L’Alliance, un syndicat pour les distributeurs et fabricants de produits scéniques

Découvrez l’Alliance / SEINEP, un syndicat regroupant les distributeurs et fabricants de matériel pour l’événementiel.
Une longue interview en visioconférence pour un tour d’horizon très complet de ses promoteurs, structures et projets.


SLU : Pouvez vous nous préciser comment se nomme votre structure et quelles sont les relations qui existent entre APESA, Alliance, SEINEP, FICIME et tout en haut Medef.

Evangéline Pirot

Evangéline Pirot (Administratrice de l’Alliance, présidente du SEINEP, Administratrice de la Ficime) :
Le SEINEP, le syndicat des entreprises internationales de négoce en électronique professionnelle a été fondé en 1984. Il regroupe des entreprises œuvrant dans le médical et dans l’audiovisuel.
Le SEINEP est affilié à la FICIME qui est une fédération d’entreprises internationales de la mécanique et de l’électronique, et regroupe 13 syndicats ou unions.

Cela donne au SEINEP la possibilité de disposer des 15 cadres permanents de la FICIME et de services concernant le droit social, fiscal ou juridique et les contacts avec les cabinets ministériels.


Jean Marie Le Guen

Jean-Marie Le Guen (secrétaire général de la Ficime) : La FICIME a aussi une expertise dans les conventions collectives puisqu’elle négocie et est associée à plusieurs conventions collectives (Import-Export, Commerce de Gros, Métallurgie).
La FICIME a aussi des mandats dans plusieurs instances nationales, dont la Commission d’examen des pratiques commerciales. Bien entendu les adhérents du SEINEP peuvent bénéficier des informations dont on dispose via les ministères et administrations directement.

Evangéline Pirot : Le SEINEP a été très actif lors de l’évolution des bandes de fréquences où nous avons beaucoup travaillé avec l’Anfr et l’Arcep, et on est actif à nouveau puisque se prépare la Conférence mondiale des radiocommunications 2023 avec de possibles interactions entre l’UHF et la 5G.

SLU : Au sein du SEINEP il y a deux branches, le médical et l’audiovisuel…

Evangéline Pirot : Oui, et durant le printemps et face à la crise actuelle, on a ressenti le besoin de dynamiser le SEINEP et lui donner un pôle plus dédié à l’audiovisuel, d’où la création de l’Alliance.

Arnaud Leschemelle

Arnaud Leschemelle (Président de l’Alliance et Vice-Président pôle audiovisuel du SEINEP) : J’ai pris mes fonctions le 1er septembre 2020 à l’issue d’une assemblée générale qui a aussi vu l’élection d’Evangéline Pirot à la présidence du SEINEP, à la suite d’André Zagury.
L’Alliance regroupe les fabricants, les distributeurs professionnels de l’audiovisuel à destination des marchés de l’évènementiel et du spectacle.

Notre représentativité est garantie par la présence au bureau en tant que vice-présidents d’Hervé Guillaume PDG de L-Acoustics Group, Bruno Garros Directeur général de Robe France mais aussi d’Alain Richer, DG de d&b Audiotechnik France, de Benjamin Garnier, DG d’Algam, d’Olivier Bordini de Dimatec et de Thierry Chenot, directeur et co-fondateur de ASD en tant qu’administrateurs.

Hervé Guillaume

Bruno Garros


Benjamin Garnier

Alain Richer


Olivier Bordini

Thierry Chenot


Nous nous sommes retrouvés entre nous, liés par une problématique commune allant bien au-delà de la taille de nos entreprises : l’effondrement de notre marché au niveau mondial. Les artistes et les Intermittents étaient lisibles par l’état, les prestataires ont le Synpase, un syndicat qui regroupe plus de 200 entreprises.
Nous avons donc lancé un certain nombre de chantiers parmi lequel celui visant à faire accepter nos métiers de la distribution et de la fabrication de matériel pour l’Evénementiel au sein du plan Tourisme, nous y sommes parvenus le 8 octobre. Nos sociétés, ainsi que l’ensemble des distributeurs et fabricants, ont désormais rejoint la liste S1 et vont pouvoir bénéficier des aides de l’état afférant au secteur de l’évènementiel.

SLU : Structurellement l’Alliance est un syndicat ?

Arnaud Leschemelle : Oui absolument, nous sommes reconnus comme une organisation professionnelle. Jean-Marie Le Guen est secrétaire général du SEINEP qui est affilié à la FICIME et nous bénéficions ainsi des moyens de la Ficime. Je profite de cette tribune pour dire que l’espace de quelques temps, nous avons communiqué sous le nom d’Apase mais pour diverses raisons nous avons préféré en changer et sommes désormais tous réunis sous le nom de l’Alliance.
Si on prend les premières lettres de l’Alliance des Professionnels de l’Événement, du Spectacle et de l’Audiovisuel, cela donne APESA, un clin d’œil à l’apaisement que l’on recherche. Nous sommes ici pour œuvrer pour le bien de nos entreprises et de nos salariés et c’est le seul débat qui nous intéresse. Nous ajoutons désormais aussi la formation car c’est un élément important, trop peu mis en avant dans nos professions et pourtant primordial pour nos activités.

SLU : Quels sont les chantiers et les but que vos mandants vous demandent de porter ou d’atteindre ?

Olivier Bordini (Administrateur de l’Alliance) : Le premier but est celui de fédérer une profession de fabricants et distributeurs qui était très éparpillée. Là où la FICAM est présente pour l’univers télé et ciné, le SYNPASE pour les prestataires de l’audiovisuel scénique et événementiel, le PRODISS pour le spectacle musical et de variété et un certain nombre d’autres qui se sont montés durant cette crise, nous étions peu visibles.
Ensuite au cours des réunions hebdomadaires que nous avons avec les adhérents, nous avons recueilli un certain nombre de problématiques autres auxquels il sera possible de répondre au travers de la puissance de la FICIME et cela regarde les douanes, les homologations, les labos, les normes, le développement durable ramené à nos appareils et à leur consommation.

Bruno Garros (Vice-Président de l’Alliance) : Grâce à mon contact fréquent et privilégié avec eux, j’ajouterai deux points qui reviennent souvent auprès des adhérents : le besoin d’avoir recours à des experts indiscutables pour nombre de problématiques que certaines structures n’ont pas les moyens de régler seules.
Le second point est la confidentialité des échanges et le traitement des données financières ou sociales. Nous avons signé une charte de confidentialité avec la personne au sein de la FICIME qui gère le traitement et le stockage des données afin de garantir que personne ne fera un usage indu des chiffres.
Nous avons ainsi une grande liberté et une tranquillité d’esprit. Il faut comprendre que nous sommes concurrents et que c’est la première fois que l’on se regroupe. Il a fallu établir des règles pour que la confiance règne entre nous. Enfin les adhérents sont sensibles à la variété des métiers et à la diversité et la représentativité des entreprises adhérentes comme de celles qui composent le bureau.

Arnaud Leschemelle : Pour compléter les propos de Bruno, je pense par exemple à la déléguée générale de la FICIME Laurence Fauque qui est rompue aux métiers du lobbying, connaît beaucoup de monde et sait comment présenter et mobiliser telle ou telle personne dans le cadre de nos démarches.
Enfin la FICIME est adhérente du Medef ce qui fluidifie encore les relations et la rapidité des remontées vers son président Geoffroy Roux de Bézieux, un battant qui est en contact au quotidien avec le gouvernement et qui comprend parfaitement les problématiques d’une entreprise. On a beau être sympa, nous sommes les acteurs de l’ombre, il faut donc toucher les bonnes personnes afin de pouvoir être reconnu.

SLU : On sait bien que notre branche pèse peu face à d’autres secteurs économiques…

Arnaud Leschemelle : Fabricants et distributeurs réunis, on atteint environ une centaine de structures et 950 millions d’euros de CA. Quand on ajoute les prestataires, on est à environ 2 milliards d’euros ce qui est beaucoup et peu à la fois. Il y a pourtant des pépites incroyables en France. J’ai été frappé par la méconnaissance d’une marque comme L-Acoustics parmi nos politiques. Quand ils parlent de relocalisation sans se pencher sur une boîte qui conçoit et fabrique tout en France et exporte partout dans le monde, je suis assez interloqué.

SLU : Comment est structurée l’Alliance ? Qui dit services et experts, sous-entend frais pour y avoir accès…

Jean-Marie Le Guen : (sourire) Bien entendu… Pour compléter les propos d’Evangéline, la FICIME regroupe, avant la création de l’Alliance, environ 420 entreprises. Les ressources mises en commun sont financées par l’ensemble de ces entreprises. Il y a donc deux niveaux d’adhésion, celui à l’Alliance plus abordable et celui à l’Alliance et au SEINEP, cette dernière option ouvrant grand les portes des services qui ont déjà été longuement évoqués.
Je tiens à préciser que les adhérents à l’Alliance bénéficient d’un prix plus accessible que ce que la FICIME propose à d’autres très grandes entreprises. Je conclurai en rappelant que nous sommes extrêmement stricts quant à la déontologie, la confidentialité et les règles de concurrence au sein de la FICIME et des syndicats qui la forment. On s’appuie sur la loi de 1884 sur les organisations professionnelles et le droit de la concurrence.

Bruno Garros : Nous avons constaté que la nature des services rendus et la possibilité d’y avoir recours ou pas lors de l’adhésion, ne bloque pas les sociétés, tout au contraire, elles acceptent et comprennent parfaitement le besoin de payer dès lors qu’il y a un vrai service offert, ce qui est le cas. Certains d’entre nous ont donc fait le choix de bénéficier des services de la FICIME en plus des actions de l’Alliance.

Arnaud Leschemelle : Pour aller encore plus loin, la FICIME dispose d’un budget de fonctionnement annuel de 2,5 millions d’euros, ce n’est pas la petite association du coin. Quand tu n’as pas de DRH, de DAF, de spécialiste douanier, d’avocat et qu’en 24 heures tu as une réponse, c’est une force pour nos adhérents. Quand, en tant que distributeur, tu as un doute sur le contrat d’une nouvelle marque de distribution et que tu bénéficies de conseils avisés et extrêmement précis, c’est une vraie valeur ajoutée.

SLU : Est-ce que le Covid vous a fait grandir et vous a aidé à passer un cap entrepreneurial majeur ?

Olivier Bordini (Administrateur de l’Alliance) : Nous nous sommes fédérés. Cela n’éteindra jamais nos différends commerciaux mais on a su passer outre pour construire de nouvelles relations humaines empreintes d’un indispensable respect afin de pouvoir structurer notre profession.

Arnaud Leschemelle : Cette crise a servi de catalyseur et a permis de nous rapprocher. J’estime qu’il faut savoir rendre au métier ce qu’il t’a donné. J’ai la chance d’avoir des cadres de grandes valeurs dans mon groupe, ce qui me donne du temps pour pouvoir me consacrer à l’Alliance. J’apprends aussi car au contact d’une fédération comme la FICIME, je découvre un nouvel univers plus proche du monde de la politique. On apprend à tout âge !

SLU : Les temps sont durs. Comment faites-vous pour tenir ?

Arnaud Leschemelle : Je pense que nous sommes tous partis en confinement le cœur léger et convaincus que cela n’allait être qu’une courte pause avec sans doute un été difficile. Aujourd’hui tout le monde est préoccupé voire en colère car 78% des tournées 2020 auront été annulées. La 2e vague est une réalité et même les derniers salons de l’année sont annulés. En moyenne parmi nos adhérents, nous affichons une baisse de 40% de notre CA, cela variant de -25 à -75%.
C’est beaucoup et difficilement supportable malgré le chômage partiel ou les PGE qui ont certes fait du bien et donné une bouée à certains, mais qui risquent aussi de se transformer en enclume le printemps prochain. Les distributeurs / fabricants de produits lumière et encore plus ceux qui ont pour clients les prestataires sont les plus exposés, en revanche les sociétés qui ont les intégrateurs ou les magasins à destination des particuliers comme clients, s’en sortent mieux. Attention enfin aux chiffres. Certaines baisses de CA qui semblent acceptables cachent des baisses importantes de marge.

SLU : Quand imaginez-vous retrouver une activité normale ou quasi normale ?

Arnaud Leschemelle : Pas avant la mi 2022. La fin d’année risque aussi d’être calme puisque les hôtels de la capitale sont à 50% fermés et cela va encore augmenter, or ça va de pair avec l’arrêt des événements et met en pause nos business. Bien sûr la visioconférence est dynamique, mais les budgets sont très faibles en comparaison des équipements des prestataires techniques.
On a en France cela étant une chance incroyable. En 2023 on va héberger la Coupe du monde de rugby, la Coupe du monde de ski à Courchevel et Méribel et enfin en 2024 les Jeux Olympiques. Nous vivons une séquence extrêmement difficile, mais je rappelle à nos politiques qu’un rebond existe. A eux de faire en sorte que cela soit une vitrine pour nos entreprises et leur savoir-faire.

SLU : Avez-vous l’impression que la branche qu’il convient maintenant d’appeler événementielle et qui pèse 2 M€, est aussi considérée et aidée que d’autres ?

Arnaud Leschemelle : Considérée et reconnue, désormais c’est oui, aidée autant qu’a pu l’être l’aérien ou l’automobile, la réponse est non, mais cela ne signifie pas que nous ne sommes pas soutenus. Les ministres avec lesquels nous avons pu parler savent que l’événementiel est dans une situation très difficile voire dramatique. Antonio Morais de l’UDFM et Jean-Marie le Guen ont travaillé ensemble pour bâtir une liste d’entreprises qui a permis à nos entreprises d’être ajoutées à la liste S1 du plan Tourisme, et on attend d’autres annonces de la part de Jean Castex très prochainement.
Notre travail est loin d’être fini car on ne sait absolument pas comment sera l’évolution de la pandémie les prochains mois et cela aura forcément une incidence sur la saison de sports d’hiver et la période de noël qui est essentielle à l’économie de notre pays. Bruno le Maire prévient enfin qu’il va falloir apprendre à vivre avec le Covid durant de nombreux mois. Malheureusement nous avons déjà des adhérents qui ont supprimé des postes et risquent d’en supprimer d’autres. Sur les 2 400 personnes que comporte notre branche des distributeurs et des fabricants, je crains que nous atteignions les 600 postes supprimés d’ici à la fin de l’année 2020.

SLU : Quel serait le scénario d’aides idéal ?

Arnaud Leschemelle : Nous avons porté un certain nombre d’idées au-delà de ce qui existe déjà comme le chômage partiel. On demande par exemple à ce qu’il soit prolongé jusqu’à décembre 2021. Il y a aussi un certain nombre d’allégements de charges qui pourraient compléter le dispositif et nous laisseraient la possibilité de redémarrer au rythme de nos clients. On pourrait aussi imaginer un dispositif permettant aux entreprises déficitaires de bénéficier d’un remboursement immédiat de leurs déficits comptables afin de réduite le montant des PGE.

Jean-Marie Le Guen : Saluons quand même les efforts du gouvernement qui est désormais très réceptif à nos problématiques et, dans le respect des autres branches et aussi des finances de la France, va faire tout son possible pour nous accompagner.

SLU : Deux « porte-voix » de votre profession désormais existent, UDFM et Alliance. Comment peuvent-ils collaborer et existe-t-il des spécificités qui les rapprochent ?

Jean-Marie Le Guen : Les relations avec l’UDFM datent du début de l’été dès que nous avons eu connaissance de sa création. Dernièrement cela s’est cristallisé de manière professionnelle puisque j’ai travaillé en présentiel avec leur représentant sur des demandes qui nous ont été faites par le ministère. Pour revenir à notre spécificité : c’est d’être un syndicat professionnel relevant de la loi de 1884 qui est un peu différente de celle de 1901 qui régit les associations.
Pour la suite des événements c’est difficile de prévoir, même si tout est envisageable. L’objectif commun sur le court terme est de servir notre branche et la filière de plein droit, en ayant l’oreille des pouvoirs publics. Sur le long terme rien n’est fermé et je pense refléter par-là, la vision de tout le monde autour de la table, y compris, me semble-t-il, l’UDFM.

SLU : Combien d’adhérents a l’Alliance / SEINEP aujourd’hui ?

Bruno Garros : 31 (update à date) sociétés nous ont rejoint et la dynamique est assez incroyable. Depuis un mois et demi nous en comptons 3 à 4 nouveaux par semaine. Ce chiffre comporte les deux types d’adhérents, ceux qui souhaitent les services de la FICIME et ceux qui rejoignent simplement l’Alliance. Par ailleurs je suis en discussion avec une dizaine de sociétés en plus. On pourrait donc être une quarantaine d’ici début décembre.
A 31, nous représentons dès à présent plus de 50% de l’emploi de nos branches distribution et fabrication réunies. Le CA est sensiblement du même ordre, voire un peu plus. Au-delà des chiffres, je sens une volonté de travailler ensemble, de créer une force et une mécanique au service de tous.

Arnaud Leschemelle : Bien sûr c’est le Covid qui nous a unis, mais on poursuivra l’aventure. Le fait de s’adosser à une fédération forte et structurée permet de proposer des services complets et à même de faire de l’Alliance, un projet utile et donc d’avenir. C’est ce qui fait notre force et me donne l’énergie de continuer l’aventure commencée en 1984. Si notre travail ne plaît pas, on ne sera pas réélus. C’est aussi simple que ça.

SLU : La crise du Covid complique et réduit la possibilité d’organiser des salons. Comment vous positionnez vous en tant qu’entreprises exposantes ?

Arnaud Leschemelle : Au sein de notre organisation c’est très partagé. Certains doivent faire des choix économiques, d’autres ne souhaitent pas exposer pour des raisons personnelles et d’autres enfin ne souhaitent pas exposer leurs équipes et leurs prospects au risque sanitaire. L’Alliance n’a pas une position et chaque entreprise est libre d’agir comme elle le souhaite.

Jean-Marie Le Guen : Nous sommes en effet solidaire de toute la filière- salons mais aussi médias- car c’est tout notre écosystème qui est impacté par la crise actuelle. Les salons font partie de l’écosystème des entreprises et ce moment de contact et d’exposition de ses produits est très utile. Il n’est donc pas question de le remettre en cause la solidarité de toute une filière et nous qui en demandons de notre côté, on serait bien mal inspirés de ne pas en donner.

D’autres informations sur le site Alliance et sur le site de la Ficime

Crédits - Texte : Ludovic Monchat - Photos : L'Alliance, SLU

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