Avec 600 casques d'écoute

The Encounter, le chef d’œuvre en binaural de Gareth Fry et Pete Malkin

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A gauche Garteh Fry, a droite Pete Malkin

A gauche Garteh Fry, a droite Pete Malkin

Londres 11h du matin. Je m’apprête à découvrir The Encounter et ses coulisses, une œuvre singulière au sein d’un des théâtres emblématiques de la capitale anglaise, le Barbican. La presse est unanime, c’est aussi déroutant qu’envoutant, et rien que les 600 casques d’écoute qui servent de diffusion en sont la preuve.

Nous avons rendez-vous avec Gareth Fry et Pete Malkin, les deux sound designers de cette œuvre, ainsi que l’A.S.D., l’Association of Sound Designers. Cette communauté anglaise regroupe des professionnels du son et de la création sonore, notamment autour du monde effervescent du théâtre anglais.

Portée par une éthique admirable, cette association promeut le partage du savoir de ses adhérents et leur entraide mutuelle, que cela soit en terme de matériel, de conseil, de formation ou bien les trois !
Très active, elle nous offre un peu d’humanité bienveillante sur la planète spectacle, peuplée de beaucoup de freelances qui, à force d’avoir la tête dans le guidon, n’échangent pas grand-chose et ne se regroupent que trop rarement.

Les membres de l’A.S.D. qui ont eu la chance d’assister à cette journée de présentation : une belle brochette de passionnés.

Les membres de l’A.S.D. qui ont eu la chance d’assister à cette journée de présentation : une belle brochette de passionnés.

La raison de notre petit rendez-vous matinal est un tour dans les coulisses du dernier OVNI théâtral de la compagnie Complicite, mis en scène et interprété par le talentueux Simon McBurney : « The Encounter ».
La pièce est tirée du roman de Petru Popescu et nous conte l’histoire du photographe Loren McIntyre, reporter pour le National Geographic, et de sa rencontre avec la tribu Mayoruna, perdue en forêt Amazonienne.
Un one man show sonore, du stand up binaural, une plongée auditive en Amazonie, on ne sait pas trop comment le qualifier… Un OVNI donc, mais surtout l’aboutissement de 5 ans de travail pour le sound designer Gareth Fry assisté de Pete Malkin. Nous aurons le plaisir de partager avec vous une interview de Gareth en bas de page, le meilleur donc pour la fin ☺

Je vous laisse chausser des écouteurs et déguster ce trailer :

« The Encounter » sera donné à Montpellier pour le Printemps des Comédiens du 16 au 18 juin, et ensuite à Lyon pour les nuits de Fourvière du 23 au 25 juin.

The Encounter Dates FR

Une réussite théâtrale et originale

On se sent plus dans un studio que dans un théâtre

On se sent plus dans un studio que dans un théâtre

Cette pièce est aussi le fruit d’une performance technique, tant dans sa conception que dans « l’interprétation » fournie par les deux opérateurs qui mixent les sons du show.
Une prouesse technique. La preuve en est qu’il y a plus d’opérateurs son sur cette production que de comédiens !
Pour vous délecter de cette production, il vous faudra donc chausser l’un des presque 600 casques audio installés dans les gradins du théâtre Barbican. Ainsi, peu de choses à montrer mais énormément à écouter !
De fait, le plateau est dépouillé. On aperçoit au milieu de la scène le fameux micro binaural de Neumann, le KU 100. Le mur du lointain, une imposante surface d’absorption acoustique de plus de 100 m², confère un côté rassurant (déformation pro) et nous annonce clairement la couleur…

La technologie binaurale

Mais avant d’aller plus loin, voici un court rappel de la technologie binaurale. Sautez ce paragraphe si vous n’en avez pas besoin, sinon jetez vous dessus car il a l’avantage d’être très court !

La technologie binaurale

La technologie binaurale

La prise de son binaurale est une prise stéréo, mais réalisée avec un dispositif qui simule une tête humaine. Le résultat s’écoute obligatoirement avec un casque stéréo et fournit ce que nous avons de plus crédible en termes de restitution d’environnement sonore, autant du point de vue de la localisation des sources, comme de celui de leur spatialisation.
C’est aussi ce que vous pouvez entendre appelé vulgairement « le son 3D ». Si vous n’avez jamais écouté de son binaural, voici ci-après le lien pour un exemple très connu : Celui du coiffeur !

Le schéma ci-contre explique rapidement le principe : Imaginons une source sonore située sur la droite qui arrive jusqu’aux oreilles de l’auditeur.
Le trajet de l’onde pour atteindre l’oreille gauche est ici appelé A et celui pour atteindre l’oreille droite sera appelé B.
Voilà les trois principes physiques grâce auxquels votre cerveau interprétera très fidèlement le son provenant de la droite :

  1. La différence de niveau : L’onde sonore s’atténue avec la distance parcourue. Très schématiquement, plus on est loin, moins on entend ! La distance A étant plus longue que la B. Le son perçu par l’oreille gauche sera légèrement moins fort.
  2. La différence de temps : en parcourant une distance plus longue, le son du trajet A arrivera après le son du trajet B. Cet infime décalage temporel suffit à votre cerveau pour interpréter et localiser le son à droite.
  3. La différence de timbre : c’est le gros avantage de la prise de son binaurale sur les autres techniques de prise en stéréo. Le son arrivant à l’oreille gauche n’est pas le même que celui qui arrive à l’oreille droite tout simplement parce que son trajet A passe par la tête de l’auditeur (en rouge sur le schéma). De fait, la boîte crânienne provoque un effet de masquage qui altère ce son. Ainsi en le comparant avec celui non altéré qui emprunte le trajet B, votre cerveau saura que ce dernier provient de la droite.
L’homme selon Neumann, ou le micro de captation binaurale KU-100.

L’homme selon Neumann, ou le micro de captation binaurale KU-100.

Autre avantage et non des moindres, le son binaural vous permet aussi d’interpréter les sons provenant de derrière… oui, seulement avec un casque stéréo ☺
Tous ces principes physiques, vous pouvez les reproduire avec le couple stéréo binaural de Neumann, le KU 100.
Vous l’aurez compris, le mannequin ou tout du moins sa tête est fait de matériaux qui reproduisent l’effet de masquage acoustique d’une tête humaine.
Tiens on vous donne un truc : flanquez-vous deux capsules DPA 4061 dans les oreilles et vous aurez un début de prise de son binaurale 😉
J’engage les plus curieux d’entre vous à aller écouter des fictions sonores, des documentaires audio, des concerts, le tout en binaural grâce à notre bon vieux service publique sur le site : Nouvoson Radio france

Immersion dans la jungle

Les casques Sennheiser HP 02-140 qu’on peut trouver sur chacun des sièges du Barbican.

Les casques Sennheiser HP 02-140 qu’on peut trouver sur chacun des sièges du Barbican.

On s’installe donc confortablement dans les fauteuils du mythique théâtre Barbican, juste en dessous de la régie. Gareth Fry se présente, introduit son installation et nous invite à chausser les casques audio situés sur nos sièges.
Pete Malkin est descendu sur le plateau où trône le micro KU 100. Il se place à quelques mètres dans le champ arrière gauche du micro et nous interpelle…
A ce moment, bien que nous voyions tous Pete nous parler à une vingtaine de mètres devant nous, malgré que nous soyons a peu près tous des techniciens aguerris genre « on ne nous la fait pas » l’effet de spatialisation est tellement crédible que nous nous sommes presque tous retournés vers la gauche, soit vers le mur. Un tel effet vous piège le cerveau et… la vue avec.
Pete continue ainsi à évoluer autour du mannequin pour nous démontrer la fiabilité de la spatialisation.
Quand on n’a jamais eu à faire à une tête artificielle et qu’on est passionné de son, c’est incroyable. Cela en devient presque gênant quand on commence à nous chuchoter dans le creux de l’oreille.

Pete commence à bruiter à la bouche quelques insectes et autres sons de jungle, à plusieurs endroits du plateau, en faisant des boucles à chaque nouveau son. Tiens, un système de loop au plateau !
On apprend que Pete contrôle grâce à un pédalier MIDI une session du logiciel Ableton Live situé en régie. En 10 secondes, on est immergé dans la jungle. L’audience restreinte et constituée de professionnels applaudit.

Le metteur en scène et comédien Simon McBurney saisi dans le travail.

Le metteur en scène et comédien Simon McBurney saisi dans le travail.

Suite à cet impressionnant début de présentation, on se demande maintenant à quoi servent sur scène les deux micros HF main Sennheiser G3, équipés de capsules cardioïdes 835. Démonstration faite, ils servent dans la pièce à la voix off !
On nous explique que dans un paysage audio très ouvert tel que l’est le son binaural, une piste mono se place d’elle-même dans le mix « au-dessus de notre tête ».
Parfait donc pour une voix off qui résonne dans nos pensées. On se servira ici des deux micros pour les différentes voix de chaque personnage.

Comment donc faire plusieurs voix avec un seul comédien ? Bien évidemment avec un bon comédien, mais aussi avec des effets de pitch de qualité grâce à deux bons processeurs d’effets Lexicon : le PCM 81 et sa nouvelle génération le MX 400 XL.

Visite en régie

La manière dont sont gérés ces effets de pitch mérite qu’on s’y attarde un peu. Pour cela on file en haut des gradins, faire un tour dans la régie d’Helen Skiera, opératrice sur le show.

Trouvez l’intrus…

Trouvez l’intrus…

Vertu d’un show bien optimisé, tout rentre sur une petite console Yamaha QL1 en DANTE. On peut voir Ableton Live tourner sur l’écran et c’est notamment grâce à lui qu’on pourra enregistrer et déclencher à la volée tout un tas de boucles audio. Le comédien, Simon McBurney, en déclenchera certaines depuis des pédaliers MIDI au plateau, et Helen déclenchera les autres depuis le contrôleur Novation Launchpad.

A pieds feutrés ☺

A pieds feutrés ☺

Concernant le plateau, le pédalier n’est pas un Keith mcMillen SoftStep pour rien. En effet c’est l’un des rares pédaliers silencieux, condition sine qua non quand on créé des boucles avec des micros sensibles. Personne ne veut percevoir un clic venant trahir la fin de chaque loop.
Vous aurez aussi reconnu le contrôleur à faders motorisés Behringer BCF 2000, qui sert aussi à piloter Ableton LIVE. Rien de nouveau donc pour les connaisseurs, mais tout même de quoi s’enfermer quelques heures à l’ombre d’un studio.
Ah si … Il y a quand même un truc bizarre entre les deux consoles… J’ai beau chercher dans ma mémoire, mais à part un nouveau pad pour jouer à Street Fighter je ne vois pas. Réponse de Gareth : « Oh yes. That is BOB ». C’est une interface MIDI faite maison, qui est reliée au logiciel QLAB.

On vous présente donc BOB, du fait maison !

On vous présente donc BOB, du fait maison !

« BOB » permet de changer le pitch sur les micros HF Sennheiser. Techniquement, c’est en fait QLAB qui pilote en MIDI la QL1.
Via une programmation intelligente du logiciel au travers d’une liste d’ordres MIDI, le soft agit comme des mémoires de scène pour rétablir sur la console QL1 les réglages propres à la voix de chaque personnage.
Pourquoi donc ne pas utiliser des mémoires de scène classiques qu’ont intégrerait dans une conduite ?
Tout simplement car il n’y a presque pas de conduite dans ce spectacle. En effet les phases d’improvisation sont trop nombreuses pour que l’opérateur ne connaisse pas sa configuration sur le bout des doigts et ainsi réagir rapidement pour suivre le comédien en temps réel. Passionnant n’est ce pas ? ☺

Helen Skiera

Helen Skiera

Performance théâtrale qu’on vous disait, mais aussi performance technique derrière la console ! Aux commandes de cette régie nous découvrons Helen !

SLU : Salut Helen, est-ce que tu peux rapidement te présenter ?

Helen Skiera : Je suis sound designer et compositeur. Je suis aussi musicienne et très intéressée par ce qui est créatif en son et dans le domaine de la musique.

SLU : On croirait voir une pianiste quand on te regarde travailler… Mais Helen… où est ta partition ?

Helen Skiera : On a essayé de travailler avec des conduites, mais ce spectacle étant très improvisé par nature, on a préféré garder la structure générale dans nos têtes et se tenir prêt à réagir en live à chaque nouvelle performance.

SLU : Mais c’est un micro serre-tête Countryman E6 que je vois sur ta joue ?

Helen Skiera : Oui, nous portons des micros pendant le show et pendant les répétitions. On s’en sert pour communiquer entre nous. Vu que tout le monde porte un casque, il est compliqué de communiquer en l’enlevant et en le remettant constamment. Ella, l’autre opératrice, et moi pouvons donc nous parler, parler à Simon ou à n’importe qui d’autre qui porte un casque. On a une série de boutons qui sont reliés à QLAB au travers duquel on pilote en MIDI la QL1 pour ouvrir nos micros aux bonnes personnes.

Un indice du temps passé derrière la console

Un indice du temps passé derrière la console

De gauche à droite : Guy Coletta, Simon McBurney et Helen Skiera. Excellente ambiance de travail !

De gauche à droite : Guy Coletta, Simon McBurney et Helen Skiera. Excellente ambiance de travail !

SLU : Quelle est pour toi la partie la plus difficile de ce boulot ?

Helen Skiera : C’est avant tout fatigant et demande une concentration totale. Mais la manière avec laquelle on se doit d’être absolument présent tout le temps, fait qu’on devient une partie intégrante du show bien plus qu’en étant opérateur traditionnel. Même si cela est difficile, c’est aussi ce qui fait tout l’intérêt de ce boulot.

La deuxième opératrice du show : Ella Wahlstrom

La deuxième opératrice du show : Ella Wahlstrom

Merci Helen pour ces précisions. Effectivement il y a deux opératrices en régie sur cette production.
Comme mentionné plus haut, Helen s’occupe de toute la partie « live » en gérant les micros et les loops.
Mais la régie de The Encounter comporte aussi de nombreux bruitages qui sont envoyés à l’aide d’un autre ordinateur, encore une fois via une session du soft QLAB.
C’est le job de Ella Wahlstrom. Elle déclenche et mixe en direct plusieurs couches de sons. D’ailleurs, pour compléter cette expérience au casque, Ella a droit à des subs cachés sous les gradins, Quatre en tout !

Et on vous présente Ella dans une petite interview vidéo

Lors de la présentation, elle nous a gentiment diffusé le son binaural d’un Cessna, un petit avion monomoteur, passant au-dessus de nos têtes. Les subs sont bien là, on en a les guiboles qui tremblent, l’effet est très réussi, et on ne peut s’empêcher de penser à une petite scène mythique de la Mort aux Trousses… Sacré Alfred.

En parlant de diffusion de média, un point très, très intéressant, est que vous pouvez difficilement mixer avec du binaural… autre chose que du binaural. En effet, tous les sons stéréo classiques que vous voudrez utiliser, ressortiront aplatis en comparaison de la profondeur de champ du binaural.

The Encounter

Comment donc rajouter des bruitages à notre affaire ? Il y a bien des logiciels équipés de moteurs audio, pour la plupart provenant de l’industrie du jeu vidéo, qui proposent des rendus binauraux très crédibles, on pense notamment à Unity et Fmod.
Mais il y a bien plus simple, bien plus naturel et bien plus rigolo. En effet, la solution consiste à mettre une enceinte à chaque coin du plateau et d’y diffuser des sons via un mix quadriphonique. La tête Neumann KU 100 placée au centre récupère ainsi les sont spatialisés « naturellement ».
Pour ce faire, Gareth Fry a choisi des enceintes passives JBL EON 1500 réputées pour leur portabilité et leur puissance. Je vous laisse la surprise d’aller voir la pièce pour comprendre.

Pour bien saisir l’astuce, jetez un coup d’œil à l’implantation ci-dessous.

L’implantation réalisée par Gareth Fry. Vous pouvez voir les 4 enceintes aux quatre coins du plateau.

L’implantation réalisée par Gareth Fry. Vous pouvez voir les 4 enceintes aux quatre coins du plateau.

Tant qu’on y est, poussons le bouchon un peu plus loin. Pour nous faire voyager et pour placer ses sons exactement où il le désire, Simon Mac Burney utilise aussi de petites enceintes sans fil de bonne qualité, fraîchement produites à Bristol : les Minirig.

Simon en train de brandir une enceinte portable Minirig.

Simon en train de brandir une enceinte portable Minirig.

Ainsi le comédien peut « manipuler » un son dans le paysage sonore… Simple mais terriblement efficace !
Pour un son de meilleure qualité et une liaison plus stable, on ne les utilise pas en Bluetooth mais via leur entrée auxiliaire, cette dernière étant nourrie par un récepteur pour ear monitors Sennheiser G2.
Vous l’aurez compris, les concepteurs de cette pièce ont fait preuve de beaucoup de créativité pour donner au comédien de puissants outils, dédiés à façonner son édifice dramaturgique.

600 casques audio en salle.

The Encounter

Moins fun que le binaural mais non moins intéressant, concevoir cette installation a été un long processus, d’autant plus que le tout est amené à prendre la route pour suivre la tournée qui s’annonce déjà riche en dates.
Après moult recherches et essais, les équipes de Gareth Fry ont choisi de tout câbler en analogique, et vu le nombre de casques à alimenter, ça fait quelques kilomètres de cuivre !
En sortie de console on attaque des splitter 16X maison, à la sortie desquels le signal rentre dans de bons amplis casque 6 canaux, les ART Headamp 6. Le signal stéréo, prêt pour alimenter un casque audio, peut ensuite s’engouffrer dans un multipaire qui descend dans les gradins.
Arrivé à destination, il est encore splitté six fois pour alimenter six sièges soit 6 casques. Enfin seulement, le mix de « The Encounter » peut s’écouter confortablement dans l’un des très bons casques Sennheiser HP 02 – 140.
Oui, ça splitte dans tous les sens, et au final, chaque circuit de l’ampli casque alimente 3 unités ! Les impédances chutent, mais le ART HeadAmp 6 tient bon, on ne l’entend pas et le résultat est très correct. Bravo donc !

L’ampli 6 canaux ART Headamp 6

L’ampli 6 canaux ART Headamp 6

Un bon vieux contrôleur

Un bon vieux contrôleur

Tout ce réseau analogique est mis en œuvre et surveillé de près par le technicien Guy Coletta. Le plus étonnant dans tout ça, c’est le protocole de test. Le « line check » avant l’ouverture des portes.
Guy Coletta a fait le choix d’un contrôleur, pour vérifier le bon niveau électrique dans chaque câble si cela est nécessaire.
Mais il faut aussi vérifier individuellement chaque casque. L’opération prend plus d’une heure et est réalisée par 3 autres personnes.
On entend ainsi dans tout le Barbican un son très intelligible et provenant d’un peu partout à la fois, c’est la somme de ces centaines de paires de mini haut-parleurs qui diffusent en boucle le même son dédié au line check, une voix répétant inlassablement : « left ear, right ear… left ear, right ear … etc ». Le résultat est très étonnant ☺

Enfin, c’est avec beaucoup de plaisir que nous vous proposons une brève interview du responsable de tout ce chantier, le talentueux Gareth Fry. En préambule, le voici accompagné de Pete Malkin, nous parlant un peu de certains aspects de leur travail sur « The Encounter ».

Interview de Gareth Fry

Gareth Fry

Gareth Fry

SLU : Bonjour Gareth. Nous sommes très fiers de t’avoir avec nous dans les pages de SLU ! Peux-tu rapidement te présenter

Gareth Fry : “Bien sûr, je suis sound designer freelance, principalement dans le théâtre. J’ai commencé à travailler en Angleterre mais maintenant j’interviens régulièrement en Allemagne et aux Etats-Unis. J’ai commencé en tant qu’ingénieur du son en studio, et je me suis ensuite dirigé vers le théâtre et l’évènementiel car je préfère le live.

SLU : Qu’est ce qui t’as amené à créer une pièce de théâtre en binaural et depuis combien de temps travailles-tu sur ce projet ?

Gareth Fry : Cela fait maintenant 5 ans. On ne voulait pas particulièrement monter une pièce de théâtre en binaural. Avant toute chose, on voulait raconter l’histoire du roman « Amazon beaming » écrit par Petru Popescu. C’est l’histoire d’un photographe qui, après s’être perdu dans la forêt amazonienne, rencontre une tribu d’indigènes. Pour ce faire, nous avons essayé des formes de théâtre conventionnelles mais cela ne marchait pas. On a donc commencé a chercher des formes alternatives et ceci nous a amené au casque stéréo, puis au son binaural.

The Encounter

SLU : Hormis le fait d’avoir affronté une armée de moustiques pendant tes travaux en Amérique du Sud, quels problèmes as-tu rencontrés pour aboutir à ce projet ?

Gareth Fry : La première partie du challenge était d’enregistrer la plupart des bruitages en binaural, ce qui impliquait d’aller en Amérique du Sud, de trouver un avion Cessna et d’arranger une rencontre avec une armée de moustiques.
La deuxième partie a consisté à imaginer et réaliser un système pour distribuer du son à 600 personnes et ceci dans un procédé qui peut partir en tournée à travers le monde, dans un vaste éventail d’auditoriums.

The Encounter

SLU : Quel conseil peux-tu donner à quelqu’un qui voudrait se lancer dans un projet binaural ?

Gareth Fry : Evitez d’utiliser des casques sans fil. Les chutes de niveau, la mauvaise séparation entre les deux canaux et le bruit de fond élevé, font que vous n’aurez pas un résultat satisfaisant.

SLU : Tu es l’un des dirigeants de l’A.S.D. : l’Association of Sound Designer. Peux-tu présenter cette structure aux producteurs et ingénieurs du son français qui ne la connaitraient pas encore ?

Gareth Fry : Nous avons imaginé l’A.S.D. comme un réseau d’entre-aide pour les producteurs et ingénieurs du son. En effet dans notre métier, on est souvent amené à travailler seul ou en petite équipe, ce qui n’est pas très favorable aux échanges et à l’entraide. Notre but a été de créer une association qui puisse fournir de la formation, un support technique, organise des évènements et apporte un soutien juridique. Bref de l’aide et du soutien pour les problèmes que nous sommes amenés à rencontrer.

SLU : Ton prochain job ?

Gareth Fry : Harry Potter and the Cursed Child.

Merci Gareth pour ton temps précieux, tes très bons conseils, et cette générosité dont beaucoup devraient s’inspirer.

J’espère que cette virée londonienne vous a plu et vous a donné l’envie de voir cette pièce, profitant du fait que la tournée française démarre cet été !
Et rappelez vous, la technique est au service de l’art car certains maitrisent l’art de la technique. On se revoit bientôt pour un reportage au chaud… en Provence ! Peace. Maamo.

 

Crédits -

Maamo

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