Agora H1, la nouvelle plateforme hybride dédiée aux réseaux AoIP

Juste avant l’été, la société Agora audio, située près de Poitiers, fournisseur et fabricant de solutions audionumériques et de transport de données, lançait son tout nouveau produit, le H1. Ce produit est une plateforme hybride combinant un switch et un « bridge » AoiP (Audio sur IP) supportant la plupart des protocoles audio disponibles sur le marché.
La partie switch hérite de l’expérience acquise par Agora avec ses gammes de switches Ethernet Ghost et Fast, et reste de plus totalement compatible avec celles-ci.

Figure 1 Vue du H1 en montage rack. Une équerre permet de monter le H1 seul, et un kit permet d’assembler deux H1 ensemble (Source : Agora).

Son format demi 19 pouces offre une plus grande versatilité quant aux options de montage et d’installation, le produit pouvant se placer derrière une console, être fixé sur un mur, ou installé dans un pont (kits de montage en option). Le double montage en rack permet d’offrir rapidement des scénarios de type A/B (primaire / secondaire) ou d’extension.
Coté audio, le H1 offre une matrice audio 128×128, une interface Dante Brooklin II et un slot compatible avec les cartes AxC du constructeur Français Auvitran.

Grâce à cette combinaison originale de switch, de matrice audio, de carte Dante et à l’emploi des cartes AxC d’Auvitran, le H1 offre des solutions de transport, de matriçage et de conversion dans un appareil au format unique. L’usage de plusieurs protocoles sur le même réseau audio sur IP s’étant largement intensifié ces dernières années, ce produit trouvera naturellement sa place dans des installations nécessitant transport et conversion des flux audio.

Figure 2 En haut, le panneau arrière du H1, avec un connecteur optionnel Neutrik OpticalCon, le port de gestion du produit, une alimentation de secours en option, et le slot vierge pouvant accueillir les cartes AxC d’Auvitran.
En bas le panneau avant, avec les ports Ethercon surplombés d’un petit écran LCD comme sur la série Ghost, et un connecteur OpticalCon en option (Source : Agora).

Interview de David Rocher, CTO et cofondateur d’Agora Audio

Nous avons interviewé David Rocher, pour savoir quels étaient les éléments qui ont conduit à la genèse de ce produit.

SLU : Bonjour David, qu’est-ce qui a initié la création de ce produit ?

David Rocher : C’est le résultat d’une convergence de demande : le marché étant friand du format compact demi-rack, il y avait donc déjà une volonté de leur fournir cette solution. Nous sommes donc partis d’une déclinaison, avec un produit qui se distingue sur le marché. Chez Agora nous n’aimons pas trop faire les mêmes produits que les autres.
Ensuite, il y avait cette vieille idée de dire finalement, à un moment, la rationalisation du coût infrastructurel du réseau passe par la déclinaison des gammes de produit vers le haut ou vers le bas, mais elle passe aussi par la mutualisation des technologies.

Nous avons donc réfléchi à une technologie mutualisant l’équipement terminal, le switch, et le bridge audio. Tu sais un produit n’arrive jamais d’un coup, c’est une réflexion. Notre département commercial nous soutenait dans l’idée du demi-rack, avec cette idée assez rationnelle de dire que si l’on met tout dans le même produit, on gagne sur l’aspect compact du produit, et on gagne en efficience de coût.

Le troisième aspect, est que finalement, jusque-là, nous étions fabricant de switches et nous restons des gens d’audio. Encore une fois le but d’une gamme est de trouver son propre chemin, de définir sa propre équation de valeurs. Nous ne voulons pas fabriquer des technologies, nous voulons penser des produits.
La principale différence vient d’une réelle définition du besoin de l’utilisateur qui tous les jours branche un bridge audio dans un switch et les configure indépendamment. Toute solution qui mutualise les ressources matérielles et humaines est bonne à prendre
Si on ajoute nos affinités connues et reconnues avec Auvitran à Grenoble, car nous sommes assez fans de leur technologie, tout ça combiné, conduit logiquement à ce produit.

SLU : A qui s’adresse le H1 ?

David Rocher : Il y a toujours deux logiques lorsque l’on pose cette question, soit on parle de ses applications, soit on parle des segments de marché.

Côté applicatif on voit au moins dans le H1 trois grandes familles :

– Le bridge Dante vers quelque chose (AVB/Milan, MADI, AES/EBU, Ethersound & Cobranet s’il en reste), dans cette logique de passerelle.
– La carte préampli d’Auvitran, puisque le slot du H1 est compatible avec toute la gamme de cartes AxC et que ce préampli est contrôlable à distance par n’importe quelle console Yamaha CL, QL et transforme un H1 en RIO dans l’écosystème Yamaha. Le H1 est donc une stage box ultra-compacte, silencieuse et de très bonne qualité audio, mais pour être honnête ce n’est pas forcément quelque chose que nous avions imaginé au départ.
– Enfin la carte DSP Auvitran de 64×64 qui permet de mixer des flux, ce qui en fait une petite matrice très élégante.


Côté marché, la question est finalement à qui ça s’adresse ? La réponse est à tous les gens qui déploient déjà du réseau et qui constatent les besoins en solutions de transport comme en équipements terminaux et bridges. Tout cela mène vers un tout-en-un qui est bien reçu par le marché. L’autre clientèle est celle qui est en train de se convertir, ou qui est en train de penser à un déploiement réseau pour son infrastructure, par exemple coté touring, coté installation fixe, coté live ou broadcast.

Typiquement aujourd’hui le H1 en mode RIO séduit le broadcast, avec son format stage box ultra-compact, sans ventilateurs, donc silencieux, que tu peux placer sous la table d’un plateau télé, et qui te fournit 16 entrées micro. Honnêtement, nous n’avions pas prévu de répondre à ce genre de demande, c’est super !
Le mode MADI / DANTE qui permet de transporter les données de contrôle des stage box vers les consoles pour DigiCo et Soundcraft séduit aussi beaucoup d’utilisateurs et représente une alternative économique à d’autres solutions lorsqu’il d’agit d’agréger sur une boucle plusieurs stage box et plusieurs consoles.



En gros le broadcast a vraiment de l’appétence pour la stage box en mode RIO et pour le bridge Dante MADI, le live est aujourd’hui sur une coexistence de l’écosystème Dante avec l’écosystème AVB/MILAN et DANTE/MADI en bridge intelligent pour les utilisateurs de DigiCo et Soundcraft.
Le segment des installations fixes adore la modularité et la possibilité de traitement qu’apporte la carte ADSP. Mais ce produit est avant tout un couteau suisse, et nous pensons sincèrement qu’il étoffera notre clientèle dans le futur.

SLU : Recevez-vous des demandes du monde du broadcast pour une compatibilité avec AES67, vu que votre module Dante peut le fournir ?

David Rocher : Je t’avouerai que les demandes arrivent tout doucement, mais on nous parle vraiment du bridge Dante-MADI, c’est vraiment le truc hyper fort.
Car finalement les régies broadcast s’intéressent vraiment à l’AES67 pour sa portabilité sur Internet, ou ce genre de truc à terme, alors que finalement sur un LAN entre ton plateau, ta console et ton mix antenne, le protocole Dante est finalement très satisfaisant.
Je ne sais pas si aujourd’hui nous pouvons encore imaginer tous les marchés que peut couvrir ce produit. Avec H1, nous sommes très heureux car nous avons franchi un pas.

SLU : Puisque tu es derrière le développement, quel est à tes yeux le principal atout technologique de ce produit ?

David Rocher : Chez Agora, nous n’avons jamais rien inventé : si on réfléchit à l’histoire du Ghost, nous avons décliné le switch dans un workflow très simplifié pour l’utilisateur, avec une connectique robuste et une grosse intégration de tous les connecteurs et les alimentations dans un châssis 1U.
Sur Fast, nous sommes venus avec un concept de deux-en un, le twin-Lan dans la même machine mais fondamentalement, il suffisait de lire les spécifications d’Audinate à la virgule pour avoir une idée du produit, il n’y a pas d’invention, nous en avons mis deux en un.

Encore une fois nous n’inventons rien avec le H1, nous avons juste mis trois technologies qui nous paraissent essentielles à un développement, dans le même produit. Il faut donc rester humble, ce qui ne veut pas dire qu’à terme nous ne voulons pas inventer des choses, nous avons plein d’idées pour l’avenir, mais aujourd’hui, on parle avant tout de technologies qui sont là pour rationaliser ce déploiement réseau auquel on s’est attaqué il y a 20 ans, et pour décliner des outils rationnels chez l’utilisateur.

SLU : D’un point de vue technique, comment s’effectue la communication entre les différents modules intégrés au H1 ?

David Rocher : Il y a clairement une matrice audio qui est basée sur FPGA, donc à très faible latence, reliée à deux bus TDM, un vers le slot externe, un vers le module Dante Brooklyn II, ce dernier étant relié au switch Ethernet interne.

Figure 3 L’architecture interne du H1 : A droite le port d’extension des cartes Auvitran AxC, au centre la matrice audio 128×128 sur FPGA, et à gauche le module Audinate Brooklyn II, lui-même relié au switch Ethernet. Les trois modules audio sont reliés par un bus TDM (Source : Agora).

La petite vidéo de présentation du H1 explique très bien l’architecture :


SLU : Est-ce une solution que vous avez développée vous-même ?

David Rocher : Nous l’avons co-développée avec Auvitran, le principe étant de dire qu’Auvitran avait cette brique de technologie, c’est en effet une carte spécifiquement développée pour le H1, mais nous assumons totalement de dire que si la technologie était déjà là, autant la développer avec eux.
Nous ne cachons absolument rien de ce co-développement, et c’est pour cela que nous sommes totalement compatibles avec la gamme de carte AxC d’Auvitran, nous ne changeons pas la marque des cartes, ça reste de l’Auvitran.

Les clients qui ont acheté des cartes Auvitran dans le passé en seront ravis, il n’y a pas de nouvelle marque ou de nouvelle version de logiciel qui bloquerait l’usage de leurs cartes, nous assumons totalement et c’est d’ailleurs inscrit sur le produit « powered by Auvitran ».
Nous avons pris la carte Dante, nous avons pris la matrice, nous avons créé un nouveau routing, autant se servir de technologies qui ont déjà fait leur preuve. Par contre, le switch, est le nôtre.

SLU : Peux-tu me donner un exemple d’application où je devrais insérer une autre carte AxC Dante dans le H1 ?

David Rocher : Alors bien sûr, les choses se modifient maintenant avec DDM (Dante Domain Manager), mais il y a plein de lieux d’exploitation ou nous avions mis en place des grilles d’intercommunication avec X cartes Dante reliées en TDM et qui permettent d’avoir Salle A, Salle B, Salle C… avec des écosystèmes Dante administrés de part et d’autre en local dans chaque salle, et qui pour autant permettent de s’échanger des flux entre les salles. Avec Dante dans Dante, tu sépares tes horloges, tu sépares tes administrations, tu as deux réseaux Dante séparés reliés par un bus TDM, c’est un réel avantage.

SLU : Je présume que le H1 est compatible avec la gamme Ghost ?

David Rocher : Tout à fait, c’est juste que nous inaugurons une nouveauté sur ce produit car le H1 arrive avec un contrôle à base de WebSocket.
Par exemple, notre application Ghost manager aurait pu configurer aussi la partie switch du H1, mais pour le cœur audio il faut passer le logiciel AVS Monitor d’Auvitran. Nous avons donc passé la configuration du switch H1 sur une base de WebSocket, ce qui signifie que le navigateur web d’AVS Monitor est à même de configurer le switch du H1.

Cela permet également d’accéder à la page de configuration du switch depuis un navigateur web classique (validé pour Windows), AVS monitor étant de toute façon une application Windows. La portabilité des interfaces étant une grosse demande du marché, c’est donc le début d’une réponse.

SLU : Pourquoi avoir choisi Auvitran comme partenaire ?

David Rocher : Au moins pour trois raisons : Nous adorons leur hardware et leur technologie. Ca sonne, ça parait bizarre de le dire, surtout pour des bridges, mais j‘assume. Il y a des différences entre les différents produits audionumériques, et je trouve que les bridges Auvitran se placent dans le haut du panier.
C’est robuste, c’est Français, nous nous connaissons bien ce qui facilite, au-delà de l’amitié, les cycles de R&D (Recherche et développement). Tout n’est jamais bordé au démarrage, quelques fois nous devons faire des retouches, et c’est plus facile quand on se connaît.

SLU : Et la mise sur le marché du produit s’en trouve accélérée ?

David Rocher : On parle d’un cycle de développement de deux ans ! Le plus gros du travail a été de gérer l’alimentation et la température à l’intérieur du Boîtier, la mécanique pour tout loger dans un format demi-rack, et le soft. Et il ne faut surtout pas oublier que la technologie Auvitran a maintenant 10 ans, nous n’avons absolument pas rencontré de problème avec les firmwares Auvitran, qui sont d’une stabilité redoutable, donc tu pars d’une brique qui est déjà extrêmement solide.

SLU : D’un autre point de vue technologique, je vois que le produit peut être équipé d’une alimentation de secours, mais de par son format demi-rack, le H1 est également prévu pour les scénarios A/B (Primaire / Secondaire) ? Tu peux donc cumuler le scénario A/B avec alimentation redondée ?

David Rocher : Oui c’est ceinture, bretelle et casque lourd (rires) ! Tu as raison, il y a ça dans toutes les bouches : et la redondance, et la redondance… Là c’est vrai qu’avec le format demi-rack, une Brooklyn II par switch et une double alim, s’il t’arrive quelque chose, c’est que tu n’as vraiment pas de chance ! Mais c’est vrai que c’est une demande du live aujourd’hui d’ultra sécuriser les infrastructures.
Il y a bien sur des solutions alternatives sur le marché, avec de très bons produits, mais ce n’est pas notre propos. Avec le H1, nous trouvons un chemin qui est le nôtre, où nous apportons une solution qui concerne plus l’audio, mais j’ai envie de dire c’est avant tout notre cœur de métier, on pense audio dans cette boîte !

D’autres informations sur le site Agora

 

Crédits -

Texte : Fabrice Gosnet

Laisser un commentaire