Notre président a parlé de mafia en évoquant les bretons. Si investir avant les autres, s’équiper au top de la technologie, prendre des risques calculés et faire du bon boulot c’est être mafieux, il ne faudra pas qu’on oublie notre gilet pare-Kouign-amann quand on retournera voir Bob et sa bande d’Eurolive !

Nous l’avons déjà annoncé dans nos colonnes binaires, les bretons d’Eurolive, grands fans devant l’éternel du bois allemand de d&b, ont dégainé les premiers en s’offrant un kit de GSL avant et pour le bonheur de tout le monde.
Nous avons donc profité de la première grosse sortie du nouveau système lors du festival Art Rock à Saint-Brieuc pour aller l’écouter avec autre chose que des CD. Ça déménage vraiment.
Pour ceux qui ne le savent pas, Art Rock n’est pas qu’une scène. Toute la ville s’ouvre trois jours durant à la musique et s’offre aux visiteurs dans 8 endroits différents, plus le off.
La grande scène n’est pas si grande puisqu’elle est hébergée en plein centre-ville rue Poulain Corbion sur le parking éponyme qui mesure 100 x 50 mètres, un demi hectare en somme, où nous sommes accueillis par Matthieu Le Failler qui jouera parfaitement le rôle de guide dans la ville quand nous irons visiter les autres scènes installées par Eurolive.


Nous arrivons juste à temps sur cet espace pour shooter les deux lignes de GSL composées de 8 SL8 et 4 SL12 par côté.
Les habituels tulles micro perforés et imprimés avec le nom du festoche sont en train d’être mis en place afin de fermer les côtés de la scène montée par Stacco, des tissus qui n’aiment que très modérément d’être gorgés d’eau de pluie ou, pire encore, d’être repeints, ce qui revient au même puisque cela bouche les perforations acoustiques.
Deux panières de 6 D80 donnent le la aux 24 têtes malgré l’Array Processing, une par côté. Le GSL est un deux voies actives seulement, soit deux boîtes et deux jeux de DSP différents par D80.
Les GSL-Sub nécessitent chacun 2 pattes de D80 ce qui fait que deux racks de 3 amplis, suffisent pour en alimenter 12.
SLU : Matthieu, je ne vois pas les sécus sur les deux lignes…
Matthieu Le Failler : Non, les moteurs portent facilement la charge. On préfère ne pas en mettre pour pouvoir affaler plus rapidement en cas d’intempérie (ahhh ces bretons NDR)

SLU : Combien de techniciens sont présents pour le son de la grande scène ?
Matthieu Le Failler : L’équipe de la grande scène est constituée de 8 personnes en tout. Deux à la face, deux au retours et 4 au patch.

SLU : Que proposes-tu comme consoles ?
Matthieu Le Failler : A la face une XL4 et une Pro2 Midas, et une CL5 Yamaha. Aux retours une CL5 et une XL250 Midas, plus bien entendu tout ce que nous accueillons des groupes qui viennent avec leur régie.
Une minute en régie avec Wilfried Lasbleiz qui mixe la face de Marquis de Sade. XL4, gates Drawmer, supers réverbérations, un multi assez court entre le plateau et les préamplis, ça sonne pile poil comme il faut.
SLU : Vous avez beaucoup de consoles analogiques à Eurolive ?
Matthieu Le Failler : Oui 7 en tout dont aussi des Heritage. Les alimentations que tu vois sur la XL250 sont d’ailleurs celle de l’Heritage qui sont plus « nerveuses ». On a encore celles d’origine, mais quand les nouvelles sont disponibles, on ne se prive pas de les prendre. Ça fait un rack assez lourd puisque les H3000 ont besoin d’une double alim et d’un spare, mais ça sonne vraiment mieux et puis comme dit Bob, autant en avoir trois parce que quand une claque, sinon, t’as plus de spare (rires !)
SLU : Qu’avez-vous en termes de retours ?
Matthieu Le Failler : Des wedges M4, des sides en 2 V-Sub et 3 V, et pour les batteurs on a aussi des V-Sub.

Arnaud Pichard, d&b et lui, c’est du sérieux !
SLU : Arnaud, tu es en charge du système. Comment sont filtrés les subs et les têtes ?

Arnaud Pichard : “Ils sont filtrés à 70 Hz, et les boîtes sont en full range. Les 14’’ des têtes ont beaucoup d’impact et certainement plus que les 21” qui équipent les subs. Autant laisser faire à chaque HP ce qu’il fait le mieux.
SLU : S’agit-il d’un arc sub ?
Arnaud Pichard : Oui, les ensembles de subs sont espacés de 2,5 mètres. Ce choix de Matthieu nous permet de contrôler la directivité jusqu’à 82 Hz.
Plus on resserre, plus on monte la fréquence de contrôle. Comme on coupe à 70, on préfère avoir une ligne plus large. Et c’est ArrayCalc qui nous donne le délai entre chaque pile. Ce qui me reste à rentrer à la fin c’est le délai de phase entre subs et têtes.”
SLU : A quoi vous sert de nos jours le vénérable mélangeur XL88 Midas ?
Matthieu Le Failler : “A recevoir tous les signaux analogiques de spare des diverses consoles chaque soir. Ça me permet aussi de ressortir proprement des signaux analogiques pour les télés et radios en mono ou stéréo via un distributeur de ligne Drawmer.

SLU : Comment le mix est routé vers la face ?
Matthieu Le Failler : Le numérique rentre directement dans le DS10 d&b qui le transporte et le distribue aux autres DS10 qui sont dans les racks d’amplis.
L’analogique transite par l’XL 88 avec la possibilité d’insérer un Klark DN370. Un Lake LM44 fait la conversion vers le numérique.
SLU : Quels choix de réglage avez-vous fait pour l’Array Processing ?

Matthieu Le Failler : D’abord d’atténuer assez fortement le niveau une fois atteint le bout du gradin arrière afin d’éviter de boxer le mur qui n’est qu’à 55 mètres et génère des réflexions arrière (encore assez présentes dès que le système est excité avec un signal clair et dynamique NDR) ensuite atténuer à raison d’un dB par doublement de distance.
C’est théorique mais on n’en est pas loin. Rappelons que je dispose de beaucoup de boîtes, d’une forte réserve de dynamique et d’une surface à couvrir très modeste. Ça passe aussi en termes de ressources DSP et d’impact sur le son ; nous n’allumons que deux jaunes.
SLU : Comment vois-tu l’arrivée de la nouvelle norme 102 ?
Matthieu Le Failler : J’ai d’abord un petit doute dans mon rôle d’accueil. Si un groupe électro joue avec un gros contour qui désormais apparaît dans la norme dBC, je ne me vois pas amputer artistiquement sa musique.

Quoi qu’il en soit je dispose avec les sonomètres Amix de mon outil de référence et d’enregistrements requis par la loi, et dès maintenant on essaye de travailler dans le gabarit de la nouvelle norme en profitant de la sensation de pression offerte par le nouveau système.”
Une fois le système calé, on profite d’un moment de répit dans la régie pour mieux découvrir Arnaud Pichard dont la compétence et la connaissance des systèmes d&b saute aux yeux.

SLU : Tu fais quoi au quotidien Arnaud…
Arnaud Pichard : “Je tourne avec des artistes de différents styles et parallèlement je bosse avec des boîtes comme Eurolive ou Expert Event à Paris car je suis parisien. En plus de tout ça, je suis responsable du SAV pour d&b chez Diversity avec l’agrément pour les enceintes et les amplis.
SLU : Et tu as le temps de faire tout ça ?
Arnaud Pichard : C’est très compliqué, j’y arrive mais je n’ai plus beaucoup de temps pour moi. Il va falloir que je prenne des décisions car le nombre de dates est en augmentation. Je fais en sorte quoi qu’il en soit de ne jamais mettre plus de 48 heures pour dépanner un produit d&b. Je suis en atelier deux à trois demi-journées par semaine.
SLU : Et quand tu es comme ici une semaine entière ?
Arnaud Pichard : Je prends une semaine de vacances (rires !) Non, les clients me connaissent et savent très bien comment je fonctionne. Ca fait 10 ans que je le fais et il n’y a jamais eu de problème.
SLU : Surtout qu’il n’y a pas tant de SAV que ça que je sache avec d&b…
Arnaud Pichard : Justement ! C’est un matériel qui est extrêmement fiable mais la quantité de produits vendus en France est très importante. Depuis les P1200, les A1, les C4, C7, forcément on arrive à 20 ans, c’est donc normal qu’il faille faire de la maintenance dessus. Quand on prend les références actuelles comme le D80, je n’en ai eu jusqu’à présent qu’un, et encore, il avait pris de l’eau.
Du J, je n’en ai jamais eu. Peut-être d’autres centres agréés en ont reçu mais pas moi. Du Q1 un peu plus, les moteurs d’aigu essentiellement, mais rapporté à la quantité en circulation, ce n’est pas grand-chose, d’autant qu’il a été souvent employé au-delà de ses possibilités réelles. (On sait, Jamie Cullum, Zénith de Paris archi-comble, période artistique où le son s’était épaissi et pourtant il n’y avait que 9 Q1 par côté. Dans les limiteurs tout du long NDR)

SLU : Les HP de grave doivent aussi trouver le temps long non ?
Arnaud Pichard : Bien sûr. On m’en rapporte parfois en précisant que le son a changé (rires). 17 ans pour une suspension, c’est très long. Certes l’échange du transducteur coûte cher, mais après, t’es reparti pour 15 ans.
SLU : Remembranage ?
Arnaud Pichard : Non, chez d&b c’est changement du HP complet qu’on fixe à la clé dynamométrique. Eurolive est agréé pour le faire, mais pour la partie électronique, ne sont agréées que Fa Musique et Diversity.
SLU : Il y a quand même eu l’épisode de la fameuse nappe du D12 (rires)
Arnaud Pichard : Cela a été long car j’ai fait le tour de France pour aller les remplacer sur la quasi-totalité du parc français, et il y a eu beaucoup de D12 vendus. Quand je voyais un ampli rentrer en SAV, je demandais que les autres modèles en parc chez ce prestataire me soient envoyés. Je suis devenu le roi de la pompe à dessouder. Didier Lubin avait parlé d’un mec qui avait pris l’habitude de le faire… c’était moi (rires) !Quelques E-Pac ont été concernés car ils ont la même nappe.

SLU : Revenons à toi. Tu te vois comment à part avec une pompe à dessouder les prochaines années ?
Arnaud Pichard : J’ai commencé par de la prestation mais aujourd’hui il ne me reste plus qu’Eurolive pour qui je collabore sur Art Rock, la scène 3 de Carhaix, Paimpol et Expert Event. Je pense que je vais mixer de plus en plus. Je travaille pour l’Orchestre national de jazz, Thomas de Pourquery Supersonic, quelques dates pour Vitalic en remplacement de mon pote Freddy Martineau, Maestro…
SLU : Comment as-tu connu Bob Le Louarne ?
Arnaud Pichard : Par le biais du SAV d&b chez Diversity. Zoli, avec lequel je m’entendais très bien, m’a présenté Didier Lubin (Lulu..si tu nous écoutes ! NDR) Bob et plein d’autres, et m’a formé sur le SAV d&b. Quand j’ai rencontré Bob, on s’est bien entendu et c’est grâce à lui si j’ai pu venir en festival.
C’est le genre de mec qui fait plaisir aux techniciens avec le matériel. SI on a besoin de quelque chose, il le fournit, et en plus Eurolive est une des dernières sociétés à avoir gardé autant de régies analogiques en parfait état de marche et un vrai esprit de famille. Bob c’est un ami avant d’être un patron de boîte.”
Si Bob m’était compté, non, conté..
Inutile de préciser que cette entrée en matière d’Arnaud sur Bob nous a bien mis sur les rails. Du coup, c’est plus fort que nous, nous l’interrogeons sur ses pistes pour le développement et surtout la transmission à moyenne échéance d’Eurolive. Le marché français recèle en effet plein de petites pépites dont le mentor approche la soixantaine…
Bob Le Louarne (BLL élevé et gaffe au débattement des bretons NDR) : “On a plusieurs pistes. J’attends de voir des propositions. Si ces dernières ne nous conviennent pas, on mettra en place une continuité basée sur les techniciens et d’autres personnes très proches de la société. Eurolive se porte bien et jouit d’une très bonne réputation, technique comme en termes de gestion, ce qui nous a permis d’investir dans 12, 12, 12 et 12.

SLU : ??
Bob Le Louarne : 12 GSL, encore 12 GSL, 12 GSL-Sub et 12 D80. Il en faut 18 pour faire marcher le système mais j’avais 6 amplis d’avance ! Notre banquier, le propriétaire du système, va venir nous voir (Nous avons eu le plaisir de répondre à quelques-unes de ses questions le soir même NDR).
SLU : Comment pourrait-on décrire le fonctionnement d’Eurolive, ta gestion…
Bob Le Louarne : J’ai toujours avancé comme sur une route que tu ne connais pas, quand les paysages ne te plaisent pas tu avances, et parfois ils sont beaux et tu t’arrêtes. Je ne fais pas de plans à 5 ou 10 ans. Ça dépend d’où vient le vent, et je peux très bien changer d’avis si le besoin s’en fait sentir en termes de gestion.
Pour ce qui est du matériel, j’ai des idées très claires et si j’ai investi dans le GSL c’est parce que je sais que c’est du bon matériel rentable. Ce système est plus puissant et efficace que le J, c’est pour ça qu’on en rentrera un peu plus pour pouvoir disposer de deux ensembles de 8 têtes et 6 subs. Ça permettra de bien le valoriser et de mieux amortir son coût tout en garantissant à nos clients un excellent résultat. Ce n’est pas le nombre de boîtes qui compte, mais le résultat. Avec le GSL j’en mets un peu moins et pourtant c’est mieux !”
Mais Art Rock c’est aussi…
Une balade à pied dans Saint-Brieuc nous donne un aperçu de la façon avec laquelle le festival est décliné en de multiples plateaux plus petits.



Et le son dans tout ça
Une première vraie écoute du GSL et pas une démo du fabricant (STOP les CD avec 2 dB de dynamique… NDR), apporte pas mal de réponses.

Le remarquable bass/batt envoyé pour savoir où il met ses oreilles par un des mixeurs, donne le sourire et fait lever des pouces sur l’esplanade de la Grande Scène.
Oui, le GSL a un grave incroyable, dense, plein, directif et totalement autosuffisant pour mixer, un vrai grave de « gros » système. Oui, le GSL a de l’impact et même beaucoup d’impact dont il faudra savoir faire bon usage.
Oui, le GSL a de l’aigu avec une signature très proche du V qui est un délice, et une finesse comparable, sans pour autant manquer de mordant et de puissance et enfin oui, le GSL a conservé son bas mid pavillonné qui lui apporte cette attaque caractéristique et très appréciée.
Très bien aussi sa sécheresse malgré un arc sub qui n’est pas spécialement réputé pour apporter définition et impact à un système. Il va être difficile de dire du GSL qu’il est trop tenu, processé ou limité dans une enveloppe sonore typée d&b.
La filiation avec la marque est évidente, mais la quantité de matière délivrée est telle qu’il est désormais possible de façonner une dynamique et une couleur tout en bénéficiant des avantages de ce système en termes de puissance, directivité large bande et uniformité de couverture grâce à l‘Array Processing dont il faudra malgré tout résister aux sirènes.

Pour avoir eu la chance d’écouter le GSL avec et sans processing, je peux certifier que sagesse et raison font du meilleur son.
Enfin une balade derrière la scène est presque inquiétante. Si au plateau amplis et retours ne marchent pas, comme lors de l’écoute d’un virtual, la pression est si basse qu’on ne sait réellement pas si la face est ouverte.
On se retrouve à se parler sans crier et sans être submergé par l’habituelle masse d’infra et de grave qui noient tout à l’arrière et sur les côtés. Les habitants de la place doivent apprécier.

Hélios, tu nous ferais le noir salle ?
Le soir même, l’écoute de Mat Bastard et de Marquis de Sade confirme nos premières impressions. Ça pousse très fort et le grave porte loin devant, un bas qui fait vibrer les flights et les pantalons. Autre constatation, chaque groupe dispose de sa couleur et de sa dynamique et le seul trait commun est le sentiment de puissance et d’headroom de ce système en 12 têtes.

Pour Art Rock, 8 têtes par côté auraient largement suffi, et il en va de même pour les subs qui ont joué à -6 dB, voire moins. Le haut du spectre revigoré par rapport au J va en revanche nécessiter un peu de sagesse de la part des mixeurs. Les désormais trois moteurs qui équipent chaque boîte ont des muscles.
La seule crainte qui était celle de ne pas disposer de la patate d’une tête en 12” et de subs en 18” est balayée. Les 14” des SL ont la claque et avec leurs nettoyeurs en 10”, profondeur et portée. Les 21” des SL-Sub sont forcément moins nerveux que des 18, mais utilisés quand c’est possible avec les SL en full range, ils musclent bien les deux dernières octaves et descendent clairement très bas.

Nous quittons St. Brieux à regret. La ville toute entière vibre au rythme de Art Rock. Encore merci aux organisateurs du festival et à tous les techniciens d’Eurolive qui nous ont reçus avec huitres, vin blanc & sourire, sans parler de Bob ! Bon vent à tous et rendez-vous à la rentrée dans les jardins de St Cloud. Mon petit doigt m’a dit que les magiciens sonores de Backnang n’ont pas chômé et qu’une surprise nous y attend…
D’autres informations sur le site d&b audio, le site Eurolive et sur la page FB Art-Light