Deux matinées avec l’Uniline Compact d’APG

Petit, léger, modulaire et donc malin, l’Uniline Compact d’APG nous a été présenté en long, en large et sur pied lors de deux longues sessions par Maxence Castelain et Grégory Dapsanse dans l’Espace des Arts aux Pavillons-sous-Bois.

l’Espace des Arts aux Pavillons-sous-Bois et plus particulièrement son plateau où par un accord gagnant-gagnant, APG a déployé à demeure une installation servant la salle comme les démos du fabricant.

L’Espace des Arts est une salle de petite jauge qui comme beaucoup d’autres espaces polyvalents pouvant accepter des pièces de théâtre, des projections de cinéma à l’aide d’une toile sur enrouleur, des concerts, des matchs de boxe via un ring rétractable et très «vivant » sous vos pieds, offre une acoustique relativement absorbante dans le haut et un peu curieuse dans le bas qu’il faut savoir domestiquer, puis accepter.

Une vue de la salle avec ses gradins et…sa toile accompagnée par le son cinoche.

Tout ceci pour dire que nous avons écouté un système dans un espace représentatif des salles dans lesquelles il pourra être déployé et pas en plein air. Quoi qu’il en soit encore merci aux équipes de l’Espace des Arts de nous avoir acceptés deux mâtinées complètes. Et fatalement sonores.

La UC206N

Pour celles et ceux ne connaissant pas l’Uniline Compact, il s’agit d’un système trois voies dont deux actives basé sur deux têtes appelées UC206 N pour Narrow à 70° et UC206W pour Wide.
Petit et ne pesant que 19 kg, avec ses deux 6,5” B&C et son ensemble Isotop coaxial composé d’un 5” PHL cachant en son cœur un moteur B&C à gorge de 0,5” il se destine à des jauges intermédiaires.

Une vue en coupe des deux variantes Narrow et Wide autour du même Isotop15, l’unité coaxiale avec son ogive de compression et de mise en forme d’un front d’ondes isophase. Le volume de charge des deux graves change légèrement en faveur du Narrow ce qui n’est pas inintéressant.

Mais il est malin puisqu’il dispose de deux compagnons de jeu, un renfort de grave en 15” aimant lui aussi l’alpinisme et prévu pour être accroché avec ou à ses côtés appelé UC115B et enfin un vrai sub tiré de la gamme Uniline en 18” et appelé UL118B.

Le système à jardin, trois renforts de grave UC115B et six têtes UC206N

Cet ensemble offre un kit qui une fois apprivoisé, lui donne toute sa polyvalence et en augmente fortement son pouvoir de séduction en termes de jauge.
Nous avons pu écouter des UC206 posées sur le nez de scène en tant que point sources, des lignes de six UC206N seules, ces mêmes lignes des 6 mais complétées par 3 UC115B par côté et enfin l’ensemble têtes plus renforts auxquels ont été ajoutés 4 UL118B posés au sol, appelé le mode complet.

Nous avons volontairement aussi joué les têtes et les subs UL118B sans renforts de basses et enfin profité de la liberté offerte par APG pour écouter tout ou partie de ce déploiement à différentes fréquences de coupure, 65, 80 et 110 Hz, une liberté offerte aussi à ses utilisateurs. Le bonheur.

Avant de nous lancer à l’assaut du système tympan au clair, quelques questions pour bien comprendre le positionnement du produit.

SLU : Quelle est la cible visée par l’UC ?

Grégory Dapsanse : D’avoir un seul système pour satisfaire à toutes les applications intérieur ou plein air entre 100 et 3000 personnes. Il y a tout de même une condition qui permette d’atteindre ce but, c’est que l’association d’enceintes conduise à bénéficier d’au moins 5 sections acoustiques reproduisant les bandes de fréquence clé, typiquement infra, grave, bas médium, médium et aigu. L’Uniline Compact en prend en charge 3 et les deux caissons les deux autres.

La très belle directivité verticale non retouchée de l’Isotop15, d’où les artefacts à partir de 15 kHz dûs à la méthode de mesure et pas au procédé lui même.

SLU : Ca paraît peu un seul moteur d’un pouce à gorge 0,5” dans le montage Isotop même s’il ne démarre qu’à 5 kHz…

Grégory Dapsanse : Justement, comme il ne démarre que très haut en fréquence, les besoins en énergie sont beaucoup plus faibles et son rendu bien meilleur.
L’essentiel du travail est exécuté par le 5” qui couvre trois octaves entre 500 et 5 kHz et qui est bien plus efficace qu’un gros dôme dans le bas.
La combinaison avec l’ogive qui le charge et qui permet un couplage non seulement non interférentiel dans l’aigu, mais vectoriel avec +6 dB à chaque doublement du nombre d’enceintes dans la ligne, garantit un gain important.

La très belle directivité verticale non retouchée de l’Isotop15, d’où les artefacts à partir de 15 kHz dûs à la méthode de mesure et pas au procédé lui même.

L’Isotop apporte une très bonne directivité jusqu’à 19 kHz avec un resserrement régulier qui génère un très bon couplage en amplitude et en phase.

Pour résumer, la puissance pour la puissance ne sert pas à grand chose quand elle est gâchée, ce qui n’est pas le cas avec l’Isotop. Un petit moteur dans l’aigu peut ne pas être un handicap si on sait bien l’exploiter.


Nos trois hôtes pour cette démo. De gauche à droite Maxence Castelain, ingénieur support et commercial, Grégory Dapsanse, directeur marketing et développement et enfin Antoine Fourny, stagiaire mesures physiques.

Maxence Castelain : Si on doit vraiment trouver un maillon faible dans la chaîne c’est plutôt le haut-parleur de médium puisqu’il prend toute la bande. Ajouter un second moteur ne serait pas d’une grande utilité.

Grégory Dapsanse : La radiation directe employée dans nombre de line array ne permet pas de lutter efficacement contre les phénomènes atmosphériques au-delà de 80 mètres, dès que tu pavillonnes, la distance critique augmente sensiblement.

SLU : Et les 6,5” sont de vrais graves…

Grégory Dapsanse : 100%. Comme on coupe à partir de 450 Hz, on a demandé à B&C des HP qui bougent et pas des large bande qu’on tirerait un peu artificiellement vers le bas.

Des mots à la démo

Une tête

Cette mise en bouche théorique avalée, on ouvre sur une paire de UC206W en mode infill pour écouter et juger de la capacité de ces têtes à remplacer des point sources dans des petites configurations vocales et c’est Suzanne Vega et l’acapella du légendaire Tom’s diner qui retentit dans la salle avec tout le mordant, la gorge, la clarté et le piqué de cette prise de voix.

La réponse en fréquence mesurée à l’Espace des Arts d’une UC206W et de ses trois presets. Le bas est coupé à 80 Hz. En bleu et flat, le mode array, en vert et avec le haut bien atténué le Fill de proximité et enfin en orange le downfill.

Une des utilisations possibles de l’UC206W perchée au-dessus d’un UC115B

La phase est impeccable, merci le montage coaxial, et on sent nettement la membrane et sa relative douceur et sincérité dans le rendu. La salle en revanche pique un peu dans le bas mid avec un TR court mais dense. Un second extrait, une voix parlée complète l’impression favorable, la partie grave de la voix étant très bien rendue.

Avec un peu de recul et en visant bien (15° verticaux, c’est peu) une paire de UC206W peut très bien sonoriser le discours d’un maire ou toute autre prise de parole avec l’avantage de la portée et surtout de l’intelligibilité dans un lieu de grande taille et réverbérant. En fond de notre salle d’écoute à plus de 30 mètres, on est encore très bien servi.
Quelques notes du joli piano voix Folder d’Archive, font apprécier la musicalité, la personnalité du médium et la belle polaire de l’UC206W. Les 110° sont largement atteints (-6 dB à 105°) avec une sortie très progressive tout en gardant un timbre assez homogène. Le pavillon à directivité constante est une réussite.

Six têtes

On attaque à présent l’écoute des lignes de six UC206N en accroche et pleine bande, les 6,5” étant sollicités jusqu’à 65 Hz. L’équilibre est très satisfaisant avec un niveau de grave appréciable même si le contour s’avère modeste. Ce qui en revanche surprend c’est l’envie d’aller loin du bloc Isotop.
Autant les Wide sont taillées pour la proximité et arrosent avec une certaine « bonhomie » au niveau du médium et du haut médium, autant avec les Narrow on sent que APG joue la carte de la portée avec une projection très intéressante que nous avons déjà pu apprécier aussi en plein air.

6 UC206N en preset array et mesurées à 20 mètres. Elles sont en Full Range.

La salle est parfaitement couverte sans le moindre accident et avec une puissance apparente remarquable ramenée à la taille de la boîte. En salle et pour des musiques et des niveaux normaux, même 6 boîtes font déjà bien l’affaire. On ressent malgré tout le besoin de remplir une octave très importante, la 30-60 Hz, aussi pour rééquilibrer la puissance de la partie médium aigu des UC206N.

Six têtes et trois renforts de grave

L’UC115B aussi à l’aise au sol qu’en accroche grâce à son poids raisonnable de 33 kg.

Le renfort en question est l’UC115B, compact lui aussi et taillé sur mesure pour les Uniline Compact dont il reprend les cotes. Bâti sur une charge passe-bande à double chambre symétrique, il accueille un 15” Eighteen Sound à aimant néodyme et bobine de 4” placé à 45°.

Comme nous le rappelle Maxence Castelain, ce type de montage apporte un gain de l’ordre de 3 dB et réduit la taille du caisson.
Autre avantage, l’effet de compression est raisonnable et comme le volume avant est très ouvert, on dispose d’une bonne attaque dans le haut et d’un gain interessant dans le bas du grave. Ce renfort a été conçu pour travailler efficacement aussi comme sub puisqu’il est tiré à 45 Hz pleine bande.

Une vue de la double chambre du 15”

A l’écoute, ce mode « Extended 1 » dans la littérature APG, donne au système une assise et surtout un net gain en SPL. Les têtes sont raccordées avec les UC115B à 110 Hz en 24 dB/octave.
Leur nombre est important, trois par côté pour 6 têtes, un ratio qui compose soit un gros système full range auquel il manquerait des subs pour gonfler le contour et taquiner l’infra, soit un système complet où une octave 30/60 Hz à haut SPL n’est pas requise. Une configuration standard et très bien placée question prix.

Voici résumé par la mesure et en violet ce qu’offre le couple UC206 et UC115B avec le raccordement placé à 110Hz. Le bas du spectre est largement suffisant pour nombre d’applications avec un point bas de 34 Hz à -6 dB

Chris Jones, sans doute l’artiste le plus utilisé en démo fait vibrer ses cordes et son shaker. Convaincant. Le grave a de la matière bien articulée et l’aigu cette finesse et cette honnêteté que les gros moteurs ont encore du mal à avoir même si avec le temps ils sont parvenus à couvrir 4 octaves… Rien de niveau en revanche sous le soleil, deux sources de grave bien espacées font de belles marguerites.

Six têtes et quatre subs

Avant dernière configuration, nous écoutons les 6 têtes par côté avec 4 vrais subs alignés au pied de la scène, conçus au départ pour l’Uniline, le gros. Il s’agit des UL118B, des boîtes à bave exploitant la même charge passe-bande déjà vue sur le 115 mais cette fois sur un transducteur de 18” accordé et monté de telle sorte à fournir beaucoup d’énergie, essentiellement dans l’infra.

Les quatre UL118B, alignés à plat au pied de la scène et juste mis en phase avec le système.

Pour ce premier essai, le raccordement est placé à 80 Hz. Aucun doute, c’est chatoyant. Entre effet de sol et évidente facilité à délivrer des quantités importantes de bas, le rendu prend des allures très « chaîne hi-fi » avec, c’était prévisible, une répartition plus régulière du bas dans la salle mais aussi un certain manque de dynamique et de définition du grave. Sur un titre comme Your heart is as black as night de Melody Gardot au balai, ça passe crème, mais un vrai gros basse/batt manque un peu d’impact.

Sur le papier, cette association est la plus évidente et celle qui évite le plus de compliquer la phase. Le UL118B est aussi coupé à 80Hz. Il donne son pic d’énergie sur l’octave 30-60 et est encore bien vaillant à 25 Hz.

Ca ne tape pas assez et des membranes de 6,5” et petit nombre et des gros 18” en passe-bande, laissent un trou, certes invisible à la mesure, mais un peu pénalisant en termes de couleur et d’attaque dans nombre de musiques et sans doute pas évident à rattraper à la console.

Six têtes, trois renforts de grave et quatre subs

Nous passons enfin à la configuration fromage ET dessert où l’infra des 18” complète le grave organique des 15” et les têtes rentrent relax dans cette armada de « grandes ondes ». La projection et l’attaque de ces dernières coupées à 110 Hz est limite trop vivace mais pour le reste, on a un équilibre spectral irréprochable.

Une vue de la salle et notamment des rangs de sièges coulissants. On devine au sol les UL118B.

Bien sûr autant de sources de grave se font un peu de concurrence et se bouffent le nez mais cela est valable pour toutes les marques et peut s’optimiser avec le placement, le filtrage et le calage. On ressent malgré tout une forme de plénitude et qualitativement, le tout a de la gueule et sert de façon convaincante quelques sources à très haute dynamique en notre possession.

La courbe verte est la résultante de ce mode dit « complet » avec une coupe à 110 et une seconde à 60 Hz. Forcément le contour grimpe et atteint un confortable 12 dB.

Quelques doutes se font malgré tout sentir dans le choix de 6 boîtes narrow pour une salle aussi petite dont les quatre du haut faiblement incurvées (ouverture verticale de l’UC206N de 15°) offrent beaucoup de SPL au lointain dans le médium et haut médium. Tout cela est l’inconvénient de l’avantage, celui d’avoir une configuration accrochée très polyvalente et idéale pour les démos. Tous les modes ne peuvent être optimisés ne serait-ce que mécaniquement dans une salle loin d’être évidente.

La décroissance entre 2 et 24 mètres au sein de l’Espace des Arts.

Conclusion

Une fois n’est pas coutume, on va faire bref. Derrière son look un peu vieillot l’Uniline Compact cache une conception, des choix acoustiques et des transducteurs de qualité. Mettre trois voies dans une si petite enceinte est une réussite qui amène son lot d’avantages pour bien peu d’inconvénients.
Son rendu associe la patate, la fidélité, la portée et la générosité avec une couleur tonale inédite liée à son médium sur membrane et son faible taux de compression.

12 voies d’amplification italo-britanniques même si les deux marques spécialistes de l’OEM, arborent les couleurs et les références d’APG.

La liberté offerte par APG dans l’association et dans la mise en œuvre des 4 éléments, ses briques système, peut se révéler décisive pour vraiment habiller de son une salle, mais peut aussi être ardue sans conseils. Ca tombe bien, la marque en dispense, et des bons.
Ajoutons la possibilité de choisir sa plateforme d’amplification entre Linea Research et Powersoft, voire ce que vous avez au dépôt en insérant un DSP APG en rack, et vous avez là une solution, française de qualité et très bien placée. Un système à désirer plus qu’à installer par habitude.

Pour plus d’infos sur le site APG

Crédits - Texte Ludovic Monchat - Photos Ludovic Monchat et APG

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