Gims, le plus français des shows à l’américaine avec Julien Mairesse

Gims en plein show. On distingue derrière Manu Dyens à la batterie et surtout le couple casquette et lunettes géantes.

Gims en plein show. On distingue derrière Manu Dyens à la batterie et surtout le couple casquette et lunettes géantes.

Il est sans doute l’artiste le plus joué en radio, le plus apprécié par la nouvelle génération et aussi celui qui a le mieux tiré son épingle du jeu. Devenu incontournable, Gims a tourné, beaucoup, très bien entouré et clôturera le Warano Tour en Avril 2017. Peut-être… Nous avons été le voir le 18 mars et le 30 novembre à l’AccorHotels Arena grâce à Julien Mairesse qui nous y a accueillis avec sa légendaire sérénité. Récit d’une double grosse claque.

De dos et un casque à la main, Julien en mode dir art devant son micro qu’à l’aide d’une pédale il route ou pas dans les ears.

De dos et un casque à la main, Julien en mode dir art devant son micro qu’à l’aide d’une pédale il route ou pas dans les ears.

Si le 18 mars est une date « normale », celle du 30 novembre a donné lieu à une captation de France 2 avec tout ce que cela implique de machineries diverses et variées pour garder du mouvement et du volume au show total de Gims une fois rentré dans le petit écran.
Qui dit captation dit aussi longues répétitions, guests en pagaille et temps au compte-gouttes pour parler aux techniciens, accaparés comme jamais (à défaut d’être sapés NDR).
Nous les avons donc laissé travailler et avons savouré les répétitions et le show du 30 novembre telles des petites souris indiscrètes, et utilisé les interviews du 18 mars pour boucler ce reportage.

Laissons la parole à Julien Mairesse car, pour les rares qui ne le connaissent pas, sous le capot de l’homme imperturbable, se cache un sacré moteur. Pour cette tournée, il s’occupe par exemple de la scénographie, la mise en scène, la direction artistique, la vidéo, le topage et la réalisation des images, autant dire que son talky refroidit rarement.
Pourtant même au pas de course, le ton reste tranquille et le sourire de rigueur. On peut se faire entendre dans le calme… Il nous accorde quelques minutes. « On part très peu. On fait des blocs de trois semaines, on est off pendant des mois et on repart. Entre temps on fait des festivals et quelques dates à l’étranger : Italie, Allemagne, Espagne, Suède, Canada ».

Julien, la force tranquille

SLU : Tout le monde s’y retrouve dans cette organisation ?

Julien Mairesse : C’est assez perturbant. Lorsqu’on tourne, on joue tout le temps, le dimanche, le lundi, c’est complet tous les jours. Parfois on a un jour off mais c’est un mercredi. On est un peu décalé.

SLU : Sur cette tournée, tu es omniprésent. Cela doit avoir des avantages..

Julien Mairesse : Oui clairement, tu peux adapter l’artistique aux moyens dont on dispose et cela permet de caler le show en étant sûr que la logistique suivra. On a 6 semi-remorques, 3 tour bus, on fait des journées bien remplies de 6h15 à 1h30, mais dans le calme, on ne pousse pas, on est tous heureux !

Gims avec Julien Mairesse

SLU : Ici on est au format Arena, c’est le kit standard de tournée ?

Julien Mairesse : Sur la tournée France / Belgique / Suisse nous nous déplaçons avec l’intégralité du kit technique (son, light, vidéo, catering…) Nous sommes totalement autonomes. En tournée Europe, toutes les dates accessibles par voie terrestre, on prend le kit festival (régies son & light, vidéo, backline, les lunettes et les FX). Pour les dates en avion on ne prend que les éléments vitaux (ears et backline spécifique) Ici la diffusion est louée, on a ajouté un cube vidéo au milieu de la fosse, les écrans de reprise caméra et enfin un renfort d’effets spéciaux avec confettis et CO2. Le cube vidéo est à LED monte à 6 mètres de haut et déroule 4 écrans. Cela n’a l’air de rien, mais il y en a très peu dans le monde. Celui-ci vient de la tournée de Jay-Z. Il est arrivé des USA ce matin, et repart demain ! (Magnifique trouvaille qui propulse Gims dans les étoiles et dont Julien a balisé la zone de sécurité pour l’artiste soigneusement au gaf blanc NDR)

SLU : Parle-nous un peu de ton travail artistique avec Gims

Julien Mairesse : On a la chance d’avoir un artiste qui est très en appui sur l’équipe, et c’est très agréable. Il nous fait une confiance absolue. Et c’est réciproque, on sait qu’il n’a pas besoin de beaucoup répéter. (Lors de la date avec captation il s’est tout de même filé tous les guests et une bonne partie de son show NDR). Lorsque je lui ai présenté le design, ça lui a immédiatement plu et il est arrivé en répétition les yeux fermés. Il prend ses repères une fois, écoute les remarques et il restitue… C’est une vraie machine de guerre !

Gims avec Julien Mairesse

SLU : Les périodes de creux sur cette tournée te laissent un peu de temps pour t’occuper d’autres artistes j’imagine. Quels sont tes autres projets ?

Julien Mairesse : J’en ai beaucoup (rire ! ) je m’occupe L.E.J, le trio de fille qui cartonne en ce moment. J’ai travaillé sur l’exposition de Luc Jacquet à Lyon, de Christophe Willem, Mickael Grégorio, Kool Shen, Soprano…

Julien s’occupe de beaucoup d’autres artistes et a un CV à faire peur. Jetez un coup d’œil à ce lien et vous comprendrez.
Nous le laissons retrouver son flight case lui servant de podium à cour juste devant la régie retours que nous irons visiter dans quelques minutes. Il y cadence à vue les répétitions comme le show d’une voix tranquille qui arrive dans les ears des artistes et des techniciens.
Nous allons en fond de parterre retrouver l’équipe façade composée de Typat, (Patrick Passerel sur sa CNI) au système, Nicolas Meynard en assistant et Lionel Capouillez au mix, aussi belge que talentueux et souriant. Clairement la bonne humeur règne sur cette tournée ! La répétition a commencé, c’est Nicolas qui est aux manettes. Le son de la façade est comme il se doit, rond, flatteur, pas numérique pour deux ronds…


Leur pays est plat, pas leur son

Lionel Capouillez, un gabarit et un son qui ne passent pas inaperçus et encore, il n’a pas de chapeau ! Derrière on devine la silhouette de Typat les yeux rivés sur le Sim.

Lionel Capouillez, un gabarit et un son qui ne passent pas inaperçus et encore, il n’a pas de chapeau ! Derrière on devine la silhouette de Typat les yeux rivés sur le Sim.

SLU : Salut Lionel, comment tu t’es retrouvé sur cette tournée ?

Lionel Capouillez : Je suis plutôt un ingé de studio à l’origine, j’ai mixé les deux albums de Stromae, c’est comme ça qu’on m’a contacté pour faire le live.

SLU : C’est un travail assez différent. Tu es à l’aise dans les deux ?

Lionel Capouillez : C’est vrai c’est assez différent mais finalement très complémentaire. Regarde des gens comme Charlie VDE font les deux et s’en sortent très bien !

Un rack quasiment dédié à Gims avec, de haut en bas, les TA-1VP Tascam embarquant le célèbre Auto-Tune d’Antarès, deux exemplaires car la musique de Gims sans auto-tune ce serait un peu comme les Stones sans guitare. Un TC D-Two puis une autre pièce maitresse, l’XL42 Midas, double étage d’entrée recevant le micro principal et le spare et bien entendu, deux Distressor pour les mêmes raisons. Ce que l’on appelle une chaîne voix bétonnée. Tout en bas le Vt et le Klark. Qui a dit que l’analogique ne plaît plus aux jeunes ?

Un rack quasiment dédié à Gims avec, de haut en bas, les TA-1VP Tascam embarquant le célèbre Auto-Tune d’Antarès, deux exemplaires car la musique de Gims sans auto-tune ce serait un peu comme les Stones sans guitare. Un TC D-Two puis une autre pièce maitresse, l’XL42 Midas, double étage d’entrée recevant le micro principal et le spare et bien entendu, deux Distressor pour les mêmes raisons. Ce que l’on appelle une chaîne voix bétonnée. Tout en bas le Vt et le Klark. Qui a dit que l’analogique ne plaît plus aux jeunes ?

SLU : Tu nous fais le tour du propriétaire en commençant par la chaîne de Gims ?

Lionel Capouillez : La voix lead passe d’abord dans le Midas XL42, la dynamique est travaillée dans un Distressor, puis vient l’auto-tune Tascam TA-1VP. Juste avant, je splitte et je fais un A/B sur la console, ça me permet de passer de la voix auto-tunée à la voix normale très facilement, et on le fait beaucoup sur ce show.

SLU : Et sur les généraux ?

Lionel Capouillez : Avant d’envoyer dans le Lake de sortie, qui en fonction du lieu alimente les amplis en RJ ou en fibre, je passe par un DN360 Klark Teknik et par un Avalon VT737sp.

SLU : Ce n’est pas un peu risqué de passer toute la façade dans un compresseur à tubes ?

Lionel Capouillez : Non, il a un circuit de bypass en fail-over. Il n’y a pas beaucoup de risques. Je compresse très, très peu, et puis tout ce qui rentre dedans ressort plus beau. C’est vraiment mieux !

Johan Milet, aussi barbu et belge que Lionel nous a rejoints à la façade. L’occasion de taper l’incruste dans sa régie retours.

Johan Milet : Avec plaisir, je suis juste là de passage pour admirer la vue, alors c’est à ça que ça ressemble vu d’ici ?

Décidément l’ambiance est pourrie sur cette tournée ;0) Je finis mon tour des périphériques avec Lionel.

SLU : En réverbération tu utilises quoi ? Je vois une remote TC sur le côté.

Lionel Capouillez : Oui on a un TC M6000, mais je m’en sers finalement plus sur les instruments, avec ses 4 moteurs c’est assez pratique, j’en ai pour les toms, les snare, mais pour les voix je trouve ça assez compliqué de trouver le bon preset. J’ai découvert une machine que je ne connaissais pas, la Bricasti M7. Et ça c’est magique, tu testes un preset sur une voix et tu es bluffé !

SLU : Pour les EQ tu te sers de ceux de ta table ou bien es-tu un adepte des plugs externes ?

Lionel Capouillez : Non j’utilise ceux de la console. iIs sont pratiques et ergonomiques, rapides d’accès et efficaces. En live il faut que ça aille vite, et les menus et sous menus qui défilent à ne plus en finir peuvent te faire perdre du temps.

L’antre du Milet surpris en plein travail sur sa SD7

L’antre du Milet surpris en plein travail sur sa SD7

Un barbu c’est un barbu, deux barbus ce sont les sondiers de Gims. On laisse Lionel finir les répétitions avec Nicolas et on prend la direction de la régie retours où l’on retrouve Johan Milet.

SLU : Explique-nous comment tu travailles !

Johan Milet : Je mixe sur une SD7 DiGiCo avec un Wavegrid qui gère les effets Waves dont les réverbérations. Je n’ai aucune autre machine de traitement et du coup ça me fait un système très compact. Pour la voix de Gims, j’ai le même setup qu’en façade avec le A/B avec ou sans auto-tune. Ensuite les traitements sont assez différents de la façade. Il m’arrive d’ajouter de la brillance, la compression de la voix est différente, je joue sur l’intelligibilité. Ensuite, chaque musicien a un départ d’effet. Comme ça je peux séparer les réverb, et ça me permet d’avoir un plug par envoi. Les plugins virtuels ont un réel intérêt dans ce genre de setup. Mais il faut programmer des snapshots pour s’y retrouver. Pour finir, j’utilise les compresseurs multi-bandes de la console pour les entrées musiciens et les sorties.

La régie retours avec les émetteurs et récepteurs Shure et tout en bas devant Yohan, la même chaîne voix pour le patron. XL42 Midas, Distressor et TA-1VP Tascam.

La régie retours avec les émetteurs et récepteurs Shure et tout en bas devant Johan, la même chaîne voix pour le patron. XL42 Midas, Distressor et TA-1VP Tascam.

SLU : Tu gères combien d’entrées ?

Johan Milet : J’ai 70 entrées en tout, beaucoup plus qu’en face (rires)! Je m’occupe également des talk-back. J’ai 5 musiciens, 1 backer, l’artiste, Julien, l’assistant, le backliner, les guests,  4 de plus aujourd’hui, mais ça tient, cette console a beaucoup de ressources et de sorties !

Tout à gauche, le stage de la régie façade sous le patch et tout à droite, celui de la DiGiCo des retours. Tout autour et comme il se doit en noir, les liaisons Shure pour les micros et les ears.

Tout à gauche, le stage de la régie façade sous le patch et tout à droite, celui de la DiGiCo des retours. Tout autour et comme il se doit en noir, les liaisons Shure pour les micros et les ears.

SLU : Que des ears ?

Johan Milet : Absolument, on n’a aucune membrane sur scène à part un wedge ponctuel qui va servir ce soir pour un DJ en première partie.

SLU : Question micros et émetteurs vous êtes en Shure…

Johan Milet : Oui, avec des liaisons UR4D+ et je me fie à l’interface du système pour choisir les fréquences et éviter les plages à risque. Je n’ai pas de distributeur, les antennes sont placées sur la régie elle-même.

Capouillons encore

De retour à la régie façade, on profite d’un rare moment de tranquillité pour reprendre le fil de la discussion avec Lionel. Il est assis sur un fly et semble très occupé sur son mac.

Lionel Capouillez : Je retravaille le mix d’un titre de John Mamann. Ça sort lundi en radio et ils ont besoin d’avoir un peu plus de caisse claire. Il faut parer à toute éventualité dans ce métier !

Bertin Meynard à la console et à droite sur son mac, Lionel Capouillez, un géant qu’on ne présente plus !

Nicolas Meynard à la console et à droite sur son mac, Lionel Capouillez. Il ne commande pas une pizza, il remixe juste un titre ;0)

 

SLU : Tu es en train de modifier un mix directement sur le Protools de ton Mac ?

Lionel Capouillez : En studio j’ai un Protools avec une interface Fireface 800 + 2 ADAT, et comme c’est impossible de se déplacer avec les DSP, c’est ce que j’ai trouvé de plus simple. Lorsque j’ai fini mon mix, je fais un bounce de chacune des pistes pré-traitées dans un projet Protools. Si jamais il faut refaire un ajustement de dernière minute, tout en ayant le son de la maison et les effets propres au titre, je peux modifier l’équilibre et bouncer le résultat final.

SLU : En studio tu as l’habitude d’utiliser quoi comme périphériques ?

Lionel Capouillez : J’ai surtout mes trois compresseurs fétiches : SSL 4400 en lunchbox , Distressor, et bien sûr Urei 1178. Avec ces trois-là, tu refais le monde (rires)!

SLU : Et comment tu choisis ton matériel ? Uniquement à l’oreille ?

Lionel Capouillez : Pas seulement. Avec le temps, il y a une histoire de feeling. Tiens, il y a peu, un fournisseur en Belgique me parle d’un EQ au format lunchbox, le ZÄHL EQ1. Il me le décrit comme un SSL avec de la chaleur. Je l’ai regardé et je l’ai pris. Je le sentais. Je ne l’ai même pas écouté. Et arrivé à la maison, j’ai entendu exactement ce que j’attendais! Depuis je l’utilise sur chaque prise.

Show devant, mais pas que, partout !

Le noir salle ne tarde pas à couper court à nos discussions technico-artistiques et la première partie démarre avec Nicolas à la console. Les jeunes artistes du label de Gims bénéficient de quelques lumières et d’un son « tranquille », rien à voir avec l’avalanche de faisceaux, d’effets, de machineries et de dB bien gaulés qui vont accompagner le Boss.

Gims jouant avec son public dans une veste que les éclairagistes adorent !

Gims jouant avec son public dans une veste que les éclairagistes adorent !

Le rendu est chaud, efficace, sans que la pression ne fasse regretter sa venue au public qui a pris possession de la salle. Parfois des familles entières dont les plus petits regardent émerveillés l’homme habillé d’or avec ses grosses lunettes qu’ils écoutent à longueur de journée. Malgré quelques arrangements originaux, on n’est pas loin des versions studio, le boulet en plus. C’est un véritable show à l’américaine dont la date captée par France 2 bénéficie en plus de canons CO2, de canons à paillettes et tutti quanti.
Les lumières ouvrent complètement l’espace scénique et font de la salle, une annexe du plateau. Chapeau Chappet ! Même bravo aux médias, machineries et autres éléments de la scénographie. C’est chargé mais cela reste efficace et dans le trend artistique. Il n’y a pas plus de fausses notes sur scène où quasiment tout est auto-tuné que dans la mise en scène du show. Une balade dans la salle démontre enfin la qualité du design et du calage du système Adamson. Typat veille au grain !

Du bois made in Canada !

Du bois made in Canada !

Pas de surenchère de matos. Le gauche droite est composé de 12 x E15 prolongées de 4 x S10. Les latéraux comportent 12 x S10. 5 x S10 en douche ferment le trou au centre du parterre et 8 x E219 placés derrière les lignes principales projettent bien le grave et l’infra dans la salle.
Les passages où Gims sort de scène sont gérés de main de maitre par Lionel, bref, tout cela sent la sérénité et le professionnalisme, le sourire en plus. Il n’y a qu’à regarder les gens quitter la salle des étoiles dans les yeux pour comprendre que c’est gagné. Bravo à tous.

Prestataires :

Crédits - Texte : Sébastien Jallot & Ludovic Monchat - Photos : Sébastien Jallot

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