Gérard Giraudon, l’empereur de l’installation AV de gros clubs. 1ere partie

Nous n’étions pas seuls à nous déplacer à Cannes par ce beau et chaud soleil. L’équipe de Hit Music, Daniel Picard (à gauche) et Pierre Denjean (à droite) ont fourni tous les automatiques Beglec utilisés au Gotha. A centre, Pascale, Gérard et Jennyfer Giraudon.

Vous ne le saviez peut-être pas, mais en France on fait AUSSI les plus jolis clubs et à ce jeu-là, Gérard Giraudon et sa boîte Colorsonic détiennent le pompon de la nuit depuis des décennies. Visite en mots, images et film du Gotha à Cannes, leur dernière très belle réalisation qui sera décrite dans un deuxième volet.

Caché dans un discret bâtiment commercial de deux étages à 200 mètres de Marina Baie des Anges à Villeneuve Loubet (les amateurs de la French Riviera apprécieront) Colorsonic est aussi discret que ses réalisations. Il faut pousser la porte des deux pour comprendre. On commence par les bureaux avant d’aller découvrir un peu plus tard le temple des nuits cannoises.

Gérard Giraudon, connu depuis des décennies du monde de la nuit et bien au-delà, pour la qualité de ses installations AV en club.

Gérard Giraudon nous accueille et nous fait faire la tournée des grands-ducs de ses locaux professionnels. Ca travaille sec dans un capharnaüm d’échantillons de matériaux, d’éclairages, de Pantone, de prototypes d’enceintes et j’en passe. Quand on sait que depuis le premier coup de crayon, réaliser un club comme le Gotha prend deux ans, on comprend mieux.

Gérard est disponible et un canapé nous tend ses banquettes blanches.
Attention, prenez un verre et asseyez-vous, vous allez plonger dans le cœur de la nuit. L’homme est intarissable et truculent.

SLU : Est-ce dur de toujours se renouveler quand on a autant d’établissements festifs à son actif ?

Gérard Giraudon : Plus que dur c’est indispensable et notre prochaine réalisation n’aura rien à voir. Autrement cela n’aurait aucun sens. On n’a pas de secret et ça ne nous gêne pas de tout montrer. Notre truc c’est d’apporter à chaque projet de nouvelles idées et des nouveaux produits, en France comme partout ailleurs où nous sommes présents. Nous avons par exemple 80 % du marché des clubs et plages festives de Saint-Barth.

Le Gotha, récente réalisation de Colorsonic et objet de ce déplacement à Cannes. Il sera détaillé dans le deuxième volet de ce reportage.

Les clients de colorsonic

SLU : Quand on appelle Colorsonic, on lui demande quoi… Qui vient vous voir ?

Gérard Giraudon : Nous travaillons avec des architectes qui nous connaissent et surtout nous avons un réseau exceptionnel de clients que j’ai constitué ici et ne doit rien à mes débuts parisiens même si je tiens à dire que j’ai énormément appris au contact de Célino Sanchez qui dirigeait Decoma. Et sa fille est devenue ma femme (rires).

Pour revenir à votre question, notre rôle est de comprendre les besoins et le concept souhaité par le client, de se laisser inspirer par les lieux qui souvent conditionnent beaucoup le futur établissement et surtout d’apporter l’air du temps, les dernières tendances et les produits que personne n’a encore vu.
Les codes d’un club restent les mêmes. Un dancefloor, un bar et une cabine DJ. Ce qui a changé c’est la taille du carré VIP qui peut être supérieur à la partie non VIP et la taille de la piste de danse qui peut être toute petite. Au Gotha sur 800 m2, elle n’en prend que 50.

SLU : On vient vous voir et ensuite…

Gérard Giraudon : Il faut bien sûr que l’affaire nous convienne et que nous ayons le temps de nous en occuper. Si l’affaire est belle, qu’on peut créer et apporter une valeur ajoutée, on trouve toujours le temps.

On a réussi un très joli club à Metz qui a attiré durant trois ans la jeunesse dorée de la région et pareil à Rouen. Deux clubs qui sont sortis de mon bureau, sans même d’architecte. Comme j’ai fait l’école Boulle et que j’ai travaillé avec de très grands architectes, je me suis imprégné de leurs méthodes et de leur style. Si et seulement si je sens que c’est à ma portée, je me lance et on ajoute des designers ou tous les créateurs nécessaires.

SLU : Est-ce que dans le marché du club Colorsonic a des concurrents ?

Gérard Giraudon : Il existe des gros intégrateurs et des cellules d’installation chez les prestataires qui œuvrent dans des lieux festifs, mais précisément sur le marché des gros clubs, beaucoup moins. Je n’ai à vrai dire aucune idée du CA qu’ils réalisent et de toute façon, nous ne travaillons pas sur les mêmes marchés qu’eux.

SLU : Quel est le ticket moyen de Colorsonic ?

Gérard Giraudon : 500 k€. Pour le Gotha qui est un projet hors norme, beaucoup plus. Il faut tout de même pointer le fait que le très beau clubbing tel qu’on l’a connu disparaît petit à petit et même à Paris l’offre se raréfie.

SLU : On trouve où alors les nouvelles tendances de la fête ?

Gérard Giraudon : Dans les restaurants. Aujourd’hui par exemple tous les restos cannois ont une petite cabine DJ et trois haut-parleurs. Ou plus (sourire). Les gens veulent s’amuser. C’est une tendance forte.

L’art de contenir l’émergence

Parce que le Palm Beach qui abrite le Gotha, est un très beau mais très ancien bâtiment, peu étanche à la pression acoustique du club, Colorsonic a dû réaliser un travail remarquable pour contenir l’émergence.

SLU : Cela ne génère pas d’émergences ?

Gérard Giraudon : Si, mais ces établissements sont dans la zone festive de la ville où la musique est plus tolérée. Le son est essentiel à la fête, mais nous installons depuis toujours des limiteurs Amix SNA70 pour retenir un peu les ardeurs de certains DJ qui gèrent mal le niveau et se retrouvent adossés en quelques minutes aux limiteurs.

D’autres au contraire savent jouer avec la progressivité et travaillent par montées sonores en construisant des sortes de breaks chargés en effets sonores très forts et ensuite baissent juste derrière. Ils savent jouer avec le headroom du système et créent des événements sonores qui sont soulignés par la lumière ou par exemple le CO2.

Il faut malgré tout être vigilant sur les niveaux et c’est curieux qu’un spécialiste comme Pioneer n’ait pas travaillé autour de la gestion intelligente de la pression, lui qui fournit tellement d’outils créatifs aux DJ.

La diffusion sur mesure

SLU : Vous êtes très « sur mesure », pour le matériel sonore, la belle époque des enceintes dites de club ou mieux encore les modèles -maison- est finie non ?

Gérard Giraudon : Ca n’existe plus depuis longtemps le matériel de discothèque. L’évolution dans les grands clubs c’est le line source, le compromis entre le point source et le line array. Nous sommes d’ailleurs totalement opposés au line array, même pour les grands clubs.

Célino Sanchez assis dans une de ses enceintes CS Signature, ici une 5 voies où se mélangeaient des transducteurs JBL et Gauss. Pour avoir fréquenté les établissements équipés par Decoma, je peux certifier qu’en plus ça sonnait. Vraiment. Imaginez maintenant la même enceinte avec des contrôleurs amplifiés modernes et quelques changements comme l’orientation des deux tweeters entourant le moteur et sa lentille…

Toutes les grosses marques offrent désormais des gammes d’enceintes à courbure constante. Même L-Acoustics a sorti la série A, TW-Audio aussi, Funktion One, d&b qui en a sorti aussi cette année. Ce type d’enceinte est extrêmement polyvalent et correspond parfaitement à nos marchés.

SLU : Personne ne demande de revenir à l’époque Decoma avec les kits JBL ? La nostalgie des années 80 est pourtant très à la mode ne serait-ce que pour le look.

Gérard Giraudon : Nous avons continué à fabriquer jusque dans les années 2000 le même type d’enceintes que celles qui ont fait le succès de Decoma, les CS Signature, mais quand il a fallu choisir entre être installateur ou fabricant, nous avons arrêté.
On est parti avec du Martin dont on avait équipé le Queen à Paris, puis on est passé au Funktion-One dont on a collaboré au succès dans les clubs avec la musique Electro.

Après Funktion-One, TW Audio

SLU : Pourquoi alors votre nouvelle marque TW-Audio ?

Gérard Giraudon : C’est grâce au Gotha à Dubaï qu’on avait équipé en 2014 en Funktion-One. Le distributeur local n’a pas été irréprochable et la maison mère m’a un peu déçu, du coup on m’a conseillé d’aller découvrir cette marque.
Ce que j’ai fait en Allemagne à quelques kilomètres de Stuttgart, pas très loin de d&b (20 km à vol de front d’onde) en les informant de nos besoins spécifiques et de notre aversion pour les presets et autres verrouillages.

Le B14i. Ce sub haut de 24 cm qu’on entrevoit sous cette banquette a été développé par TW Audio spécialement pour le Gotha. Charge passe-bande, 93 dB de sensibilité, un 14” longue excursion pour une bande passante de 39 à 120 Hz (-6 dB).

Quelques jours après j’ai reçu une semi-remorque avec TOUT leur catalogue en double, pour écouter des configurations stéréo. On a aussi pu comparer avec d’autres marques et conforter notre choix.
Depuis cela se passe très bien et leur taille intermédiaire les rend très flexibles pour adapter une série à nos besoins ou même créer un modèle de toutes pièces pour nous comme le sub B14i. Bien leur en a pris, c’est désormais l’une de leurs meilleures ventes.

Pour le reste, ils prennent d’excellents transducteurs chez B&C dont certains sur cahier des charges, notamment les 21”, ils assemblent tout chez eux et le créateur de la marque Tobias Wüstner qui a bien bourlingué chez différents autres constructeurs, est très brillant en électroacoustique. Ce sont de bons produits abordables et fiables. Le son de chaque boîte est bon tel quel, sans qu’il soit tripatouillé avec des dizaines de points d’EQ cachés dans un preset fermé dont on ne peut pas ne pas se servir.

SLU : Qu’est-ce qui est important dans le son de club, le grave ?

Gérard Giraudon : Non, ce que fait un 18” ou un 21” c’est facile, la chose la plus importante est l’attaque. Le haut des basses. Il faut que le bas du pantalon et le pan de la chemise bougent. On travaille aussi beaucoup avec FrenchFlair audio. Nous avons même été l’un de leurs plus gros clients pendant 4 à 5 ans.
On a dû installer un millier de AS5, la petite coaxiale 5” et c’est notre fer de lance pour les restaurants festifs et les plages/clubs. Saint Barth c’est FrenchFlair Island (rires). Cette marque s’est rapprochée de Xavier Drouet mais on va garder des rapports directs avec eux d’autant qu’ils mettent au point de très bons produits. Nous leur avons fait développer l’AS8, un 8” coaxial et un sub en deux fois 12” qui permettent d’équiper plus facilement des lieux où il faut assurer une pression plus importante tout en gardant un look classe.

SLU : Ce type d’enceintes a des presets ?

Gérard Giraudon : Non ou alors très simples, juste des fréquences de coupure, une mise en phase et des niveaux. Et des protections bien sûr, ce qui n’évite d’ailleurs pas que des DJ en cassent. Il faut dire qu’avec 12 heures dans le rouge et sur du carré, les bobines ne sont pas à la fête (rires). On pourrait leur mettre plus de matériel pour garder une marge et un peu de headroom, mais ça ne change rien, ils vont jouer plus fort par habitude.


Autre installation AV de Colorsonic et pas des moindres, les Caves du Roy à Saint Tropez, un club select intégré à l’hôtel Byblos.

SLU : Comment travaillez-vous le son, vous faites appel au bureau d’études des fabricants?

Gérard Giraudon : C’est tout à fait ça, on reçoit leur projet et de notre côté on fait notre sauce. Pour les gros systèmes stackés c’est facile, on sait où ils iront et ils ne bougeront pas. Pour de la multidiffusion en accroche comme au Gotha, les études ne servent pas à grand-chose parce que ça bouge tout le temps, d’où notre choix de produits assez petits pour être peu visibles, mais aussi puissants et polyvalents.
On navigue dans les contraintes d’autant qu’une boîte n’est généralement pas traitée acoustiquement. On essaie tout de même dans les très grands établissements de réduire le temps de réverbération et de traiter les modes. On le fait sans même en parler car ce sont des notions qui n’intéressent pas forcément nos clients qui préfèrent les matériaux ou la lumière.

SLU : Qui effectue le calage du système et sa « mise en couleur » club ?

Gérard Giraudon : On est au moins 4 dans Colorsonic, je me compte dans le lot, à pouvoir le faire en ayant la connaissance théorique et pratique. Les autres techniciens sont plus polyvalents et moins pointus dans le son. Il faut avoir tout en interne, cela simplifie le travail et évite certains blocages venant de spécialistes qui ne croient qu’en une marque ou une technologie donnée.

On n’a rien contre les grandes marques, mais les presets verrouillés, les configurations standard ou le son tout fait, nous privent de la flexibilité nécessaire pour venir à bout d’un problème. Pour simplifier, un client vient chez nous et achète du Colorsonic. Il nous fait confiance pour ce qu’il y a dedans.

SLU : Quelle marque d’amplis avez-vous choisie ?

Gérard Giraudon : Depuis qu’on a adopté les enceintes TW-Audio, nous avons choisi Powersoft. On se servait déjà de cette marque pour FrenchFlair mais nous l’avons standardisée et en fonction des besoins, on prend du Quattrocanali ou du X4. On n’a pas encore adopté le X4L car on attend toujours les premiers retours. Fiabilité avant tout !

SLU : A propos de retours, qu’offrez-vous au DJ ?

Gérard Giraudon : On veille déjà à ce qu’il soit dans le son de la salle, le plus proche possible du temps zéro afin que son casque, ses retours et la face soient le plus possible en phase et qu’il puisse mixer sans retours ou le moins possible.

L’éclairage, entre architecture et lumière dynamique

SLU : Parlons un peu lumière, comment travaillez-vous chez Colorsonic…

Gérard Giraudon : On commence par différencier la lumière architecturale et celle dynamique, par exemple les lyres motorisées ou les strobes. Nous mettons ensuite en place un mix des deux avec une tendance forte qui est de rendre dynamique par la multiplication des circuits, celle architecturale.
Il y a une règle d’or dans l’éclairage qui dit que quand on est dans le ventre de sa mère, on en connaît les limites, on est rassuré. Quand on rentre dans un endroit et qu’on n’en cerne pas les limites, qu’il y a par exemple des trous noirs sans le moindre artifice lumineux ou mur visible, on n’est pas bien dedans.

Pour rassurer les clients du Médusa, le restaurant festif attenant au Gotha, Colorsonic limite visuellement l’espace avec des tubes led en bordure de salle.

Chez Colorsonic on fait en sorte de créer un cocon lumineux qui va devenir dynamique, en y ajoutant des effets spéciaux, de la vidéo et du son justement dosés. On fait aussi en sorte le plus possible que l’architecture bouge ou se transforme, tout en gardant, si nécessaire comme aux Caves du Roy à St. Tropez, l’esprit, voire des éléments précis des lieux.
Dans les années 80, on s’était lancé dans les très grands établissements ou la scène montait et descendait, des structures de lumières descendaient du plafond, c’était la grande époque des serruriers de théâtre comme Féchoz et des vis sans fin. Tout ça a ensuite disparu au bénéfice des hangars pleins de lyres, fumée, CO2, mousse avec la perte de la personnalité des établissements et la naissance des clubs éphémères. Dernièrement on assiste au boom des restaurants festifs.

SLU : La lumière est devenue décor ?

Vue du restaurant Medusa situé front de mer.

Gérard Giraudon : Oui, mais ce n’est pas toujours simple. Dans un restaurant on ne met jamais de lyres, de strobes ou d’effets spéciaux propres aux clubs, ce qui ne nous empêche pas d’avoir de 7 à 10 univers DMX dans certains grands établissements. Les nodes s’empilent dans nos racks, tout en ArtNet. On utilise beaucoup le Sunlight LC, ça marche bien et c’est pratique d’accès, simple pour les clients les moins calés. Au Gotha on a une GrandMA onPC dont les univers sont pleins !

SLU : Et puis sont arrivés les motorisés…

Gérard Giraudon : Oui avec les Téléscan. On a eu les deux premiers au Palace dont on se servait en tant que poursuite télécommandée. Ils avaient un zoom, et avec les deux miroirs on suivait les gens. La version suivante du Téléscan a bénéficié de cassettes pour changer les gobos ou les couleurs. Puis il y a eu Coemar avec le Jupiter, Claypaky avec le SuperScan, l’Intellabeam… Il y avait des clubs américains qui en mettaient des centaines, du coup ils étaient tous pareils. La machine valait décor.

SLU : Il a fallu attendre la led pour retrouver un décor ?

Gérard Giraudon : Non, on a travaillé très vite avec des tubes qu’on peignait et des petites ampoules à filament. La led est arrivée plus tard avec les premiers Cove de Color Kinetics qu’il fallait adresser individuellement avec des dip switchs placés à l’arrière.

SLU : Pour la led, innovation signifie que tu vas dans les grands salons chinois ?

Gérard Giraudon : Oui mais pas que, je vais aussi dans certains marchés et magasins spécialisés dans la led à Shenzhen où l’on trouve des petits artisans qui fabriquent leurs idées qui par la suite peuvent être industrialisées et devenir des grandes séries. Et les prix sont radicalement différents.

Au Gotha un mix réussi de lumière architecturale, de lumière dynamique en projecteurs Beglec, et de couronnes vidéo motorisées.

SLU : Vous avez du stock en led ?

Gérard Giraudon : Bien sûr, des kilomètres. On en pose beaucoup dans chaque établissement et quand on trouve la bonne température entre 2300 et 2400K qui ne part pas vers le rouge, l’orange ou le rose, on achète de grandes quantités. Il faut que la teinte soit « candle » entre ivoire et doré.
Mais nous avons aussi d’autres teintes pour restituer ce côté chaleureux aussi par réflexion sur une peinture qui peut être sombre. Quand je fais un projet qui demande 200 mètres de leds, j’en prends 25 % en plus avec un code projet pour pouvoir remplacer des éléments défaillants avec des leds sortant du même bain.

SLU : Pour les alimenter ?

Gérard Giraudon : On travaille en 24 Volt avec des contrôleurs électroniques qui alimentent jusqu’à 30 mètres de leds en 60 lampes au mètre avec la même intensité au bout.

La vidéo, appelle du contenu renouvelé

SLU : La vidéo a été une sorte de fil rouge en boîte ?

Gérard Giraudon : Oui, mais il faut savoir l’utiliser. Trop de vidéo tue la vidéo et il faut impérativement disposer de contenu original et renouvelé. Bien sûr avec le temps, le pitch des écrans s’est resserré, la rémanence a baissé, la définition a augmenté et le prix a plongé, mais ce n’est que la magie de ce que tu vas mettre dedans et au bon moment qui va faire son charme. Attention aussi à la résolution. Plus on s’approche de la qualité photo, moins c’est décoratif et intéressant. Je préfère les écrans transparents où bien offrant un rendu « travaillé »

Les couronnes vidéo motorisée du Gotha ont été réalisées sur mesure.

SLU : Comment était fait le mur vidéo arrondi de la Scala à Paris ? (début années 80)

Gérard Giraudon : Avec des ampoules ! Une rouge, une verte et une bleue. Il y avait une notion de RVB. C’était géré par une trentaine de séquenceurs 64 circuits qui étaient cascadés sur un maître. Trois armoires pleines. C’était du matériel américain avec 16 circuits XY et des programmations incroyables.
Ils avaient développé ce produit pour faire les entrées des Casinos à Vegas. Ce n’était pas très défini mais de loin, et avec le miroir transparent qui couvrait les ampoules, ça restituait des bribes d’images. On revient aux images infinies avec les montages de verre Antelio teinté.

Une équipe ultra polyvalente

SLU : Tu es bien entouré avec ton équipe ?

Gérard Giraudon : Bien sûr et d’autant plus que je n’ai plus le temps de plonger dans les menus des appareils. Je sais ce que je peux en tirer et les grandes lignes de chacun d’entre eux, mais je dispose de techniciens pour l’installation et la programmation. On a aussi autour de nous un certain nombre d’artisans indispensables comme serrurier, spécialiste du PVC, menuisier, ou électricien, mais ce ne sont pas des salariés.

Nous rédigeons un cahier des charges et un plan de câblage ou de construction extrêmement précis et détaillé, et le client gère librement le choix du prestataire. Il faut qu’il reste le maximum de budget pour ce que l’on a à faire. On surveille la construction mais notre intervention décisive où l’on arrive en groupe, est cantonnée à une dizaine de jours. Le onzième ça marche et on repart. Pour le Gotha qui est un très gros projet, le montage a pris un mois, mais qui comprend aussi le câblage.

SLU : Ce n’est pas triste de casser un club que tu as monté 4 ou 5 ans auparavant ?

Gérard Giraudon : Non, c’est normal que tout parte à la benne. Il y a des établissements qui doivent absolument offrir du neuf pour satisfaire leur clientèle. A nous de proposer autre chose.

Christophe Orlando, directeur technique de Colorsonic. Un homme aux multiples compétences : son, lumière, vidéo, structure…

SLU : Il y a combien de personnes chez Colorsonic ?

Gérard Giraudon : En ce moment nous sommes douze dont 6 techniciens polyvalents son, vidéo et éclairage. Deux à Paris et quatre sur la côte.

SLU : Comment se répartit le CA ?

Gérard Giraudon : 30 à 40 % provient de clients désireux de créer des clubs comme les Caves du Roy, le Gotha et le Jimmy’z à Monte-Carlo, les trois beaux endroits de la Côte qu’on a eu le bonheur de faire ou refaire en l’espace de 3 ans. Le reste provient de l’hôtellerie et des restaurants festifs.

On nous appelle pour monter des clubs dans des hôtels ou pour redonner du souffle et un concept aux nuits en club de vacances. On a travaillé pour le Club Med il y a quelques années. Les nuits se transforment, on accompagne donc le mouvement. Un dîner qui se prolonge de manière festive et ne se termine pas trop tard n’interdit pas d’aller travailler le lendemain. Un dîner plus un club qui n’ouvre jamais avant une heure du matin, rend très difficile la sortie à monsieur tout le monde.

SLU : Quel est le chiffre d’affaires de Colorsonic ?

Gérard Giraudon : En 2018 un peu moins de trois millions et en 2019 probablement plus de 3 millions d’euros.

Le futur de Colorsonic

La question nous a titillés tout au long de cette journée passée avec Gérard. On la lui pose en guise de conclusion avant de rejoindre Cannes pour visiter le Gotha.

SLU : Comment imagines-tu le futur de Colorsonic ?

Gérard Giraudon : Je suis ouvert à l’idée d’ouvrir notre capital. Il faut quelqu’un qui soit déjà dans le circuit, peut-être avec une approche différente de la mienne et qui, en prenant des parts, profite de notre réseau et de nos références. Cela passe forcément par un accompagnement et par l’abandon de tout égo.
Il y a plein de mecs qui sont plus forts que moi d’un point de vue technique, peut-être manquent-ils simplement d’ouverture d’esprit et de polyvalence. On pourrait aussi rentrer un groupe dans notre capital. Il y en a de très bons en France qui œuvrent soit dans la Prestation, soit dans l’Intégration.

SLU : Et à court terme ?

Gérard Giraudon : Colorsonic peut évoluer vers le conseil, la conception pure et surtout vers la créa scénographique faisant appel de plus en plus à la lumière. Le marché est immense car en pareil cas, on n’est plus dans une niche. D’ici deux ou trois ans on pourrait doubler notre chiffre, un CA qui laisse du résultat. Il nous faudrait donc un partenaire structuré qui serait plus à même de continuer notre développement. Christophe (Orlando) serait le garant technique et pourrait mener l’équipe. C’est un type formidable et d’une rare compétence.

SLU : Tu te vois donc rester le nombre d’années nécessaire au passage de témoin.

Gérard Giraudon : Bien sûr, c’est indispensable. Il faut que la confiance bâtie au cours des années soit transférée petit à petit sur le repreneur. Son profil nécessaire est l’inventivité, le sens commercial et une bonne connaissance des outils techniques.

Laisser un commentaire