tu ton futur dans le milieu?

Olivier Gérard : Aucune idée mais une chose est sûre, je ne vais pas continuer à enchaîner 15 tournées. Je ne sais pas ce que je ferai ces 10 prochaines années, mais j’ai besoin de croquer la vie à pleines dents et de garder une intensité dans ce que je fais.
Comme j’ai toujours laissé les portes ouvertes autour de moi depuis mon adolescence, je ne doute pas qu’à un moment donné quelque chose de sympa tombera sur ma route !

Derrière ses lunettes, GG sourit en pensant au chemin parcouru et à tout ce qui l’attend encore. Et on ne peut que s’étonner de ce parcours atypique. Au point de départ, rien ne le prédestinait à devenir un ingénieur du son aussi réputé.

GG en train de caler son chant Lead.

Pendant cette interview, nous n’avons pas eu la sensation de parler à un surdoué de l’audio, mais bien à un amateur du monde de la musique. Un amateur tellement passionné par son environnement qu’il est parvenu à le maîtriser !
C’est par son travail précis et son acharnement à la tâche qu’il a été en mesure d’arriver là où il en est actuellement. Si son avis sur le nouveau décret 102 peut sembler péremptoire, il se justifie par une passion qui l’empêche de laisser aux politiciens les rênes d’un métier qu’il aime sans partage.

Il en va de même avec son peu d’appétence pour le virtual. Au premier morceau, l’énergie apportée par le groupe n’aurait pas pu être anticipée par un virtual soundcheck. Ça bouge, ça joue solidement bien et surtout ça ouvre à 104 dBA, soit 6 dB de plus qu’Arsenal qui jouait juste avant.
Le PA tech de chez Phlippo, le prestataire en charge du festoche souhaitant faire respecter sa limitation à 98 dBA, envoie des regards anxieux vers GG. Pas d’inquiétude, les yeux sur son dBmètre, il rétablit les niveaux dès le second morceau. Une dynamique bien maitrisée qui, vue l’ambiance provenant du public, a fait plaisir aux fans.

D’un point de vue mixage, le kick est lourd et sec, tout le monde apprécie en régie, l’équilibre des instrus est cohérent à chaque titre, à se demander si GG change vraiment ses snapshots. Nous avons passé un super concert et savouré son mix efficace durant l’ensemble du show.

 

Crédits -

Texte & photos : Brice Coulombier

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