Le coup de jeune de Mériadeck avec Nexo et Axilon

Lieu emblématique des concerts et des shows en tout genre à Bordeaux de 1981 à 2018, la Patinoire de Mériadeck est revenue au sport, sa mission première quand l’Arkea Arena a enfin ouvert ses portes. Disposant d’une acoustique que l’on peut sans risque qualifier de difficile, la Patinoire a longtemps gardé un vénérable système ligne source français, intégré lors de la refonte des lieux en 2004 et employé en guise de sonorisation fixe pour tout type d’événement sportif ou événementiel.

Malgré un entretien régulier et des modification de son déploiement, le besoin de faire évoluer cet équipement essentiel a poussé l’exploitant des lieux à prévoir son remplacement. La suite on va la laisser raconter par la marque retenue pour cette refonte avec Stéphane Brocard de NEXO, mais aussi par Sylvain Brottes, directeur d’Axilon Bordeaux et intégrateur du nouveau système et enfin par Franck Boucher, le directeur de la Patinoire via la société Axel Vega.


L’équipe qui nous fait découvrir La Patinoire de Mériadeck avec de gauche à droite Stéphane Brocard Responsable des ventes pour la France de NEXO, Jean-Noël Cazalis PDG d’Axilon, Franck Boucher Directeur d’Axel Vega et de la Patinoire et enfin Sylvain Brottes, directeur de l’agence bordelaise de Axilon.


SLU : Nous sommes sur la glace, enfin, sur a dalle réfrigérante sur laquelle se forme la glace durant la saison hivernale de mi-septembre à mi-mai (interview réalisé fin mai 2024 NDR). On commence la découverte des lieux par ici. Quatre enceintes couvrent toute la piste…

Stéphane Brocard : Oui, quatre P15. A l’époque où le projet a été défini et accepté, la gamme des enceintes coaxiales compactes P+ ne comportait pas la P18 qui dispose au sein de son 18” d’un moteur 4” offrant une portée légèrement supérieure. La P15 fait très bien le job, les quatre boîtes étant placées en hauteur par paires, et de part et d’autre de la piste dans le sens de la longueur.

Sylvain Brottes : Le rôle de ces 4 enceintes et de fournir la musique d’ambiance à la piste pour les patineurs, qu’ils soient professionnels avec des patineurs artistiques ou l’équipe locale de hockey des Boxers, ou bien amateurs avec les scolaires et le public en fin de journée. Il ne s’agit donc pas d’une diffusion de concert. L’énergie on va la trouver sur les gradins pour les spectateurs et les supporters des Boxers.


La piste de glace avec les quatre P15 dont le son est matérialisé par un fil vert.

SLU : Comment s’organise la régie ?

Sylvain Brottes : Elle est assez simple avec 4 liaisons micro Sennheiser Digital et des sources de musique et sons d’ambiance lancés par un ordinateur, une platine DJ et une liaison Bluetooth. Le tout aboutit dans la console Digilive Studiomaster. A la demande de Axel Vega qui est la société concessionnaire de la Patinoire et d’autres lieux accueillant du public bordelais (plus d’infos avec Franck plus loin) nous avons programmé la console et effectué des sauvegardes sur clé USB pour faciliter et garantir la prise en main par différents opérateurs son.


Une vue de la régie, petite et placée au niveau de la glace mais très facilement accessible. L’homme souriant dans l’écran du centre pas très propre n’est autre que Sylvain Brottes…


SLU : A quoi sert l’entrée Bluetooth de la console ?

Sylvain Brottes : A connecter un iPad via un DAC qui dispose d’un module Bluetooth. J’ai trouvé un système d’antenne déportée qui permet de connecter très au-delà de la norme. Cela sert durant les entrainements des patineurs artistiques. Durant les performances en public, les musiques sont jouées par l’ordinateur, à plus forte raison que l’absorption des ondes par le public réduit la portée. Il y a aussi un boitier avec une entrée prévue pour l’accueil d’une console. On ouvre à 0 la nôtre et ils peuvent être en complète autonomie.


La régie HF en EW Digital Sennheiser, 4récepteurs pour deux micros main et deux packs avec des micros cravates. Tout en bas un répartiteur actif EW-D ASA. Le petit module en tête du 1er récepteur est un DAC en charge de connecter avec un iPad en Bluetooth. La télécommande DCP4V4S Yamaha connectée à la matrice MTX5-D avec 4 zones et 4 volumes accessibles dont 3 sont utilisés, la glace, les tribunes et le carré VIP. Les touches activent ces 3 zones. La 4è touche donne le choix de laisser le niveau de la musique nominal lors de l’usage du micro ou bien d’enclencher un ducking donnant priorité à la voix sur la musique.

SLU : La matrice Yamaha MTX5-D, on reste en famille (sourires), distribue on imagine le Dante aux contrôleurs mais le clavier de commande trahit un autre rôle…

Sylvain Brottes : En effet. Le clavier et ses commandes de niveau pilotent la matrice et donnent la possibilité de travailler trois zones distinctes.

La principale est Tribunes avec la majeure partie de la diffusion. La seconde VIP et ne concerne que deux P10 qui couvrent une terrasse face Est qui sert pour des événements et un certain type de clientèle.

Glace enfin alimente les quatre P15 qui donnent du son aux patineurs et, en absence de glace, à d’autres événements se passant sur la dalle béton. En cas de besoin spécifique et en accès intégrateur, nous pouvons ponctuellement opérer d’autres changements dans la matrice et isoler telle ou telle zone.


Les quatre contrôleurs amplifiés NXAMP4x2 MK2. Le choix s’est porté sur des modèles identiques et de forte puissance pour pouvoir être polyvalents et interchangeables le cas échéant.

SLU : Où sont placés les contrôleurs amplifiés ?

Sylvain Brottes : Sur la passerelle orange, au plus près de la plupart des enceintes, dans une armoire hermétique ventilée et chauffée via un thermostat pour lutter contre les conditions assez difficiles auxquelles sont confrontées les électroniques dans une patinoire par définition très humide, mais parfois aussi chaude l’été.

Les NXAMP4x2 MK2 sont au nombre de 4 et bénéficient d’une liaison Dante avec un primaire et secondaire indépendants et disposant de switches séparés pour plus de sécurité. Les quatre amplis, les switches et la résistance chauffante sont sur des différentiels individuels 30mA, le général étant en 50mA.
En fonction des distances les liaisons HP voient leur section varier et pour les plus distantes, on monte jusqu’au 6 mm2.

SLU : La nouvelle sono ne peut en aucun cas être employée pour faire de l’évacuation

Sylvain Brottes : Du tout. Il s’agit d’un système qu’on appellera de service et de confort. La Patinoire dispose en propre d’une alarme avec des sirènes qui, enclenchée, coupe l’alimentation de la régie.


Un shoot de rêve pour un nombre de boîtes somme toute raisonnable et qui explique la sensation de plénitude que l’on a à l’écoute du système, un super boulot de Carole Marsaud. On distingue bien aussi les passerelles carrées qui portent le système, trois sont utilisées, la violette, la rouge et l’orange.

SLU : Pour lutter contre l’humidité, les enceintes sont protégées elles aussi ?

Stéphane Brocard : Oui, la série P+ dédiée à l’installation est encore plus résistante que celle Touring et dispose d’un indice de protection IP54.

SLU : Quel a été le cahier des charges pour le son de la Patinoire ?

Sylvain Brottes : Un son homogène où que l’on soit dans les tribunes. Pour ceci faire Carole Marsaud qui est Engineering Support Manager et Responsable des projets d’installation fixe, a conçu une multidiffusion basée sur la série coaxiale compacte P+ en accrochant les enceintes aux passerelles carrées enchâssées les unes dans les autres et formant des étoiles en réponse à la forme si particulière de la salle. Une seule passerelle qui par ailleurs est garnie de gaines de ventilation et est la plus haute, la jaune, n’est pas utilisée par notre système son.


Carole Marsaud

SLU : Vous optimisez ainsi le positionnement des têtes par rapport aux gradins…

Sylvain Brottes : C’est exact. Parfois on utilise deux passerelles différentes, je pense aux deux grands gradins Nord et Sud avec l’orange et la rouge, d’autres fois on optimise la couverture en modifiant le guide d’onde ce qui est très facile dans les P+.
Carole a fait un gros travail de simulation. Le choix du système s’est porté sur la série P+ et plus particulièrement sur les P15 et P12 pour les sièges les plus distants et les P10 pour les rappels. L’intégration sur site a pris exactement un mois entre passage de câbles, pose des nombreuses enceintes et calage de l’ensemble réalisé par Christophe Girres qui est Engineering Support Manager NEXO.

SLU : Nous sommes sur la passerelle rouge, Quels sièges sert-elle ?

Sylvain Brottes : La salle comporte deux grands gradins Nord et Sud se terminant en pointe, mais aussi six autres petits, voire très petits gradins aussi en pointe. Comme une étoile à 8 branches en somme. Depuis la passerelle rouge, on couvre avec des P12 les 4 petites branches Nord-Est, Sud-Est, Sud-Ouest et Nord-Ouest. Ce sont des petites tribunes assez haut perchées. Il y a aussi des rappels en P10, une paire à chaque fois, pour les sièges les plus hauts des Nord, Sud, Est et Ouest. Les grandes tribunes Nord et Sud disposent en principal d’une paire de P15.


Une vue en détail des gradins Sud et des petites tribunes Sud-Ouest et Sud-Est.

SLU : Le choix de NEXO s’est fait après une écoute sur site ?

Stéphane Brocard : Absolument. Nous avons concouru avec une marque américaine. Pour ceci faire on a placé deux P15 pour simuler la couverture de la glace et deux en passerelle pour les gradins. De l’avis général nous avons offert un son plus qualitatif, puissant et qui correspondait plus à ce que les exploitants souhaitaient entendre dans la patinoire.

Du son, et du bon

Après une balade dans bon nombre de tribunes et en régie, nous avons commencé par savourer un titre de Bruce Springsteen sur le sol en béton privé de sa glace. Comme prévu, 4 enceintes modernes, parfaitement calibrées et qui jouent exactement le même signal mono en se faisant face, génèrent des interférences très audibles au milieu de la longueur, mais aussi au milieu de la largeur de la zone couverte.


Une des deux P15 solidement fixée au sol de la passerelle orange et sécurisée par un câble acier, une des deux boîtes en en charge des gradins Nord. La portée de ces enceinte est très étonnante

Sans doute qu’une stéréo croisée aurait quelque peu pondéré cela, mais aurait aussi demandé deux pattes d’ampli en plus. Rien de terrible malgré tout puisqu’on reste rarement au même endroit très longtemps sur une piste en glace. A signaler aussi que deux presets ont été programmés par Christophe pour les quatre P12 qui encadrent la piste, un pour la glace plus éteint dans le haut du spectre afin de limiter les réflexions et un pour le béton. Nous avons écouté le premier.


Depuis la passerelle rouge, une des quatre P12 en charge des 4 petites tribunes hautes dont deux, placées derrière la scène, étaient systématiquement condamnées à l’époque de la Patinoire salle de spectacles.

Avec Sylvain Brottes dans le rôle du présentateur, nous avons ensuite testé la diffusion dans les gradins. On a beau avoir été partout, depuis les sièges protégés par les plexis au niveau de la glace jusqu’à ceux situés au bout des branches de l’étoile (parfois débouchés par une petite P10), le son est clair, piqué, énergique avec un très bon SPL et surtout une intelligibilité qu’on n’imaginait pas possible à Mériadeck.

Le ratio champ direct / champ réverbéré est remarquable ce qui valide le design en multidiffusion de semi-proximité de Nexo et l’emploi des P+, à plus forte raison que nous avons écouté à salle vide.
Joli travail aussi sur le raccord entre les différents points d’émission. En se baladant, la pression reste constante et les quelques interférences parfois audibles sont minimes et ne compromettent absolument pas l’intelligibilité des mots.

Le son a beau être une douche et la distance très importante pour du point source, cela n’ôte en rien la qualité et la pertinence du son. Deux ou trois coins d’une salle qui n’en manque pas, auraient aimé être débouchés et des propositions en ce sens ont été faites en P8 avant d’être oubliées pour rester dans le budget. Comme elles sont répertoriées, il sera possible d’aller les traiter en un second temps.

Un très bon point aussi pour la chaîne de traitement des deux micros main. La voix est naturelle, précise, bien tenue et on sent beaucoup d’énergie disponible pour les présentateurs.


Franck Boucher, le patron de la Patinoire nous rejoint, c’est le moment d’avoir son sentiment sur le travail fait dans la salle dont il a la responsabilité.

Franck Boucher, aussi compétent en audio, lumière, rentabilité, production d’événements, gestion de personnel, de société, de DSP (délégation de service public, pas de digital signal processing !), bref, pas le boulot le plus facile à faire.

SLU : Alors Franck, heureux (sourires)

Franck Boucher : Plus que moi, parlons de nos clients. Ceux qui prennent place dans les gradins le sont tout à fait car maintenant, c’est enfin audible (rires) et puis il y a les organisateurs d’événements sportifs ou autres, et qui se servent de ce système. Pour eux c’est du velours. On est allé jusqu’à régler le son des voix des intervenants les plus assidus comme mon animatrice ou le speaker des Boxers.
Ça sonne vraiment bien. Il faut dire qu’on partait de loin. L’ancien système line-array avait 24 ans. On a remplacé les membranes et les amplis, j’en ai même loué à cause de l’humidité propre à ce type d’équipement sportif mais malgré ça, le moment était venu de moderniser le tout, comme on l’a fait pour l’éclairage.


Pour avoir un bon son micro, le choix d’une tête de qualité, résistante à l’accrochage, bien directive et ne mettant pas en exergue le sifflantes comme les plosives est indispensable. La 935 Sennheiser dynamique correspond à ce descriptif.

SLU : La Patinoire de Mériadeck est une délégation de service public. Qui décide et in fine paie pour ce type de rééquipement ?

Franck Boucher : Quand nous répondons à l’appel d’offre et qu’on nous confie pour 5 ans un lieu en gestion, nous faisons en sorte d’améliorer dans la mesure du possible les équipements qui s’y trouvent.
Pour répondre à la question c’est donc le groupe pour lequel je travaille qui paie, groupe qui gère par ailleurs 125 équipements dans toute la France dont 110 sites aquatiques, des patinoires, des bowlings, des tennis et un vélodrome, celui de Bordeaux.
A ce propos, si sonoriser la Patinoire n’a pas été simple, si quelqu’un veut s’attaquer au vélodrome, je pense qu’il va s’amuser d’autant qu’il n’y a aucun point d’accroche et le TR dépasse les 5 secondes (rires !).

SLU : Tous les 5 ans l’équipement évolue donc..

Franck Boucher : C’est exact et comme nous avons été choisis pour la quatrième fois, l’éclairage passe de délégation en délégation en LED. On a aussi ajouté un cube central pour les scores il y a quelques années et le son vient d’être refait au cours de la délégation 2023-2028.


Une partie du nouvel éclairage en LED de la Patinoire déjà en place, et pour les plus observateurs et dos à dos, une des deux P15 dirigée vers la glace et une des deux P12 dédiées aux VIP.

SLU : Qu’est-ce qui est encore prévu pour le son

Franck Boucher : On se pose la question de mettre des caissons de basses pour renforcer le grave afin de donner plus de corps à tout ce qui est musical, pour toutes les pêches et extraits musicaux joués durant les matchs de hockey ou bien lors d’événements privés. Les styles musicaux plutôt rap et électro et le SPL joués appellent un peu plus de basses.


Le quiz du jour. Regardez la passerelle orange. Le rectangle blanc est la baie ampli. Les deux petits rectangles gris en bas de passerelle sont des P15. Mais qui est près de la baie ? A gagner tous nos compliments !

SLU : Mériadeck a accueilli tous les concerts et gros événements bordelais avant l’Arkea, comment faisiez-vous ?

Franck Boucher : On finissait avec les clubs ou les séances publiques à minuit et on configurait la salle en mode accueil.
On retirait les plexiglass tout autour de la piste, on mettait un sol sur la glace, on montait la tribune et la scène pour qu’à 6 heures du matin on puisse accueillir les équipes techniques des prods.

SLU : Une dernière question. Comment fait-on de la glace ?

Franck Boucher : Avec un sol béton dans lequel passe un serpentin d’eau glycolée pour le descendre à la température de -13°. Une fois cette température atteinte, l’eau prend en glace. C’est très long de descendre la dalle quand on remet en glace après la pause estivale car elle est autour des 28° et si l’on va trop vite, on peut la casser.
Il faut une semaine pour être à 0° et une fois la première fine couche de glace faite, on colle les bâches de pub et on continue à l’épaissir jusqu’à atteindre 3 à 3,5 cm en fonction de son usage récréatif ou sportif. On ne va pas au-delà car cela est très énergivore.

Et dire que j’ai détesté cette salle…

Ohhh non je ne l’aimais pas, de nombreux spectacles et surtout de mixeurs se sont cassé les dents, et nous un peu les oreilles ; désormais on a du mal à la reconnaître. Certes le TR très dense et la dureté de certains retours est toujours là et il suffirait de taper au ligne source pour retrouver le côté « c’est un solo de guitare ou de batterie ? » des vieux jours, surtout en haut des gradins.


Souvenirs… Le mother gril de la Patinoire et l’inextricable et sonore amas de passerelles, structures, gaines de ventilation, armoires d’amorçage d’éclairage et j’en passe. Regardez aussi les gradins Nord. En gris on entendait un peu, en rouge les réflexions couvraient le peu d’aigu qui arrivait, enfin en jaune, c’est comme à Woodstock. Vous pouviez dire que vous y étiez, mais pas que vous aviez entendu quelque chose !

Le choix de NEXO et d’Axilon de rester en point source coaxial à hautes performances en multi-diffusion, n’en est que plus judicieux. Le grave, suffisant pour une voix, n’appelle pas l’usage de renforts ou de subs, mais semble effectivement léger pour des messages musicaux, des effets ou de l’événementiel, Attention cela dit à ne pas réveiller ces vieux murs avec trop d’énergie. Mériadeck n’a pas dit son dernier mot ;0)

Pour plus d’infos sur

– La Patinoire
– La série P+ NEXO
– Axilon
– Axel Vega

 

Crédits -

Texte : Ludovic Monchat - Photos : Ludovic Monchat, NEXO

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