Bellote, re-Bellote et douze de DOSC

Julien Clerc Symphonique

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Comme d’autres avant lui, Julien Clerc a succombé au symphonique et s’est adjoint une formation de 40 musiciens, grâce à laquelle ses mélodies présentes et passées prennent un relief tout particulier. Fidèle à l’artiste et accompagné par Laurent Midas aux retours, Laurent « Bellote » Delenclos a été chargé de mettre en son cette tournée plus pop que vraiment classique à l’aide de quelques trouvailles dont il a le secret.

Laurent Delenclos dit Bellote et Wilfried Mautret, son assistant. Photo prise dans la patinoire de Meriadeck à Bordeaux

A gauche et debout Laurent Delenclos dit Bellote et à droite Wilfried Mautret, son assistant. Non, cette photo n’a pas été prise en extérieur mais c’est tout comme, on se gèle !!

Il nous a accueillis dans la patinoire Mériadeck de Bordeaux, un lieu à l’acoustique très « tagada (voilà les Dalton) » et où les ondes sonores rebondissent autant que les palets de hockey malgré un traitement acoustique omniprésent ! En voilà un chouette de cha-cha..llen-llen..ge-ge rendu encore plus ardu par les températures polaires régnant en France mi-février y compris et surtout dans la salle elle-même !

C’est dans ce lieu pour le moins coriace que l’on retrouve Bellote de bon matin en train de vérifier la pose de lourds draps noirs sur les hauts panneaux en plexi qui protègent le public des palets en fond de salle, là où se trouvent les buts mais aussi la régie sur le parterre modulaire déposé sur la glace, pile dans l’axe de tir des Dosc.

Bellote : C’est à cette heure-ci que vous arrivez ? A midi tout est déjà en l’air, on t’attendait pour nous filer un coup de main ! (rires !)

Soundlightup : Tu mixes pour Julien depuis quand ?

Bellote : Depuis 2006. Je vais l’accompagner aussi aux Victoires de la Musique cette année où je travaillerai de toute façon. La dernière tournée était assez minimaliste et j’assurais tous les postes seul. Cette année en revanche Laurent s’occupe des retours et de mon côté je suis assisté par Wilfried (Mautret NDC).

Les nouvelles règles du jeu, simplifiées par Vista

La régie son et éclairage derrière laquelle prend place le vidéoprojecteur, un assemblage classique, efficace et rapide à assembler et caser.

La régie son et éclairage derrière laquelle prend place le vidéoprojecteur, un assemblage classique, efficace et rapide à assembler et caser.

Soundlightup : Explique nous les particularités de cette formation symphonique.

Bellote : Pour garder une assise rythmique, il y a un batteur mais sans charley ni toms autres qu’un tom basse. Il assure aussi avec le timbalier les percussions et envoie quelques rares séquences. La basse est assurée par les contrebasses et les violoncelles. En fait les arrangements ont été écrits par Philippe Uminski qui n’a pas de formation classique, du coup le résultat est, disons, de la pop classique où les musiciens ont dû trouver leurs repères. Les contrebasses par exemples ont travaillé les notes piquées à l’archet, quelque chose qui au départ ne leur parlait pas trop !

Un détail de la manière avec laquelle Bellote a « construit » sa Vista avec par exemple en bleu le VCA Piano qui cache l’ensemble de moyens de repiquage de cet instrument, en gris des entrées dites normales avec celle notamment de Julien et enfin en jaune un Aux, dans notre cas le fameux « DBX », un nom générique pour le synthétiseur de sub harmoniques LoAir en plug dont il se sert pour clore certains titres et faire vibrer les chaises !!

Un détail de la manière avec laquelle Bellote a « construit » sa Vista avec par exemple en bleu le VCA Piano qui cache l’ensemble de moyens de repiquage de cet instrument, en gris des entrées dites normales avec celle notamment de Julien et enfin en jaune un Aux, dans notre cas le fameux « DBX », un nom générique pour le synthétiseur de sub harmoniques LoAir en plug dont il se sert pour clore certains titres et faire vibrer les chaises !!

Soundlightup : J’imagine que ça te change aussi pas mal les habitudes entre une boîte de direct et…

Bellote : … sept musiciens pour la basse, trois contrebasses et quatre violoncelles ! Pour changer ça change ! La contrebasse fait l’infra et le violoncelle joue l’attaque. La prise de son est aussi assez particulière puisque chaque contrebasse est reprise par un micro et par un capteur Schertler. Ce relatif luxe dans la captation a nécessité de partir avec une table offrant de grosses capacités en termes d’entrées, la Studer Vista 5SR. J’ai mis le nez dedans et c’est une putain de console ! Une très bonne surprise.

Le cœur de la Vista 5SR avec en orange la somme de fibres qui vont et viennent entre le stage, les retours et le mac. Sous le rack de gauche on distingue la iClock Mutec, en dessous le rack de calcul du multieffet TC 6000 et encore en dessous un onduleur. Sous le rack de droite le générateur « d’orchestre » Lexicon 960L, un sacré bébé !!

Le cœur de la Vista 5SR avec en orange la somme de fibres qui vont et viennent entre le stage, les retours et le mac. Sous le rack de gauche on distingue la iClock Mutec, en dessous le rack de calcul du multieffet TC 6000 et encore en dessous un onduleur. Sous le rack de droite le générateur « d’orchestre » Lexicon 960L, un sacré bébé !!

Je peux par exemple disposer d’EQ et de dynamiques relatifs aux VCA. Prenons par exemple mes huit violons appelés V1. Je les égalise tous les huit à même le VCA. Ça me permet d’avoir les quarante six musiciens sur trente faders. Par habitude j’ai placé le VCA basse contre le fader du pied et de la caisse claire, même si on parle bien d’un symphonique (rires). Avec la Studer on construit totalement sa console et le terme n’est pas galvaudé. Au sujet de cette table, c’est la première fois où je me sers réellement d’une console numérique sans la traficoter, sans lui adjoindre tout ce qu’il faut pour lui donner un son, les préamplis, les sommateurs, j’ai juste mis une horloge externe et je trouve le résultat bluffant, vraiment bien.

Chacun son horloge ? Mais oui c’est possible !

SLU : Une horloge sur une Studer ? Ils savent faire quand même !

Bellote : Franchement on entend la différence. Je ne sais pas ce qu’ils ont mis dedans mais ça marche mieux avec une iClock Mutec. C’est clair et net. La seule où je n’ai pas besoin d’horloge externe c’est la SSL. Comme la Vista est au départ une table broadcast, je la référence à l’aide de black burst. On peut tout faire avec cette console, c’est le paradis du bidouilleur et tu peux aller vraiment loin.

SLU : Il m’a semblé voir dans les racks de LoMid (Laurent Midas NDC) son horloge Antelope Trinity avec laquelle il référence sa table. Comment vos deux horloges peuvent-elles cohabiter ?

Bellote : Normalement il faudrait que nous soyons tous lockés sur la même horloge mais le MADI, je ne sais comment, accepte dans notre cas cette double référence. Nous avons tiré, au cas où, une BNC entre les deux régies et comme sa Trinity est plus stable que ma Mutec, j’avais prévu de m’y accrocher, mais les 100 mètres de coaxial m’ont paru assez…bref, comme ça marche tel quel, on l’a laissé (rires !). On nous a dit que c’est possible car le MADI est très souple question horloge, quoi qu’il en soit rien ne garantit que si je passe ma Mutec en wordclock ça marche aussi bien !

Prise de son atypique pour Symphonique introverti

Un des innombrables DPA4099 attendant sagement sur le pupitre son instrument, un micro disposant de deux atouts décisifs en dehors de son rendu : une pince très astucieuse et un col de cygne.

Un des innombrables DPA4099 attendant sagement sur le pupitre son instrument, un micro disposant de deux atouts décisifs en dehors de son rendu : une pince très astucieuse et un col de cygne.

SLU : Revenons à ta prise de son pour les cordes. Tu joues la proximité.

Bellote: Oui absolument. J’ai commencé par mettre des Schoeps partout et tenté de mettre de l’air et de la distance mais je me suis vite calmé. C’est un symphonique tellement ramassé sur lui-même que je me retrouve avec les timbales à un mètre des violons ce qui dans la « vraie vie » n’arrive jamais. J’adore les Schoeps mais ils repiquent trop généreusement, je suis donc revenu vers des choix plus raisonnables et gérables.

Le coin du timbalier, protégé comme il se doit contre les fuites sonores par des feuilles de plexi. Il faut dire que devant des imposants futs en cuivre se trouvent les violons… Sennheiser 421 et Shure KSM137 pour la somme de petites percussions jouées entre deux roulements de timbales.

Le coin du timbalier, protégé comme il se doit contre les fuites sonores par des feuilles de plexi. Il faut dire que devant des imposants futs en cuivre se trouvent les violons… Sennheiser 421 et Shure KSM137 pour la somme de petites percussions jouées entre deux roulements de timbales.

A défaut de charley, le tempo de quasiment chaque titre a été donné par le batteur avec ce tambourin à pédale ou bien par le timbalier à l’aide de divers œufs et shakers. C’est un Sennheiser e904 qui assure la reprise.

A défaut de charley, le tempo de quasiment chaque titre a été donné par le batteur avec ce tambourin à pédale ou bien par le timbalier à l’aide de divers œufs et shakers. C’est un Sennheiser e904 qui assure la reprise.

J’ai choisi le DPA 4099 qui sonne bien, est très directif, statique et dispose d’une pince très pratique. Pour les flutes j’ai pris des AKG C535, des Audio-Technica ATM350 sur les clarinettes et deux sur le hautbois, un sur l’embouchure et un sur les doigts. Pour les cors j’ai placé des Neumann TLM102 et des AKG C414 sur les cuivres. Le cache en plexi derrière le cor vient absorber un peu de repisse dans les contrebasses qui sont juste derrière et dans lesquelles j’avais plus de vent que de corde !

SLU : Drôle ta batterie sans charley…

Bellote : Ca ne s’y prête pas vraiment, en revanche il y a une chouette bidouille avec une pédale de pied et un tambourin pour rythmer certains titres. Pour la grosse caisse et le tom floor j’ai mis un Beta 52 que je traite de manière très soft. La caisse claire par exemple n’est reprise que par un 414 au-dessus. On ne fait pas du rock’n’roll. Sur les timbales j’ai des Sennheiser 421 et un SM137 Shure pour des petites percussions.

SLU : Et julien il chante dans quoi ?

Bellote : Un Sennheiser 5000 avec une tête dynamique classique qui ne se fait plus, la 5500, et c’est bien dommage. Je la préfère beaucoup à la tête Neumann qui s’adapte aussi à cet émetteur, enfin, à la manière dont le compander HF de l’émetteur réagit à des têtes statiques à réponse très large comme la Neumann. J’adore le filaire Neumann mais pas sa version HF. Je n’ai malheureusement pas réussi à convaincre Julien de rester avec un fil, pas cette fois ! Il m’a fait part de son souhait de pouvoir se balader dans l’orchestre.

Le couple de Schoeps en charge de repiquer « par l’air » le son du piano de Julien Clerc, un Silent Yamaha. Une paire de capteurs Yamahiko viennent apporter un surplus de grave et en cas de danger, il reste la possibilité de basculer sur l’électronique.

Le couple de Schoeps en charge de repiquer « par l’air » le son du piano de Julien Clerc, un Silent Yamaha. Une paire de capteurs Yamahiko viennent apporter un surplus de grave et en cas de danger, il reste la possibilité de basculer sur l’électronique.

SLU : Je vois deux pianos, ce n’est pas très symphonique ça non plus !

Bellote : C’est normal ! Julien joue le sien et Alain Lanty, son vieux complice, est sur l’autre ; en fait un faux piano qui lui permet de varier les accompagnements. Parfois il vient sur celui de Julien quand ce dernier chante debout face public. Pour le repiquage du piano principal et pour disposer de plusieurs options, j’œuvre de trois façons différentes. J’ai d’abord un couple de Schoeps CMC6 monté en MK4 placé en dessous car on joue couvercle fermé. Ces deux micros, comme d’ailleurs le piano dans son ensemble, reposent sur des silentblocs. Ensuite j’ai une paire de pickups Yamahiko, des accéléromètres qui sont placés entre la table d’harmonie et la structure pour renforcer un peu le bas et enfin je sors sur des DI. C’est un piano Yamaha Silent que je fais malgré tout jouer en acoustique car je trouve le son plus joli mais il m’arrive parfois de devoir switcher en cour de concert car l’accord ne tient pas. On le secoue beaucoup et surtout il est soumis à des écarts de température trop importants. Il existe la possibilité de louer un piano dans chaque ville mais on a eu des mauvaises surprises par le passé ; on se trimbale donc le nôtre.

Un capteur Schertler positionné dans le chevalet d’une contrebasse

Un capteur Schertler positionné dans le chevalet d’une contrebasse

SLU : Comment partagez-vous les micros entre Laurent et toi ?

Bellote : On a fait le choix d’être sur les mêmes préamplis Studer, les miens. Laurent est donc alimenté sur sa Vi6 par la sortie de redondance de ma stagebox. Les micros attaquent en direct une seule électronique : un gage de qualité. Comme je suis câblé sur la sortie 1, c’est moi qui gère les gains.

SLU : Mais en fait, il se mange un peu de latence le Patron et il n’aime pas ça… (Sur une précédente tournée, Bellote avait inventé une sortie à zéro latence pour que dans ses ears monitors Julien ne soit pas dérangé NDC)

Bellote : C’est exact, mais à l’époque c’était une DIGIDESIGN qui atteint les 3 millisecondes et donc créait un filtre en peigne pile où il ne fallait pas entre voix de tête et retours. La Studer est à moins de 2 millisecondes ce qui repousse le peigne à des fréquences plus hautes et moins gênantes. Il est ravi car il dispose en outre des derniers EARSONIC EM6. Laurent t’en parlera mieux que moi mais ce sont les premiers ears monitors qu’il n’égalise pas !!

Deux belles réverbérations et un Multirack Waves

A gauche et affichant l’analyseur Flux l’écran du mac supportant à la fois les effets du show, l’enregistreur et, cerise sur le gâteau, la musique d’attente. A droite le portable ayant en charge les Lake.

A gauche et affichant l’analyseur Flux l’écran du mac supportant à la fois les effets du show, l’enregistreur et, cerise sur le gâteau, la musique d’attente. A droite le portable ayant en charge les Lake.

SLU : Toujours très peu d’effets à ce que je vois…

Bellote : Deux très belles réverbérations tout de même : une LEXICON 960 et une TC 6000. La 960 est sur les cordes et les bois pour redonner de l’ampleur et de la longueur à une prise de son très proche et qui gomme trop le lien « orchestre ». La 6000 sert à la voix de Julien. Par des petits délais et de la réverbération je lui donne de la largeur. J’ai aussi un MULTIRACK WAVES dans le MAC dont je me sers pour traiter la voix de Julien avec un compresseur multibande C6 et un compresseur limiteur monobande CLA76. J’ai aussi un plug LoAir que j’utilise pour gonfler certaines fins de chansons ou passages courts en infra. Il paraît en plus que bientôt le Multirack sera ouvert à d’autres marques de plugs ce qui sera un plus appréciable car il n’y a pas que Waves qui sache en développer !

SLU : D’un point de vue du son, le plug-in en général te satisfait-il ?

Bellote : Ahh c’est bien oui, et puis surtout c’est tellement pratique… Je ne trimbale plus rien et avec cette configuration et ma carte MADI, je peux faire 64 inserts !

SLU : Ils ne te plaisent pas les compresseurs de la Studer ?

Bellote : Ils ne sont pas maaaaal mais bon… Le modèle de base est trop simple, j’ai essayé le « Vintage Dynamics » qui est plus paramétrable et il fait l’affaire sans être topissime. Quitte à simuler un effet analogique, j’ai choisi un algorithme externe sur les WAVES. L’égaliseur en revanche est très efficace de même que les coupe haut et coupe bas dont on peut régler les pentes à -12, -18 ou -24, ça c’est terrible ! (Chassez le naturel, il revient au galop ! NDC). Un autre point fort dans cette table c’est le VIRTUAL SOUND PANNING avec lequel en classique j’arrive à ouvrir mon orchestre sans pénaliser les spectateurs qui sont sur les latéraux. C’est la console idéale en classique et cette fonction est juste redoutable. Du coup j’en ai mis partout. (Rires !)

SLU : Et ta mono ?

Bellote : Je n’en donne pas, j’ai sorti un seul côté. Honnêtement ça phase un peu, ça fonctionne avec des délais. La vraie somme mono est un peu bizarre mais comme je n’ai rien « panné » mes deux côtés peuvent faire l’affaire ! Sur les stéréo de la console, les sorties ou les groupes, t’as des élargisseurs stéréo énormes. Les Vitalizer à côté c’est rien. A 200% c’est terrassant, t’as la tête à l’envers. Je m’en sers à un moment du show ou Alain Lanty fait quelques notes d’accompagnement et ça rend très bien. J’utilise à peine 20% de l’automation de la console mais je suis conquis.

SLU : T’avais jamais pratiqué la Vista ?

Bellote : Non ! J’ai passé trois semaines seul avec le nez dans le manuel pour la comprendre et faire ma liste de questions. J’aurais mieux fait de me faire aider par quelqu’un qui la connaissait bien car elle est vraiment ouverte. Tu peux tout configurer y compris le nombre de canaux dans une fibre à l’aide de dip-switches à même les cartes. Inutile de te dire que si l’utilisateur précédent a mis les mains dans le cambouis, tu peux y passer un moment avant de trouver, surtout quand tu n’es pas habitué à ce modèle qui est en plus d’une puissance considérable. Tout confondu, on peut brasser trois cents entrées vers trois cents sorties grâce au MADI.

SLU : Une idée du routing ?

Bellote : J’ai trois cartes MADI. Une me sert avec le Mac pour faire mes 64 inserts avec le Virtuel Rack Waves via une carte RME, une seconde pour enregistrer le show et faire du virtual check avec Logic, j’ai deux fibres et 128 canaux pour cela sur une carte SSL, et enfin une dernière pour recevoir les signaux depuis le stage rack sur scène. Je renvoie d’ailleurs mes 128 signaux vers Laurent pour qu’il puisse enregistrer à son tour avec son Logic et fasse lui aussi un sound check virtuel. Comme je n’ai pas de patch fibre, je brasse à la main. J’y perds en commodité ce que j’y gagne en fiabilité en enlevant une couche d’électronique qui peut toujours défaillir.

SLU : C’est quoi tes minuscules boîtes Meyer autour de la console ? (genre mug question encombrement NDC).

Bellote : Ce sont des MM-4XP. Elles sont minuscules et bluffantes. Elles sont alimentées par leur sub le MM10 et je les ai mesurées (noon, c’est bien la première fois…NDC) c’est très correct. Y’a vraiment rien à dire. Ecoute. T’as une sacrée patate pour un aussi petit truc. C’est aussi préaccentué qu’une Bose mais ça sonne mieux. Je route dedans les talks, les PFL. C’est conçu pour de l’installation mais j’ai trouvé que ça faisait très bien l’affaire pour voyager léger. (Je confirme, ça sonne bien, clair, sec et fort, très Meyer, avec bien entendu une directivité très prononcée. NDC)

SLU : Ton mac il en fait des trucs…

Bellote : Et il est loin d’être à genoux. C’est mon outil à tout faire. Il diffuse la musique d’ambiance, les titres pour caler la diffusion, l’analyseur Flux, le Logic avec 128 pistes, le Multirack Waves. C’est un quatre cœurs et même quand je lance tout, l’analyseur est encore à 60 images par seconde.

La Diffusion made in Bellotte

SLU : Parle-nous un peu de ta diffusion.

Bellote : J’ai opté encore une fois pour un filtrage complet en FIR que j’ai réalisé à l’aide de quatre Dolby, deux à cour et deux à jardin avec une traversée du signal entre les deux en Dante. Je rentre dans la première machine en AES et c’est de là que s’opère la distribution du signal en Dante via un routeur en 1GB. J’ai aussi un secours en quatre paires analogiques si on perd le réseau ou l’AES. Le seul hic est que je dois corriger la petite latence due au protocole Dante dans les trois Dolby qui le reçoivent par rapport au premier qui le génère et où je cale donc des petits retards pour que les enceintes soient en phase. C’est aussi la première machine qui convertit le 48 kHz de la table en 96 kHz, ce qui fait que les quatre Dolby sont parfaitement synchrones.

: Le système à cour et composé de douze V-Dosc et de neuf Kara pour couvrir les latéraux. Deux époques bien différentes et qui se côtoient et se complètent plutôt bien. Non visibles 3 autres Kara posés sur la scène, ramènent le front sonore à hauteur des musiciens.

: Le système à cour et composé de douze V-Dosc et de neuf Kara pour couvrir les latéraux. Deux époques bien différentes et qui se côtoient et se complètent plutôt bien. Non visibles 3 autres Kara posés sur la scène, ramènent le front sonore à hauteur des musiciens.

Le stack de trois Kara posé à même la scène sur son bumper à jardin. Son rôle avec celui placé à cour est de « tirer » vers le bas l’image sonore et redonner cohérence à ce que voit l’œil, 45 musiciens, et ce qu’entend l’oreille, un son venant des étoiles. En arrière-plan l’accordeur a fort à faire avec un piano qui subit des variations de température extrêmes.

Le stack de trois Kara posé à même la scène sur son bumper à jardin. Son rôle avec celui placé à cour est de « tirer » vers le bas l’image sonore et redonner cohérence à ce que voit l’œil, 45 musiciens, et ce qu’entend l’oreille, un son venant des étoiles. En arrière-plan l’accordeur a fort à faire avec un piano qui subit des variations de température extrêmes.

SLU : En termes de boîtes ?

Bellote : Par côté douze Dosc en face, douze Kara en latéral, neuf pendus et trois posés sur scène et un cluster unique et central de douze subs SB28. C’est mon kit de base. Les deux ensembles de trois Kara posés servent à tirer l’image vers le bas. J’ai aussi 4 UPJ Meyer dont j’exploite la possibilité de faire pivoter de 90° le moteur. Ce sont des 80×40 que je couche sur leur tranche. Comme Meyer sait travailler sa phase et L-Acoustics aussi, les deux enceintes se marient parfaitement.

Les douze SB28 montés en quatre stacks de trois caissons chacun et assemblés en antenne cardioïde (voir les simulations) Solidaires d’un pont de 500 et placés à la verticale du public, ils bénéficient à 1.4 tonne, de toutes les attentions du rigging.

Les douze SB28 montés en quatre stacks de trois caissons chacun et assemblés en antenne cardioïde (voir les simulations) Solidaires d’un pont de 500 et placés à la verticale du public, ils bénéficient à 1.4 tonne, de toutes les attentions du rigging.

SLU : Parle-nous de ton montage de subs en antenne centrale. Ça vient d’où ?

Bellote : C’est un rêve. Déjà n’avoir qu’un point d’émission pour l’infra c’est l’idéal et ce n’est pourtant pas fréquent de pouvoir le faire. Ensuite j’étais confronté à la difficulté de devoir gérer un orchestre avec soixante micros sur scène et l’envie de ne pas faire un son de Mickey (rires). Ce n’est pas parce que c’est du classique que j’abandonne un vrai bas et un niveau correct. J’ai donc décidé de nettoyer au maximum l’arrière de la scène. Un mode cardioïde c’est pas mal, mais à 30 Hz c’est « mes genoux » (« ça ne marche pas » en Delenclos NDC). donc j’ai préféré créer une antenne composée de quatre fois trois subs pour que la directivité soit maintenue jusqu’à 30 Hz. Le choix de stacks de 3 unités chacun est dicté par la volonté de ne pas être pour le coup trop directif en allant taper en fond de salle. Chaque ensemble est séparé de l’autre d’un mètre vingt pour ne pas dépasser la demi-longueur d’onde. Avec ces douze subs je ne couvre qu’entre 30 et 60 Hz. Les V-Dosc descendent en Full jusqu’à 60 Hz et je leur ajoute une dernière octave. Mon antenne est ce soir un peu trop en avant mais je n’ai pas pu faire autrement. Comme la boule que je génère démarre à moitié du montage, j’aurais pu le mettre à l’aplomb de Julien, cela aurait mieux couvert les premiers rangs. L’autre avantage de cette configuration est que j’ai moins de réflexions en fond de salle, le grave est mieux réparti, plus homogène.

SLU : As-tu retardé tes subs pour les faire piquer vers le bas plus encore ?

Bellote : Non, pas besoin. Je ne monte qu’à 60 Hz, et comme je n’ai mis que trois caissons en vertical ça ne pose pas de problème. En revanche, quand tu commences à en mettre 8 ou 10 il faut les retarder. A Bercy (pour Mylène Farmer NDC) j’avais mis 16 subs, et ça devient tellement directif qu’il faut absolument retarder. Avec mes douze SB28 j’obtiens un headroom intéressant, juste ce qu’il faut même pour un artiste « tranquille » comme Julien. Je préfère aussi avoir mes subs en hauteur pour éviter de décoiffer un public moins amateur de sensations fortes. Quand tu viens écouter un chanteur, t’as payé 60 € et te retrouves devant, tu peux être mécontent, sans oublier que ça reste très désagréable d’être face à une telle purée, même pour du rock. Vlad avait fait la même antenne pour Farmer je crois, mais au sol. La nouveauté est de l’avoir accroché. (pas tout à fait, Vladimir Coulibre avait fait des antennes de quatre groupes de quatre SB dont l’élément bas était à 180° NDC).

Pour les plus observateurs, l’écran affiche bien sur le second graphique en vert en partant du bas une phase. Aussi droite qu’un filtrage en filtrage FIR le permet. Ce n’est pas beau qu’à l’œil, l’oreille se délecte aussi.

Pour les plus observateurs, l’écran affiche bien sur le second graphique en vert en partant du bas une phase. Aussi droite qu’un filtrage en filtrage FIR le permet. Ce n’est pas beau qu’à l’œil, l’oreille se délecte aussi.

SLU : En termes de filtrage comment opères-tu entre les V et les SB ?

Bellote : Un LR24 à 60 Hz sur les Dosc. C’est inutile de les laisser descendre plus, ils deviendraient interférents et m’ôteraient l’avantage de n’avoir qu’un point central de sub. Je recommencerais à créer des lobes ce que j’arrive justement à éviter avec ce montage, et puis le V n’est pas conçu pour descendre aussi bas. Du K1 sans doute mais pas le Dosc.

SLU : Ca s’accroche facilement tes 12 subs ?

Bellote : Très, ils restent par trois dans le bahut. Avec les riggeurs on a monté un pont de 500 pré-réglé. On arrive avec nos 4 ensembles et hop, ça lève et c’est fini. Dans de rares salles où l’on ne peut pas trouver la place où on est bloqué par le poids de l’ensemble, 1400 kg, on fait un gauche droite. Pour les Dosc et Kara, je passe par une classique simulation avec Soundvision et ensuite on affine en salle. Là par exemple on va baisser le gain sur les trois boîtes en bas de ligne car l’aigu ”pique les yeux”. On ne peut pas envoyer le même niveau d’aigu dans une ligne qui couvre par ses boites du haut des spectateurs placés loin et perdus en hauteur où la chaleur et la distance le détériorent et dans celles du bas qui culminent à dix mètres des premières oreilles. On fait donc une mesure uniquement sur les trois boites du bas, et on les aligne sur la réponse globale mesurée depuis la régie. Je vais baisser aussi un peu le haut des Kara.

Avant le début du show, une vue de deux des trois écrans à disposition de Bellote et Wilfried Mautret. A gauche celui de la Studer Vista 5SR indiquant que c’est bien le snapshot d’ouverture qui est pré sélectionné et à droite celui du mac à tout faire cassé en 4 avec un peu de Flux, de Logic, d’iTunes et de Multirack Waves. Qui peut le plus peut le moins.

Avant le début du show, une vue de deux des trois écrans à disposition de Bellote et Wilfried Mautret. A gauche celui de la Studer Vista 5SR indiquant que c’est bien le snapshot d’ouverture qui est pré sélectionné et à droite celui du mac à tout faire cassé en 4 avec un peu de Flux, de Logic, d’iTunes et de Multirack Waves. Qui peut le plus peut le moins.

Conclusion

Le noir salle se fait et dès les premières notes jouées par l’orchestre, j’évacue bon nombre de mauvaises impressions glanées lors de la courte balance où l’artiste s’est préservé et la salle vide et ses sièges plastique ont snipé à vue. Le mix de Bellote accompagne parfaitement une orchestration très pop, un mix où les instruments classiques sont bien reproduits malgré la proximité de la captation; seule la voix me semble trop présente, un sentiment qui s’estompera très vite, Julien envoyant moins fort et Laurent ne compensant justement pas complètement à la console. Le rendu de la voix est très naturel, dynamique et l’intelligibilité est bonne. Le choix du micro convient à l’artiste. L’orchestre remplit bien l’espace même si sur certains titres peut être qu’un poil plus de 960 aurait encore mieux soudé les pupitres entre eux et apporté plus d’esprit symphonique. Comme je l’avais déjà ressenti lors du concert de Zazie à l’Olympia sonorisé par Yves Jaget avec Laurent au système, le V-Dosc filtré en FIR respire beaucoup mieux, a un aigu encore plus fin et précis et perd nettement de son défaut « natal » dans le bas-médium. Les coordonnées horizontales sont aussi modifiées et sans vouloir le comparer à des systèmes plus récents en termes de positionnement spatial du son, le V-Dosc fait encore sacrément l’affaire avec une couleur dans le haut à nul autre pareil et un rendu qui colle parfaitement au classique et aux voix. Quoi dire de l’antenne de subs sinon que ça marche et que ça plairait aux militaires ricains tant le rendu est chirurgical en termes de directivité. Nous nous sommes baladés avec Bellote sous la grappe de la mort et, les simulations en témoignent, cette fameuse dernière octave est contrôlée au mètre et demi près, ce qui laisse la scène assez propre et les coupe-bas plus tranquilles qu’à l’accoutumée. Une balade dans la salle témoigne de la justesse de ce choix avec juste un regret, le manque d’impact des neuf Kara dans le bas, une fois sorti des V-Dosc. Même si la boule générée par les douze SB28 remplit bien la salle, on perçoit un manque entre le grave assez inédit des deux 15” en FULL et celui plus maigrichon craché par les deux 8” des Kara. Le bas est à la fois rond et précis à l’orchestre et dans l’axe des V-Dosc et le reste même au fin fond du balcon, mais décroit au fur et à mesure qu’on quitte latéralement les V et qu’on s’éloigne de l’ensemble de subs qui, rappelons-le, ne montent qu’à 60 Hz.
Mais tout ceci n’est rien comparé au vrai problème de cette salle : ses grosses vilaines réflexions. Les spectateurs placés à l’orchestre entre la moitié de la salle et la scène, reçoivent d’épaisses réflexions venant fouetter leurs oreilles par l’arrière. Il en va de même au balcon où, sur les côtés et près de scène : le rapport entre direct et réfléchi vole bien bas à cause de retours arrière et latéraux très denses que des Kara calés à -9dB ne couvrent que faiblement. Saluons le choix de Bellote qui a évité la politique du tapis de bombes qui génère autant de problèmes qu’il n’en règle, et n’aurait pas collé avec la nature du spectacle et de son public. Le niveau est donc resté sage au bénéfice d’une dynamique laissant respirer le show, quitte à ce qu’à certains endroits, le rendu soit moins précis. Laurent a beau me dire que la salle de Chambéry, toute neuve et bien ronde, est plus réfléchissante encore que celle de Mériadeck, je me dis qu’il est temps que les seuls patins à glace résonnent dans cet endroit et que la musique soit accueillie enfin dans une salle digne de ce nom. Malheureusement l’ambitieux projet de Grand Arena prévu à Floirac a perdu son financement début 2012, et malgré le courage des élus locaux, il semble bien que la patinoire ait encore de beaux jours devant elle, semble-t-il au moins 3 ans car, par les temps qui courent, les poches des banquiers regorgent d’oursins.

Graphiques

Voici une représentation faite au SIM du comportement de l’antenne telle que déployée par Bellote à 32Hz. Le comportement est tel que décrit et surtout ressenti dans la salle avec une forte réjection arrière, même à une fréquence aussi basse.

A 50Hz un léger lobe arrière se forme, inévitable vu le choix de ne pas porter trop loin devant, un lobe en pratique très peu gênant puisque les subs couvrent une seule octave et sont coupés à partir de 60Hz.

A 85Hz la simulation montre un lobe arrière s’ouvrant en corolle mais une fois encore faible au regard de l’énergie projetée vers l’avant et de propreté plus importante obtenue à l’arrière.

Pour le plaisir, la même antenne à 125Hz, une fréquence très haute où généralement ne s’aventure pas le SB28.

 

Crédits -

Texte & photographies Ludo Monchat

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