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Avec Les Goldmen, Jean-Jacques peut dormir sur ses deux oreilles

Texte et Photos : Ludovic Monchat

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Philippe Tassart

Accueillis par Philippe Tassart de Ginger, le producteur d’innombrables artistes et événements, et grand spécialiste des meilleurs Tribute Bands, on tombe vite sous son charme et sa connaissance du milieu de la musique. Pourtant cela a commencé par un : « vous êtes qui et vous faites quoi ici ? » dit avec curiosité et un brin d’inquiétude.

Les douze K3 de cour, les six premiers en mode asymétrique 90° pour échapper le mur latéral de L’Espace Carat, un choix de Julien Desjardins en charge du système sur la tournée.

Une demi-heure de souvenirs et d’anecdotes croustillants plus tard, on est lâché l’esprit tranquille dans cette grande salle polyvalente qu’est l’Espace Carat l’Angoulême en train de se parer de ses plus beaux atours pour accueillir les Goldmen, LE Tribute Band de Jean-Jacques Goldman.

C’est du K3 qui se prépare pour la grimpette à jardin, 12 boîtes pas si fréquentes en France et que j’ai hâte de retrouver ne les ayant écoutées qu’une fois sous le soleil de Marcoussis.

Deux stacks de quatre KS28 en configuration cardioïde vont monter la garde et le niveau de contour et d’infra nécessaire au show. Les premiers sièges qui leur font face sont à 6 mètres.
Des Kiva II par trois et en infill à jar et cour vont compenser l’ouverture du système et donner du son aux tout premiers rangs. Deux dernières Kiva II débouchent pile le centre depuis le nez de scène. Le système est confié aux bons soins de Julien Desjardins qui complète le binôme à la face avec le mixeur Charles Lagueritte.

Les quatre KS28 en montage cardioïde à cour. On devine sur le nez de scène cachés en partie par le rideau, trois Kiva II.

Un sourire surmonté d’une paire d’yeux bleus de compétition s’approche, Charles est dans la place… C’est grâce à lui que nous sommes invités pour cette date des Goldmen afin de découvrir un groupe de copains talentueux, un chanteur bluffant et une console qu’on n’a pas trop l’habitude de voir sur des tournées de cette taille, une Avantis de Allen & Heath. Bien gavée en ressources DSP, elle est dans ses mains, la clé de voute sonore du show.

Charles Lagueritte, l’ex fan des sixties et des Rabeats…

SLU : l’Avantis c’est ton choix ?

Charles Lagueritte : C’est celle du groupe, ils l’ont achetée lorsqu’elle est sortie il y a cinq ans puisqu’avant d’être Goldmen, les membres du groupe ont beaucoup tourné en baloche et ont donc l’habitude de partir avec leur propre matériel. Bien sûr ce n’est plus le cas maintenant mais tu verras qu’ils sont extrêmement bien équipés en termes d’instruments dont certains sont importants pour approcher le son de JJ Goldman.

SLU : Tu as donc appris à t’en servir

Charles Lagueritte : Quand j’ai intégré le groupe oui, avec eux. On s’est enfermé trois jours et on a enregistré tout le répertoire soit 40 titres. Ensuite j’ai eu la console à la maison pendant un mois afin de coller au plus près aux albums ce qui est une nécessité quand tu mixes un tribute band.
J’avais les pistes des 40 titres, la console et Spotify pour décortiquer et approcher au mieux chaque chanson originale en studio ou en live en fonction de l’arrangement que le groupe a décidé de jouer. Je n’ai pas compté le nombre de A-B mais il y en a eu beaucoup ! Aujourd’hui encore je peaufine des détails qui m’avaient échappé, sans oublier que ce n’est pas facile de passer après Andy Scott.

SLU : Mais tu colles aux sons d’époque, ne serait-ce que le grain et la longueur des réverbérations ?

Charles Lagueritte : Bien sûr, la batterie dispose de réverbération assez « grossières » bien épaisses et gatées. On approche au plus près la couleur Goldman et lors d’une date à la Réunion, dans un théâtre en plein air, son directeur nous a accueillis avec la banane puisque Jean-Jacques avait pour habitude de répéter toutes ses tournées là-bas et il a eu la chance d’y assister.

SLU : Il a été convaincu par ce qu’il a entendu ?

Charles Lagueritte : Absolument et pourtant son théâtre est piégeur et mat de manière très surprenante.

Charles désormais très à l’aise sur la Avantis durant les balances.

SLU : La HF n’est pas fournie par le groupe…

Charles Lagueritte : Non, plus maintenant mais lorsque je suis arrivé c’était le cas. On a changé aussi à cause des plages de fréquences qui étaient mal placées pour passer dans certaines villes. On a en tout 16 liaisons entre micros et ears dont je m’occupe aussi.

L’émetteur Shure Axient Digital AD2 de Alain Stevez, la « voix » de Goldman avec la tête V7 SE au pas de la marque américaine.

SLU : On fait un tour au plateau ? Tu me montres ta captation ?

Charles Lagueritte : Volontiers d’autant que lors du confinement je suis tombé sur une marque chinoise sérieuse et abordable pour laquelle j’ai eu un coup de cœur, SE Electronics. J’ai rentré un V7, un micro chant dynamique, je l’ai écouté et adopté d’autant qu’il existe en filaire mais aussi en capsule vissable sur des manches Sennheiser et Shure.
Du coup j’en ai acheté sur un site allemand bien connu (rires) et tous les micros chant filaires ou HF de la tournée sont des SE. Ça sonne étonnement bien pour un supercardioïde et du coup la réjection est très bonne avec un niveau de sortie et une réponse en fréquence faits pour la scène.

SLU : Tu nous as dit que tu t’occupes des liaisons HF

Charles Lagueritte : Mais pas des retours. Il y a un truc. Les Goldmen possèdent deux consoles, l’Avantis qui est ras le museau à la face avec ses 64 entrées et 42 bus que je consomme entièrement et une SQ5 qui est sur scène et qui est en frontal avec le stage GX4816 qui sert d’horloge maître. C’est la SQ5 qui fournit à l’Avantis les signaux via le protocole SLink de Allen & Heath.

Un rack clé avec la SQ5 posée dessus. On y trouve les deux récepteurs AD4Q, les tiroirs des micros et packs HF et tout en bas les récepteurs ears Shure P10R+ et P10R en charge. A gauche dans un second rack on distingue les émetteurs ears Shure P10T, le tout formant le système PSM 1000.

Cette SQ5 qui est une 48 in et 16 out, dispose de plusieurs mémoires et alimente les émetteurs ears Shure PSM1000. Les 6 membres du groupe ont la main sur leurs mix via leurs mobiles pendant les balances et le backliner qui sait faire du son, est en support durant le show.
Ils s’accommodent bien de cette configuration hybride d’autant que ce sont d’excellents musiciens très rompus à la prise de son et l’économie de la tournée ne permettrait pas d’avoir une vraie régie retours et un deuxième tourbus. Lui aussi est plein.
Il y a malgré tout deux micros d’ambiance pointés vers le public pour leur apporter tout le temps, un peu d’air et de contact avec le public, mais ça ne remplace pas un vrai mec derrière la console.

SLU : Pour les liaisons instrument et micros ?

Charles Lagueritte : C’est aussi du Shure, de l’Axient Digital. On a deux récepteurs AD4Q. La batterie sur mesure est fabriquée en Dordogne par Beartone. Elle est repiquée par un kit Audix auquel s’ajoutent quelques micros Prodipe, tous fournis par le groupe. Simple et très efficace. Les cymbales remarquables de richesse harmonique sont des UFIP italiennes.

Il n’y a pas que les boîtes que l’on accroche, les micros PZM aussi !

Une particularité se cache dans la grosse caisse, un Shure 91 à l’envers, un montage voulu par Charles car la snare n’ouvre pas le gate quand il est placé la tête en bas et sonne aussi bien.

SLU : Jolie batterie

Charles Lagueritte : Elle sonne bien et est bien sonnée par Jérémy Stevez et les cymbales ont un côté dark très K. De mon côté je la travaille à 80% le son de ce kit avec les overheads et le reste via les micros de proximité tordus par du Transient pour avoir des transitoires.
Les guitares quant à elles sont entièrement en simulation et aucun ampli ne trône sur scène. Idem pour les claviers avec une grosse configuration MainStage. Très grosse même.

Très belle batterie avec un accastillage Gravity très bien pensé pour la tournée par Charles qui a dû aimer le Lego et le Meccano étant jeune !

SLU : C’est quoi les petits boîtiers derrière tes micros chant ?

Charles Lagueritte : Ce sont des Optogate. Avec les Goldmen je dispose de véritables harmonies de voix sur de nombreux titres mais à la fois je ne peux pas laisser constamment 5 micros ouverts plein pot sur scène. Ça marche avec un petit émetteur récepteur infrarouge alimenté en 48V.

Un des Optogate placés en sortie des V7 des chœurs. Ne pas oublier de commuter le 48 V.

Approche toi…voilà, c’est ouvert, la LED est rouge. En s’écartant, le micro est coupé ou atténué et on dispose d’une vis de réglage pour choisir sa distance. Il existe deux versions, une dite PAD et une Mute. J’ai choisi la première avec ses 15 dB d’atténuation ce qui nettoie déjà suffisamment.
J’adore ce boitier qui est très, très utile car, contrairement à un gate, il ouvre indépendamment du niveau capté par le micro. Il y a enfin un petit côté pédagogique. Si tu n’es pas bien placé et près de ton micro, ça n’ouvre pas.


Tout comme dans les parfums de vanille il n’y a pas une seule molécule de divine gousse, dans ce clavier divers accords de sons synthétiques restituent des pianos très imagés et parfois chargés mais qui trouvent immédiatement leur place et nous ramènent 40 ans en arrière.

SLU : Un Roland RD-1000 !

Charles Lagueritte : Il a 40 ans ! Et il le fallait car il est à l’origine des sons de piano de Jean-Jacques Goldman. Ils l’ont chiné, trouvé, réparé et désormais il apporte cette couleur de vrai/faux piano qui a été tellement utilisé lors de sa sortie (et toujours par Elton John en version rack avec une dose de Motif le tout piloté par un Disklavier Yamaha NDR)

Pour les nostalgiques, une vidéo de présentation où tous les sons sont passés en revue par un musicien italien.


Source Expander sur l’Avantis.

SLU : Puisqu’on parle de ce qui t’arrive depuis la scène, parlons mix, effets et ressources en général.

Charles Lagueritte : La seule ressource DSP externe dont je dispose c’est le Finalizer de t.c. electronic, tout le reste est fait dans la console avec ses propres ressources. Pour la batterie par exemple j’utilise le Source Expander, aussi simple à utiliser qu’un LA-2A mais c’est un gate.
Le Transient Controller est mon algorithme de référence pour travailler les transitoires de la batterie et j’en use et abuse. Sur la grosse caisse je travaille avec le son, j’égalise et je termine avec de l’EQ dynamique pour qu’elle soit bien nerveuse.

Le Transient Designer à la sauce Allen & Heath.
Et l’EQ dynamique, un redresseur de torts plus rapide que Zorro.

Ahh ce petit bleu ciel qui nous rappelle quelque chose…

Ma batterie part ensuite vers trois groupes de traitement différents : la batterie naturelle avec juste un compresseur opto et un ou deux dB maxi de réduction, le groupe kick, snare et toms hyper compressé avec une simulation Bus SSL. Attaque lente, release rapide et 12 dB de réduction.

On entrevoit la touche ALL illuminée en bleu.

Enfin j’ai le groupe Crush basé sur une émulation de UREI 1176 qui est là uniquement pour colorer. Une sorte de grosse purée de distorsion via le « British mode » des touches de ratio toutes appuyées. Je m’en sers pour salir à petites doses la batterie.

Une démo via un coup de Virtual démontre la bonne tenue sonore des choix de Charles avec une base travaillée mais encore naturelle, puis l’ajout du groupe compressé qui densifie l’ensemble et enfin l’arrivée du Crunch qui colore et rehausse sensiblement la snare et ses harmoniques, la rendant presque alu alors qu’elle est en bois !

Le trou pour laisser respirer la voix de Alain Stevez qui chante super bien et incroyablement « Goldman » mais en envoyant peu…

SLU : Et le reste ?

Charles Lagueritte : J’ai un groupe de tout sauf la batterie, un pour les chœurs qui sont très importants et sur le groupe de l’orchestre j’ai un EQ dynamique DYN8 qui en side-chain à 1,5 kHz me libère un peu de place dans les claviers et la guitare pour la voix lead qui en a besoin.
Je fais pareil entre mon pied et ma basse pour éviter qu’ils ne se mangent. Le pied relâche un peu le 60 Hz de la basse. On parle de quelques dB, rien de méchant, et la basse est traitée avec une simulation de distorsion tube.


l’EQ dynamique sur la voix avec des points calés sur des fréquences difficiles et qu’il faut bien tenir.

SLU : On parlait de la voix d’Alain…

Charles Lagueritte : Ahh il y a du monde ! On commence par un expandeur à double seuil et double filtre assez bien fichu appelé Dual Threshold Expander, puis on a un compresseur multibande, un égaliseur dynamique pour venir traiter des points spécifiques de sa voix chantée et enfin un compresseur monobande classique type LA-2A pour terminer le travail.

SLU : En plus de tout ça tu as suffisamment de moteurs de réverbération ?

Charles Lagueritte : Tout à fait. Les ressources ne sont pas infinies mais à chaque titre via les snapshots, les temps et les couleurs changent ce qui apporte la variété nécessaire. J’ai une « AMS » qui, dans le même slot, devient une « Plate » et c’est pareil pour les délais et les autres effets. C’est mortel et j’arrive à tout faire. A quoi bon me balader avec une Bricasti alors qu’on est dans un son années 80 où tout doit sonner un peu -digital-. J’ai tous les outils pour ce projet spécifique. Peut-être un pitch corrector un peu plus élaboré. J’en ai un sur le violon d’Alain pour l’aider un peu car il n’est pas un joueur de violon et il a appris sur le tard (rires).

Niveau customisation, Charles se lâche, tout comme sur l’emploi des user keys et puis, il y a une étiquette pour tout !

SLU : Tu as deux derniers trucs si j’ai bien compris

Charles Lagueritte : Oui, une réverbération interne sur le master de la table. Je me suis rendu compte lors d’un live en festival que j’étais trop sec et qu’en remontant le retour des effets, je perdais en précision. Depuis je m’en sers en fonction des salles et de leur acoustique. Par exemple au Zénith de Pau qui est assez mat et l’Arkea à Bordeaux qui est aussi très précis mais un peu court.
Le workflow de cette table est très abouti et je le trouve mieux conçu que la DLive où, par exemple, on ne voit pas les inserts sur le Channel Strip ! Les User Keys sont aussi puissantes et depuis deux ans que je me sers de l’Avantis, j’ai à chaque fois pu tout faire sans jamais avoir de pépins. Pense que je tire même mon cuivre à 100 mètres sans problème. Je n’aurais pas dû dire ça, ça ne va pas marcher ce soir ! (raté, ça s’est super bien passé NDR)

Pas fréquent voire très rare dans le touring, un Finalizer 96K en version rack se brade désormais 300 € sur Le Bon Coin…Où va le respect ;0)

SLU : Et le Finalizer, il sert à quoi en définitive ?

Charles Lagueritte : C’est la touche finale et intervient assez peu au cours du show. Il est inséré en 96 kHz dans la console qui est aussi en 96. Il n’y a que le rec qui est en 48 kHz via le DVS grâce à une carte Dante 64 ajoutée dans la console, la même qui équipe les DLive. J’ai été obligé de baisser la fréquence pour disposer d’assez de pistes, mais le SRC de la carte me rattrape le coup et tout fonctionne comme un charme.

Si par hasard l’Avantis ou le réseau devaient tomber, la SQ5 qui reçoit en premier le flux du stage, dispose d’un mix secours et est raccordée en AES/EBU aux contrôleurs amplifiés. Le mix est certes basique et les effets peu nombreux mais les musiciens ne perdent pas leurs retours et les spectateurs leur soirée. On a eu à s’en servir une fois car on a eu un switch capricieux. Les musiciens se sont mis sur le nez de scène et ont joué un guitare/voix à 4 le temps qu’on change de switch et qu’on le redémarre et ensuite on a rebasculé sur l’Avantis. Le groupe l’a dit au public qui a adoré et tout est rentré dans l’ordre.

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Noir Salle

On était resté sur des balances et un virtual un peu forts en SPL. Dès les premières notes du show, tout rentre dans l’ordre. Le niveau se stabilise autour des 94 dBA, le son, la voix et le style Goldman résonnent et les applaudissements ne vont plus arrêter de la soirée.

Une conception lumière signée Thomas Dechandon et des tubes en béton. Ça va chauffer mon chaton !

Très travaillé et maitrisé, le mixage de Charles est respectueux de l’époque de Jean-Jacques tout en étant plein et très précis ce qui, dans les années 80 et 90, n’était pas évident ne serait-ce qu’en termes de diffusion, de portée et de couleur tonale à chaque siège. Ici le rendu est moderne, bien calé par Julien Desjardins et efficace avec K3 qui fait très bien le job et correspond bien à la jauge de la tournée.

Alain Stevez présente son équipe technique et Charles.

Peut-être le Finalizer et la somme de traitements réduisent un poil trop la dynamique, mais même s’il n’y a pas un cheveu qui dépasse, le public est aux anges. Les effets qui accompagnent chaque titre soulignent bien le jeu des musiciens en respectant le morceau original, et le chant délicat d’Alain Stevez trouve toujours sa place malgré des arrangements compacts et une batterie très sonore au plateau.

Le pupitreur étant à son troisième show, Charles le guide en lui indiquant du bras gauche les rendez-vous son-lumière comme un vrai chef d’orchestre, gardant le droit pour la console. Enfin la présentation de l’équipe technique par le groupe prouve à quel point l’ambiance est bonne. Booonne, booonne, booonne devrions nous dire !

Prestataire son et lumière : Prodjekt, groupe SLS. Et plus sur les Goldmen et sur la constellation Ginger

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