HellFest 2018, l’enfer version 3.0

La scène I accueillant le groupe « Holliwood Vampires », et la scène II préparant le prochain groupe

Pour ceux qui ne sont pas familiers avec ce genre musical, le Hellfest est le festival heavy métal de référence en France. Troisième en termes de fréquentation, Il tend même à devenir une référence Européenne dans cette discipline. Avec 6 scènes et 160 groupes, l’offre musicale est l’une des plus complètes du genre.
L’édition 2018 a de nouveau eu rendez-vous avec le succès : 180 000 festivaliers se sont regroupés à Clisson pendant trois jours, pour partager leur amour du métal car le Hellfest, souvent décrié comme n’étant qu’une messe honorant diable et démons, se révèle être un magnifique lieu de partage et d’échange, une véritable communion intergénérationnelle.

Deux scènes pour le prix d’une !

Comme la plupart des festivals, le Hellfest dispose de plusieurs scènes, sauf qu’ici les deux principales sont identiques, placées côte à côte et toute la journée, lorsque l’une joue, l’autre se prépare. Cela procure aux festivaliers un flux constant de musique et une programmation oscillant entre ancienne garde et nouvelle génération.

Tristan Szylobryt

Ainsi on a retrouvé sur la Mainstage I des groupes « classiques » tels qu’Iron Maiden, Megadeth, Avenged Sevenfold, Judas Priest, Europe, alors que la scène II a proposé une programmation plus électronique, plus industrielle, avec Marilyn Manson, Limpbizkit, Body Count ou encore Steven Wilson.
C’est Tristan Szylobryt qui a réalisé la conception lumière de ces deux scènes. Le site est aussi un exemple à suivre quant aux infrastructures proposées aux festivaliers. Au-devant des deux scènes, un pavage a été mis en place pour éviter de s’enfoncer dans la boue lors de grosses pluies, ou de soulever un énorme nuage de poussière les jours de canicule.
À la croisée de quatre allées, on peut également admirer une statue géante de Lemmy, chanteur iconique du groupe Motorhead, ou profiter d’une vue d’ensemble du site dans un tour de roue panoramique.

NDRL : Tristan, on le connaît bien ici à SoundLightUp car depuis la création du magazine il fait partie de l’équipe, en réalisant des bancs d’essais et des infos nouveaux produits. Nous avions très envie de le retrouver de l’autre côté de la barrière lors d’un reportage de ce festival.
Nous avons confié cette mission à Fabrice Gosnet, un membre du team Oliverdy (également chef produit Luminex) qui était sur place pour donner un coup de main à Tristan pour établir le réseau. Fabrice a accepté cette mission, redécouvrant le plaisir d’écrire en français sur un sujet qui le passionne.


Deux scènes principales, deux ambiances

Pour Tristan Szylobryt (voir interview ci-après), concepteur lumière des deux scènes principales, chacune se devait d’avoir une signature particulière, en relation avec les groupes accueillis, et les demandes des éclairagistes respectifs. Au travers de ces demandes et des figures imposées par des productions souvent capricieuses, Tristan a donc conçu deux systèmes d’éclairage bien distincts, créant ainsi une vraie différence entre les deux scènes. Et au vu du nombre de groupes accueillis par jour et par scène, l’exercice a dû être aussi compliqué qu’il l’est pour nous de prononcer correctement son nom de famille !

La face et le trad de la scène 1

Pourtant, il est parvenu à satisfaire la plupart des demandes des groupes, en faisant parfois des concessions sur son propre design, ou en trouvant des compromis avec les éclairagistes eux-mêmes. Bien sûr, les équipes techniques de certains groupes sont connues pour leur très grande ouverture d’esprit, et la douceur de leurs réparties quand on leur explique que leurs demandes sont trop compliquées à satisfaire…

Pour constituer son kit lumière, Tristan s’est appuyé sur un panel de marques et de modèles, répondant aux critères demandés pour ce genre d’exercice.

Vue sur le kit de la scène I. On peut apercevoir des projecteurs GLP Impression ajoutés spécialement pour l’un des groupes

Pour la scène I, des Robe BMFL Spot, Martin Mac 2000 Wash, et pléthore de projecteurs halogènes tels que Portman, Molefay et Sunstrip. Le tout accroché sur différents plans pour pouvoir répondre aux angles d’éclairage des groupes. Et que serait une scène métal sans stroboscope ? Réponse : un repas sans pain ! Des Martin Atomic LED ont donc pu satisfaire les éclairagistes désireux de donner de l’impact à leur show !

Pour la scène II, le choix de Tristan s’est tourné vers des projecteurs plus contemporains et à LED : un florilège d’Ayrton MagicBlade, Claypaky K20, de barres de LED Senzo ont permis aux éclairagistes amoureux des mouvements et changements de couleur rapides, d’étancher leur soif de créativité. Des BMFL Spot et des Martin Mac 2000 Wash venant appuyer les projecteurs à LED.

Pour la partie contrôle, il s’est entouré de deux équipes de pupitreurs aguerris, en charge d’accueillir les éclairagistes des groupes en tournée. Deux pupitreurs par scène (équipe du matin et équipe de soir) avaient également pour rôle d’éclairer les groupes n’ayant pas d’éclairagiste attitré. La régie lumière du Hellfest est sans nul doute parmi l’une des plus belles et des plus confortable qu’il m’ait été donné de voir. Elle peut accueillir jusqu’à 6 consoles, tout en laissant un espace de circulation aux utilisateurs.

Vue sur la partie avant de la régie, avec une console lumière GrandMA2 Light au premier plan, et une GrandMA Full Size au deuxième plan.

Une console MA Lighting GrandMA2 Full Size était dédiée à chaque scène, ainsi qu’une console GrandMA2 Light en secours. Une autre console MA était dédiée au contrôle de certains circuits pour l’appui de la captation vidéo par la chaîne Arte. Coté accueil, nous avons pu apercevoir des éclairagistes venant avec des Hog 4 High End, ou Magic Q Chamsys.

La station Wysiwyg en arrière-scène.

L’un des atouts majeurs des systèmes de contrôle d’éclairage actuels offerts aux opérateurs est la possibilité de prévisualiser leur show dans un environnement scénique virtuel.
Deux stations Wysiwyg étaient à leur disposition : l’une à l’arrière de la scène, dans un Algeco, afin que les opérateurs puissent adapter leur show au kit du festival, l’autre étant installée au pied de la régie, pour qu’ils puissent vérifier leur show juste avant leur passage.

L’incubateur Oliverdy

Pour réaliser un chantier d’une telle ampleur, un énorme travail de préparation doit être effectué en amont.

Tristan, également formateur, dispense une formation de niveau avancé sur GrandMA2 au centre de formation Oliverdy, situé à Voisins-le-Bretonneux. C’est dans ce centre qu’il a pu rencontrer d’autres formateurs, tel que Marc Feillet, spécialiste du logiciel CAD Vectorworks. Tristan s’est donc appuyé sur les compétences de ce dernier pour les plans 3D, en partant des schémas structurels des scènes I et II. Après avoir épuré les fichiers initiaux, Marc a donc pu réaliser des schémas clairs et concis dans lesquels les structures scéniques (ponts, échelles, totems, perches) pouvaient être intégrées, ainsi que les projecteurs.
C’est à ce niveau qu’intervient le deuxième complice de Tristan, Julien Ferreiro, formateur sur le logiciel de prévisualisation Wysiwyg. En suivant les plans de feu réalisés par Tristan, il a donc créé une multitude de plans sur Wysywyg, correspondant à chacune des configurations de chaque journée de festival, et ce pour les deux scènes.

L’un des très nombreux plans 3D réalisés sur le logiciel Wysiwyg. Ici la configuration de la scène I pour les concerts du vendredi.

Une fois les plans 3D créés dans Wysiwyg, les opérateurs pouvaient passer à l’étape suivante : le pré-encodage.

Olivier Dufresne, directeur du centre de formation, a mis donc une salle à la disposition de Tristan et son équipe, afin que tout le monde puisse se réunir pour discuter du projet, préparer ou modifier des plans, planifier les opérations.
Les opérateurs pouvaient connecter une console GrandMA2 au serveur Wysiwyg, et commencer leur pré-encodage et réaliser les premiers états lumineux. Cette phase est cruciale car c’est un gain de temps considérable au niveau de l’encodage lorsqu’ils sont sur site. L’étape restante était de créer un réseau informatique sécurisé pour interconnecter tous les équipements nécessaires.

L’un des très nombreux rendus de la scène I créés par Julien Ferreiro sur le logiciel Wysiwyg.

Redondance, quand tu nous tiens !

Tristan (Szylobryt) a aussi fait appel à moi, formateur en réseau d’éclairage scénique et architectural. Tristan a créé un réseau informatique basé sur une dorsale en fibre optique de type multimode. L’idée principale était de fournir un maximum de redondance, et ce à tous les niveaux.
Dans un scénario à deux scènes, le plus simple est de créer deux réseaux totalement indépendants. Mais afin de pouvoir superviser et administrer les équipements scéniques des deux scènes d’un même point, facilitant ainsi largement le temps de configuration et d’intervention en cas de problème, l’idée a donc été de créer un réseau global, entièrement redondant, utilisant la technologie VLAN pour séparer les protocoles utilisés sur les deux scènes.
Deux multipaires de fibre multimode OM3 ont été tirés entre la régie et la scène, fournissant ainsi un premier niveau de redondance. Si l’une des fibres se trouvait endommagée pour une raison ou pour une autre, l’autre fibre prenait le relais automatiquement. L’emploi d’un multipaire permet également de fournir des fibres indépendantes pour les besoins des éclairagistes en tournée.

Schéma de principe du réseau Hellfest 2018

Autre point, deux switches ont été installés pour la régie et le plateau de chaque scène. Ainsi, en cas de problème sur un switch, les informations pouvaient transiter automatiquement par l’autre switch. En régie, la console principale de chaque scène était connectée sur le switch principal, alors que la console de secours était connectée au switch secondaire.
Suivant le même principe, si l’un des switches venait à tomber en panne, l’opérateur pouvait immédiatement basculer sur la console de secours. Idem sur le plateau, les convertisseurs ArtNet vers DMX étaient également connectés sur deux switches. Le système complet reposait sur des switches Luminex GigaCore, des convertisseur Ethernet-DMX Luminex, et des splitters RDM Oxo.

Florent Cueno à gauche et Antony Le Fur, les deux administrateurs réseau.

Pour la partie Intercom, le choix s’est tourné vers le système Green Go ELC, qui permet de faire communiquer toutes les équipes lumières (scènes I et II) au travers du réseau, les stations étant directement alimentées depuis des switches Ethernet, via la technologie PoE (Power over Ethernet).
Deux administrateurs réseau avaient la charge de gérer le système durant les trois jours de festival. Anthony Le Fur accueillait les opérateurs le matin et gérait leur connexion au système, Florent Cueno prenait le relais en milieu d’après-midi jusqu’à tard dans la nuit, et avait également pour mission de préparer les configurations et les bandeaux de connexion pour le lendemain.

Le réseau était segmenté en plusieurs VLANs (Virtual Local Area Network), afin d’éviter des problèmes de conflit entre les différents protocoles, mais également pour éviter que l’opérateur de la scène I puisse prendre le contrôle du kit lumière de la scène II ! Au total, une dizaine de VLANs ont été créés pour interconnecter les consoles, intercoms, mais aussi pour fournir des réseaux dédiés aux éclairagistes en tournée.

Deux des 4 switches Luminex situés en régie et dédiés à la scène II

Interview de Tristan Szylobryt

SLU : Peux-tu nous dire comment t’es-tu retrouvé designer sur le Hellfest 2018 ?

Tristan Szylobryt : J’ai commencé à travailler sur ce festival alors qu’il s’appelait encore le FuryFest, lors de la seconde édition, au Mans. Je travaillais à l’époque pour M.E.S, avant leur fusion avec Melpomen, qui avait une antenne à Gonesse. Je faisais partie de la petite équipe parisienne, incluant Thibert Desmoulin et Stéphane Migné, qui cogéraient le FuryFest avec Fabienne Bardot.

Tristan Szylobryt

J’ai ainsi travaillé à tous les postes Hellfest (électro, console…). À l’époque le système lumière était beaucoup plus simple, il n’y avait pas de réseau, pas de Wysiwyg, pas de projecteur à LED ! Le gros du travail était principalement sur le réglage et le dépannage.
Au fil des années, les besoins techniques ont augmenté : les kits lumières ont pris de l’ampleur, les opérateurs devaient parfaitement maîtriser leur console, l’accueil des équipes techniques devait se faire de plus en plus en anglais.
À l’époque, je travaillais beaucoup sur GrandMA1, avec les balbutiements du réseau lumière, j’ai donc profité de ces demandes pour évoluer au sein de l’équipe du Hellfest.

Ensuite, le festival s’est appuyé de manière exponentielle sur la société Régie Lumière, pour répondre aux besoins de plus en plus techniques. Olivier Legendre et Nicolas Savigny ont apporté la prévisualisation sur Wysiwyg, ce que j’attendais également. Les équipes grandissant, j’ai endossé le rôle de régisseur, principalement de nuit, pour superviser tous les changements nécessaires aux spectacles du lendemain.

la régie et le nid d’aigle

L’année dernière, la société 4Eleven a pris le relais sur le design et la gestion d’équipe, ce qui, et je le pense sincèrement, a été très bénéfique au Hellfest, car elle a apporté une vraie structure dans la gestion des ressources humaines, avec une définition précise des postes. 4Eleven n’a cependant pas pu renouveler l’opération pour l’édition 2018, son agenda étant vraiment rempli, et le festival demande une énorme préparation en amont.

Jérôme Malen, responsable lumière de Melpomen

SLU : C’est donc naturellement que l’organisation t’a contacté pour t’occuper de l’édition 2018 ?

Tristan Szylobryt : La question s’est en fait posée de trouver quelqu’un qui connaisse le dossier, qui connaisse les équipes, et qui puisse gérer un dossier technique de cette ampleur.
C’est Jérôme Malen, responsable lumière chez Melpomen, qui a eu l’idée de me contacter pour me le proposer. Nous nous sommes rencontrés au salon JTSE (ce qui était déjà un peu tard !), et je savais que c’était un chantier d’envergure. Après réflexion, j’ai décidé d’y aller car je savais que je pouvais m’appuyer sur la compétence de gens qui maîtrisent leur sujet, que ce soit les consoles, le réseau, les blocs, le dessin technique, le Wywisyg, les changements de kit.

SLU : Est-ce toi qui as constitué les équipes ?

Tristan Szylobryt : Oui, à l’exception des poursuiteurs car l’équipe est constituée de personnes qui sont fidèles au festival depuis des années, surtout sur la scène II.
Julien Recoque (régisseur technique de l’équipe lumière) m’a également conseillé sur le choix de certaines personnes, pour des compétences bien précises.

Julien Recoque, régisseur technique de l’équipe lumière

SLU : J’ai eu la chance de rencontrer Julien, il joue un rôle majeur !

Tristan Szylobryt : Oui, un événement pareil ne peut se monter qu’en s’appuyant sur des gens qui maîtrisent leur sujet, et qui sont capables de réagir rapidement et en toute autonomie en cas d’imprévu.

SLU : La plage horaire de travail, quasi continue, impose un changement d’équipe ?

Tristan Szylobryt : Oui, c’est impossible à réaliser sans les deux équipes. Cette année nous avons également pu compter sur le matériel de Melpomen et de Régie Lumière, qui est très bien entretenu, mais il est indéniable qu’il a également gagné en fiabilité, ce qui fait une source de stress en moins pour les équipes en charge.

SLU : A partir du moment où l’on t’a assigné le rôle de designer, comment as-tu commencé ton travail de création ? Je suppose que la forme de la scène était définie ?

Tristan Szylobryt : Les scènes sont standard, tu ne peux pas y déroger mais au niveau du design, il n’y avait pas grand-chose d’imposé. Bien évidemment, hormis les demandes spécifiques de certains groupes, et les rajouts de dernière minute, il était plus simple d’utiliser le matériel disponible chez les prestataires. Il faut également se battre pour avoir certains matériels en quantité et utiliser des sources qui s’équilibrent entre elles.

SLU : As-tu conçu ton design en fonction des demandes des groupes, ou as-tu préféré démarrer sur ton idée, et ensuite l’adapter en fonction des demandes ? Qu’est-ce qui a guidé ton choix ?

Tristan Szylobryt : En fait, c’est un mix des deux. Dans un premier temps, j’ai eu l’idée des univers que je souhaitais. Sur la scène I, je voulais un côté « vintage » au vu des groupes que l’on accueillait, mais un « vintage » revu façon 2018 : pas mal de sources, et surtout beaucoup de tungstène (Portman, Molefay standard, beaucoup de Sunstrip). Ce sont également des sources qui fonctionnent bien en plein jour. Et bien sûr, il faut une bonne base de strobe, c’est évident (rires) !

L’un des nombreux rajouts lumière accompagnant un groupe

Après, je voulais avoir des sources wash et des spots qui soient vraiment des références. Je ne voulais pas de wash à leds sur la scène I, car pour la plupart des groupes que nous accueillions, cela ne faisait pas partie de leurs critères.
Je voulais donc avoir un vrai wash qui puisse fonctionner en plein jour avec un bâton, où il n’y a pas forcément de grosses possibilités technologiques à l’intérieur, mais qui reste efficace. Le MAC 2000 ne me dérangeait donc pas, même si ce n’était pas mon choix de départ, j’ai dû composer avec le stock disponible.
J’aurai préféré avoir du BMFL WashBeam pour être exact. Pour les spots, nous avons mis du BMFL spot, car « ça marche » également très bien. Les seuls projecteurs à leds présents sur la scène I’étaient sur demande d’un des groupes (72 Impression X4 GLP).

Pour la scène II, je voulais quelque chose de plus moderne, avec pas mal de MagicBlade Ayrton et de Claypaky B Eye K20 par exemple. La programmation sur la scène II est plus moderne, plus électro, avec des sons plus industriels, et ce genre de source s’y prête parfaitement.
Les éclairagistes de ces groupes sont également plus proches de ma génération, et n’ont absolument pas peur d’utiliser ce genre de projecteurs, bien au contraire ! Au niveau structure, j’ai voulu également travailler avec différents plans, différentes profondeurs, tout en tenant compte des impératifs d’accueil des groupes.

SLU : Une fois que tu as établi ta base de design, comment as-tu pris en compte les demandes des groupes ?

Tristan Szylobryt : Quand la base est prête, on reçoit les premières fiches techniques, et on regarde ce qui colle, et ce qui ne colle pas. J’ai eu de la chance car j’avais prévu un design qui pouvait s’accorder avec la plupart des demandes, mais sont arrivées ensuite celles beaucoup plus spécifiques, comme Iron Maiden par exemple. Et tout le design de la structure de la scène I a tenu compte de leur kit.

Le perchoir à poursuite Lancelot

SLU : As-tu eu le pouvoir de dire non à certaines demandes ?

Tristan Szylobryt : Hmmm… Cela s’est plutôt bien passé avec la plupart des groupes. Ils ont eu de quoi travailler. Il y a eu des demandes spécifiques mais elles étaient intégrées.
Effectivement, au niveau de la structure, je prévois toujours des ponts au lointain pour un fond noir. Il peut aussi y avoir la demande d’un pont devant pour la vidéo, un ou deux ponts de contre à prévoir, un pour le back-drop, et un devant pour la pyrotechnie. Cela s’apprend avec l’expérience.
Et ensuite, on refait le design suivant les grosses têtes d’affiche, en particulier pour Iron Maiden et Avenged Sevenfold. Là, nous avons dû rajouter beaucoup de plans de structures pour pouvoir respecter le design de chaque groupe, en particulier sur Avenged Sevenfold et leur implémentation de mur vidéo qui n’était pas du tout compatible avec mon design original !

SLU : J’ai vu durant les changements qu’il y avait beaucoup de mouvements de structures. Ca ne traînait pas sur le plateau !

Tristan Szylobryt : Nous avons fait faire des plans Vectorworks pour préparer le rig, les équipes structure de la société Rig-Up ont retravaillé les plans sur Autocad, et nous avons utilisé les mêmes bases pour les prévisualisations Wysiwyg. Cela nous a fait gagner un temps énorme en termes d’organisation et de déroulement durant les changements.

J’ai également la chance sur le dessin 3D d’avoir eu l’aide de Marcus Feillet pour la réalisation des plans Vectorworks, puis de Julien Ferreiro pour les plans Wysiwyg, et enfin de Julien Recoque pour l’expertise technique (calculs de charges, placement des projecteurs, consommation électrique, câblage, manipulation pour les changements…).
Julien Recoque a eu beaucoup de rendez-vous téléphoniques avec Rig-Up qui était sur place, justement pour anticiper toutes ces problématiques, et proposer des solutions. Nous avons énormément échangé en amont, ce qui a permis que tout se déroule plutôt bien pendant le festival. Cela nous a demandé énormément de travail, mais le résultat en valait la peine.
Pour revenir au choix des projecteurs, j’ai dû aussi prendre en compte les captations des concerts par la chaîne Arte. Je souhaitais vraiment avoir un beau rendu, c’est pour cela qu’il y avait beaucoup de latéraux, et pas mal de projecteurs au sol, ce qui faisait des compléments intéressants. Cependant, le sol est resté en place une journée et demie, car entre Avenged Sevenfold et Iron Maiden, ils ne m’ont malheureusement pas trop laissé le choix, j’ai dû le retirer.

Julien Ferreiro, opérateur Wysiwyg.

SLU : Julien Ferreiro, Marc Feillet, toi et moi sommes tous formateurs ? Quel a été le rôle d’Oliverdy dans le Hellfest ?

Tristan Szylobryt : Le centre m’a permis deux choses : tout d’abord d’avoir accès à des gens qui sont des experts dans leurs domaines respectifs. Donc, au moment de la première ébauche des plans, j’ai pu avoir des réponses à mes questions, instantanément, ce qui m’a beaucoup aidé, et m’a permis d’accélérer la création du système.
De fil en aiguille, tu t’aperçois quelles peuvent être les personnes idéales pour certains postes nécessaires au Hellfest, et comme tu travailles souvent avec elles, cela crée un collectif. On échange donc beaucoup, mais chacun reste dans son domaine, et j’aime vraiment cet esprit. C’est très enrichissant, et cela crée des passerelles entre des métiers qui sont certes très proches, mais qui peuvent vite se retrouver isolés si l’on n’y prête pas attention. Cela te fait progresser très rapidement techniquement, et c’est vraiment génial.

Tristan et Laurent Garnier, chef electro de la scène 1

La deuxième raison, c’est qu’Olivier Dufresne, gérant du centre de formation, nous a mis un local à disposition. Sur un tel projet, il faut pouvoir communiquer, faire de vraies réunions, pas se croiser sur un coin de bar, ou je ne sais où ! Il faut également travailler avec beaucoup de documents, avec des ordinateurs, pour voir les choses en direct.
En nous prêtant celle salle, Olivier nous a offert une totale indépendance pour la préparation du projet. Nous avons donc pu faire du pré-encodage Wysiwyg, travailler sur les schémas du réseau et le plan d’adressage IP et enfin des réunions avec les responsables d’accueil console.

SLU : As-tu directement géré les fiches techniques, ou y a-t-il quelqu’un en amont qui refuse les demandes ubuesques ?

Tristan Szylobryt : Au niveau du Hellfest, il y a Twiggy, régisseur général, qui fait la liaison entre la technique et tous les groupes : il récupère toutes les fiches techniques, et opère un premier filtrage, car si quelqu’un te demande une scène à 360°, cela va être compliqué!
Lui gère cet aspect-là, et après, nous lui remontons d’autres questions ou demandes. Il y a donc un échange permanent entre nous. Il y a ensuite Philippe Groux Cibial, de Melpomen, qui fait la jonction purement technique son et lumière.

Tristan et Greg Valla, régisseur lumière des Scènes 1&2

SLU : Au niveau contrôle, j’ai pu voir que la régie était bien occupée par les consoles MA Lighting, y a-t-il une raison à cela ?

Tristan Szylobryt : Tout d’abord, il n’y a quasiment rien d’autre dans le parc de matériel du groupe B-Live (rires) ! A ma connaissance, il n’y a qu’une Chamsys et une Hog. J’aurai vraiment voulu avoir une Hog pour la régie car je savais que beaucoup d’éclairagistes allaient venir avec les leurs, et j’aurai souhaité tester le système avant. Cela aurait pu également simplifier les changements.

SLU : Au niveau des projecteurs utilisés durant le festival, quel est celui qui à ton avis s’est le plus démarqué du reste ? Pour ma part, je dois dire que le Portman m’a beaucoup plu !

Tristan Szylobryt : Le BMFL a été efficace, il n’y a rien à dire là-dessus, le Pointe s’en est également très bien tiré. Les barres de leds Senzo en nez de scène étaient parfaites pour les rappels caméra. Et bien sûr, les strobes Atomic 3000 LED marchent vraiment du feu de dieu !

SLU : Un autre coup de cœur ?

Tristan Szylobryt : Le système d’intercom GreenGO m’a vraiment surpris par sa qualité d’écoute, c’était très agréable de travailler avec, malgré le niveau sonore ambiant. Et la capacité d’administrer les équipements à distance était un plus pour l’équipe réseau.

Cette édition a été un réel succès quant au déroulé des opérations. Bien sûr, les techniciens ont eu leurs lots de surprises, certains groupes ayant des besoins non spécifiés dans leur fiche technique, mais dans l’ensemble, tout s’est très bien passé.
On ne peut qu’applaudir le professionnalisme et l’ingéniosité technique dont les équipes ont fait preuve durant les trois jours de festival, ce qui prouve que les équipes françaises n’ont absolument rien à envier aux grosses productions anglo-saxonnes !
En conclusion, it was a Hell of a Fest !


Les équipes techniques :

Régie générale : ‘Twiggy’ Chatal
Régie Melpomen : Philippe Groux-Cibial
Régie Plateau scène I : Pascal ‘Wally’ Magaud
Régie Plateau scène II : Yannis Sada
Régisseur Nuit : Mickael Hervot
Régisseur technique équipe lumière : Julien Recoque
Design lumière : Tristan Szylobryt
Régie Accueil : Greg Valla
Régie technique Lumière : Yannick Creff
Opérateurs console : Fabien Duchossoy, Tibert Desmoulin, Laurent Le Lay, Teddy Prieur, Jaquemine Geffrault
Administrateurs réseau : Anthony Le Fur, Florent Cueno
Dessin technique 3D : Marc Feillet
Opérateur Wysiwyg : Julien ‘Don Pelo’ Ferreiro
Blockeurs : Nicolas Gaborit, Mika Locatelli, Laurent Garnier, Anthony Lefeuvre
Techniciens projecteurs asservis : Nil Tondeur, Guillaume Ardre, Alex Lallement, Sebastien Gombaud
Techniciens lumière : Renaud Chamuzeau, Stéphane Duclocher, Cyrano Mougin, Remy Manesse, Sabine Morenton, Pierrick Julien
Poursuiteurs : François Averty, Fréderic Berthelot, Matthieu Chaillou, Pauline Moreau, Jean-Baptiste Potier

Equipement Lumière

Projecteurs :
34 K20 B-Eye Claypaky
34 Macs 2000 Wash 1500 XB Martin
63 BMFL Robe
39 MegaPointe Robe
20 Pointe Robe
72 GLP Impression X4
40 Q7 SGM
34 Atomic Led Martin
25 MagicBlade R Ayrton
12 strobs Stormy CC Claypaky
13 Led Wash Light Zenit W600 Cameo
23 barres Leds Senzo
16 Mole 8 Thomas
8 Mole 4 Thomas
8 P1 Retro Lamp Portman
12 P2 Hexaline Portman
12 P3 Pix3l Portman
34 Sunstrip
6 poursuites Lancelots 4000 W Robert Juliat

Régie :
2 centrale Intercom GreenGo
2 antenne longue portée
15 postes Filaires
8 postes HF
3 consoles GrandMA 2 Full Size
4 consoles GrandMA 2 Light
3 NPU
2 stations Wysiwyg Portable
2 stations Wygiwyg + écran plasma
2 switches GigaCore12 Luminex
10 switches GigaCore14R Luminex
3 fibres optiques MPT12
4 switches PoE
9 nodes Ethernet-DMX8 MkII Luminex

Plateau et blocks :
1 armoire 630 A
3 armoires 250 A
2 armoires 32A
4 machines à brouillard MDG ME2
3 MDG 3000
20 splitters Oxo B-Box 6
16 splitters Luminex 2.10
3 gradateurs 36 x 3 kW Avolites
1 Grada 6 ex 3 kW Digitour
9 armoires asservis 125 A
1 armoire asservis 63 A
429 Directs + DMX
16 sources graduées 5 kW
8 sources graduées 5 kW

Crédits - Texte & photos : Fabrice Gosnet

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