Kraftwerk à la Philharmonie. Ceci n’est pas un reportage

La Philharmonie, l’oeuvre de Jean Nouvel. Belle dehors, acoustiquement somptueuse dedans.

Juste un hommage analogique et numérique, intemporel et wobulé, pour fêter Kraftwerk et leur remarquable show dans un drôle de Thermos en plein été qu’on appelle la Philharmonie. Peu ou pas de technique, mais 50 ans de plaisir et de musique. Non stop.

40 KSL & 8 KSL-SUB, un kit généreux et qui a donné pleine satisfaction. En revanche les D80 sont partis au McDo après le concert, ils n’ont pas eu grand chose à manger.

Si, tout de même, quelques mots sur une diffusion allemande maitrisée de bout en bout par d&b avec un déployement massif et immersif en Soundscape de KSL et SL-SUB, avec une corolle de T entourant le parterre peut être un peu trop haute et définitivement trop légère face à la redoutable modernité et efficacité du K.

Un petit bout d’une régie décidément très numérique, ici le mélangeur Waves. Comme ceci n’est pas un reportage, je ne ferai qu’un commentaire. Il est beau hein ?

On dit ça et en même temps comment faire dans une salle à la fois haute et ramassée dont on va reparler un peu plus loin.

Autre surprise, un mélangeur Waves LV1 sous la forme de 4 écrans et tout de même deux bancs de faders physiques, parce que le virtuel, ça va un peu ;0)

Kraftwerk, déjà 50 ans

Machine, machine, machine, machine, machine, machine, machine, machine, machiiiiine………

Kraftwerk, déjà 50 ans à faire comprendre qu’un oscillateur sentant bon le transistor chaud, placé en grand nombre et en de bonnes mains, peut apporter du plaisir, de l’art et autant d’émotion que 6 cordes tendues sur un manche. Ralph Hütter et ses trois acolytes fluoréscents nous ont offert un voyage techno pop aussi statique sur scène que réussi.

Tour de France et une pensée à Maxime Schmitt, un producteur français qui a « travaillé » Kraftwerk chez EMI et a avalé des kilomètres en deux roues avec eux.

Le secret ? Des titres en tube massif soutenus par une belle conversion immersive et illustrés par une 3D basée sur l’iconographie du groupe parfois facile mais d’une qualité et d’une résolution qui ont fait lever les mains de certains dans l’espoir de capturer une note faisant du radada au-dessus de nos têtes.

Allez, pour Tour de France nous avons eu quelques images d’archives. Il faut dire que la petite reine et Kraftwerk, c’est une vieille histoire d’amour.

Et ça marche

Le V, une très belle boite équilibrée et musicale, utilisée ici pour construire et descendre l’image sur scène et combler les premiers rangs.

La matrice DS100 donne un aperçu de ses possibilités. Le son est massif, précis et quand il bouge, il le fait sans le moindre artefact. Le design et le calage soignés tirent parfaitement vers le bas l’image sonore du système principal malgré l’angle entre ce dernier et le public. Une armada de V posée sur le nez de scène l’y aide.

Comme souvent, le groupe aurait pu aller plus loin et donner aux morceaux matière à créer, intéragir avec les images 3D et étonner encore plus. Certains titres explosent de beauté et remplissent l’espace, arrière compris, d’autres moins et le contraste fait comprendre à quel point le son peut continuer sa marche en avant, et en arrière, et sur les cotés…

@Ralph PH

Il est vrai qu’on n’en est qu’à la préhistoire du spectacle multicanal et immersif, et plus que la technique pure, la production de ces shows doit encore prendre la mesure des possibilités immenses qu’offrent les matrices qui fleurissent aux catalogues des différentes marques de diffusion, surtout en support des groupes où tout est à inventer sur scène pour créer l’événement, construire l’inoubliable.
Un bémol tout de même. Si le parterre est superbement bien servi, les balcons latéraux et arrière qui sont la raison d’être de la Philharmonie, le sont beaucoup moins. Les T étant tournés vers le parterre, il manque au public assis, une partie importante du show. On pense par exemple au titre Autobahn qui exploite à plein la corolle.

Un des côtés en T. Discret, presque invisible mais manquant de ressort face à un golgot comme le KSL. Plus loin dans l’alphabet de Backnang il y a la lettre Y…

La corolle arrière.

La salle parisienne est conçue pour enrouler les spectateurs autour d’un l’orchestre symphonique et rend une couverture électro-acoustique frontale et à la fois « immersive » impossible dès qu’on quitte le parterre. Espérons que les prochaines salles sortant de terre tiendront compte des besoins de la multidiffusion en forme comme en pré équipement facilitant le déploiement matériel.

Autobahn, une 3D et un rendu sonore immersif splendide.

Un gros travail en revanche a été fait sur le son de différents morceaux de Kraftwerk afin de combler le côté un peu maigre de certaines sonorités anciennes et apporter de la matière au système, en gommant les années séparant les titres. Mission accomplie. L’analogique reprend des couleurs et la vraie spatialisation le sort de sa relative monotonie et monophonie.

Une vue indiscrète de la spatialisation des sources volée avant le concert.

Les membres du groupe ont la main sur des filtres et font varier le rendu de quelques sonorités. Ralph Hütter en fait de même et se paie le luxe de parler et chanter afin de déclencher le fameux Vocoder Sennheiser VSM 201, désormais sans doute en DSP puisque l’unité hardware originale a été vendue en 1999…

Un mot enfin sur la Philharmonie dont on est tombé amoureux du rendu. Le lieu est beau et envoutant à l’usage. Jean Nouvel et les acousticiens qui ont conçu la grande salle de concert Pierre Boulez de 2400 places, lui ont donné une très grande polyvalence et surtout un TR d’une couleur et tessiture parfaite allant du grave, dense mais chutant vite, à l’aigu qui, ici encore, ne s’aventure ni trop haut, ni trop longtemps.

Boing, Boom Tschak

Le tout enveloppe, habille magnifiquement le son avec une décroissance certainement idéale en classique mais convenant tout aussi bien à la musique amplifiée.
Si on accepte cette réverbération unique en la complétant par quelques temps plus courts et quelques délais, on peut y jouer tranquillement. Le grave ne tourne pas et garde définition et attaque. Superbe.

La set list défile devant nos yeux et dans nos oreilles, imparable, comme les applaudissements nourris qui l’accompagnent. Le charme opère car tout est spectaculairement beau. On en oublie très vite notre métier, le son, les lumières, la vidéo, la salle et on se laisse emporter par le talent de Kraftwerk. Le terme est pompeux mais quand on aime, on ne compte pas. Va pour le « Gesamtkunstwerk (Oeuvre d’art totale) ».

Flamanville attendra, Kraftwerk le dit et le répète…

Un dernier mot. Comme ceci n’est pas un reportage, ce que vous voyez ne sont pas des photos, rien de plus que des instants volés avec un iPhone. Si vous le pouvez, allez voir ce show. La musique doit tant à Kraftwerk…

 

Crédits -

Texte Ludovic Monchat -  Photos Ludovic Monchat & Ralph PH

Laisser un commentaire