Les 50 ans immersifs de FIP

Lancée sur les ondes moyennes à Paris le 5 janvier 1971, FIP traverse les époques sans se départir de sa recette initiale : de la bonne musique, peu de paroles toujours féminines, douces et utiles, quelques lignes d’infos et enfin du jazz le soir.

Covid oblige, l’anniversaire n’a pas eu lieu exactement le jour dit, mais a tout de même illustré à merveille le slogan : « Vous n’êtes plus là, vous êtes sur FIP » avec une bulle, ou plutôt une île installée dans l’Agora de la Maison de la Radio et de la Musique, grâce à la complicité de L-Acoustics, et un cocktail de lancement où SLU était convié.

La bulle vitrée mais sans plafond, contenant Island.

Quand on sait que 24% de l’effectif de L-Acoustics travaille dans la R&D, on comprend qu’on y prend l’innovation au sérieux, même lorsqu’il s’agit de permettre à de très rares chanceux de s’offrir du son à la mesure de leurs moyens illimités.

Island, puisque c’est de ce « canapé sonore » dont il s’agit, fait partie des L-Acoustics Creations, une nouvelle division de la maison mère dont la mission est d’amener le son du live chez soi via des concepts et des produits dérivés de l’univers pro et délivrant la pression, la qualité et la masse sonore propre à un système de diffusion professionnel.

Island mis à nu. Outre les 13 coaxiaux de dos et les deux 18” de face, on devine aussi les deux moteurs électriques faisant pivoter l’ensemble sur 360°. Remarquez les charges reflex et l’emplacement différent des évents dans les 5 voies arrière (en haut).

C’est ainsi qu’on s’est retrouvé face à 13 coaxiaux 8” et moteur de 1,5” passifs, intégrés dans des charges reflex individuelles, placées en arc de cercle avec un angle de 15° entre chaque enceinte, soit 180° frontaux. Si vous aimez la X8, vous ne serez pas dépaysé.

BluSpace pleinement déployé ce sont 24 voies soit 23.1 = 13 front, 5 arrière, 5 top et 1 double sub.

5 autres enceintes identiques habillent l’arrière de la structure bois, cette fois-ci avec un écart angulaire de 30° ce qui complète une immersion à 360°.

Deux 18”, des SB18 pour ne pas les nommer, prennent place dans des ébénisteries équipées de L-Vents faisant partie du dossier du meuble où sont aussi rackés cinq LA4X pour du 18.1 et six pour monter à 23.1, le maximum du standard maison BluSpace ; on y reviendra.

Cédric Montrézor & Franck Surena

Cédric Montrézor, Executive Director of Application Project et Franck Surena Ingénieur technico commercial de L-Acoustics faisant partie des présents, on en a profité pour leur poser quelques questions avant d’écouter des titres mixés et encodés grâce à la collaboration de Radio France, pour pleinement tirer parti du format natif d’Island.

Franck Surena et à droite Cédric Montrézor

SLU : Christian Heil est à l’origine de L-ISA et de l’immersif. Quel est le produit qui a lancé la filiale L-Acoustics Creations et donc l’exploitation de l’audio hyperréel à la maison ?

Cédric Montrézor : C’est Island qui a donné l’impulsion et l’envie de transporter le live à la maison. C’est aussi à partir de ce premier produit qu’est né Creations.

SLU : Le standard BluSpace 23.1 est propriétaire. Qu’en est-il du catalogue de musique disponible à ce format ?

Cédric Montrézor : Il y a plusieurs façons de profiter de BluSpace. Il y a les BluBubbles, des albums immersifs disponibles sur le site de L-Acoustics Creations. Ensuite il y a les remix et les encodages d’œuvres que nous faisons à la demande, des œuvres privées comme une partie de celles qui sont proposées pour cette opération FIP.
Enfin il est tout à fait possible d’écouter sur Island de la stéréo, du Dolby Atmos ou d’autres formats au travers de processeurs audio capables de récupérer des flux pour alimenter Island.

On collabore avec des partenaires spécialisés dans le résidentiel qui disposent du savoir-faire et de passerelles pour exploiter Island facilement et avec un grand nombre de sources et de formats, notamment le Dolby Atmos Music dont le nombre d’œuvres disponibles ne cesse de grandir (depuis que notamment Apple Music l’a adopté NDR)

SLU : Pour les films c’est pareil…

Cédric Montrézor : Absolument, regarder un film avec Island est depuis toujours possible et le nombre de voies offert par BluSpace convient à tous les formats. La nature même d’Island demande quoi qu’il en soit à ce qu’un intégrateur agréé travaille avec un architecte d’intérieur pour optimiser son déploiement. Il est en effet possible de changer l’aspect et l’usage d’Island qui peut contenir un bureau, un canapé voire un lit et qui pivote sur 360° pour faire face à un écran.

Pour répondre à ta question, le châssis en bois d’Island sort de chez Simea, notre usine qui assemble toutes nos ébénisteries et le montage final est réalisé comme pour tous nos produits à Marcoussis. Une équipe R&D et Applications spécifique est dédiée à L-Acoustics Creations, et des spécialistes basés à Londres se déplacent dans le monde entier pour mettre en service et calibrer nos systèmes domestiques.

SLU : L’aspect résidentiel et luxueux de ce système s’accommode avec le bruit potentiel des ventilateurs des LA4X ?

Cédric Montrézor : Vu les niveaux sonores très importants qui sont générés par nos enceintes en ultra proximité, on n’arrive jamais à faire chauffer suffisamment ces contrôleurs pour que la ventilation forcée se déclenche. A titre personnel je n’y suis jamais arrivé.

Island une fois de plus tout nu et chargé par six LA4X dans son dos, de quoi alimenter l’ensemble de voies offertes par BluSpace.

Nous avons aussi optimisé la chaine de gain pour éviter que la proximité avec les moteurs et leur nombre fasse que le bruit de fond des amplis ne soit perceptible. Ce qui est acceptable quand une ligne est à des dizaines de mètres de distance ne l’est pas ici. Cette exigence technique est bénéfique, le résidentiel et le pro se complètent l’un l’autre.

SLU : Mais ce sont deux mondes à part…

Franck Surena, Sales manager L-Acoustics : Et deux réseaux de distribution à part aussi.

SLU : Si j’habite Nantes, ce n’est pas Melpo qui va venir ?

Franck Surena : Non. Il faut des spécialistes du résidentiel qui maitrisent la vidéo, la hi-fi, la domotique et qui comprennent et accompagnent un client qui ne sait pas trop ce qu’il veut acheter mais va vouloir comparer et surtout écouter les différents composants d’une chaîne, câbles y compris. C’est quelque chose que dans le milieu Pro, on ne pratique pas.
On ne veut donc pas que ce soit poreux entre les deux marchés pour éviter que l’un se serve chez l’autre et propose des services en plus à une clientèle qui n’est pas la sienne et dont il ne maitrise pas les rouages ou les aspects techniques.

Allonge-toi sur le divan

Après ces quelques mots et dans le calme retrouvé, un concert ayant drainé le public vers l’un des studios de la Maison de la Radio, Franck me propose de m’allonger sur le divan.

L’écrin vitré mais ouvert par le haut laisse respirer le système. Peut-être certains utilisateurs des bureaux donnant sur l’Agora, n’ont pas vu d’un mauvais œil la fin des festivités de FIP ;0)

Tablette en main, il démarre alors une séance mémorable qui a peu à voir avec la psychanalyse mais tout avec une vraie dégelée de sensations, toutes plus viscérales les unes que les autres.
Avec Island, on ne coupe pas les cheveux en quatre mais on les perd tellement ça pousse. Je me surprends à baisser le volume ; la musique est parfaitement démasquée, intelligible, profonde, inutile de faire des castagnettes avec ses osselets.

La constellation de X8 apporte un grave bien sec, un bas médium riche et analytique et un aigu assez doux et polyvalent pour des moteurs. Les deux SB18, du moins les transducteurs de 18” à l’arrière et de part et d’autre du dossier, raccordent le plus naturellement du monde avec le reste du spectre sans en abîmer la dynamique et la précision, juste tirant le tout une octave et demie vers le bas.


Franck Surena, le Monsieur Loyal d’Island trois semaines durant. Quel plus beau bureau déporté que l’Agora de la Maison de Radio et de la Musique !

C’est nerveux, c’est mastok et même si on ne peut pas appeler ça un rendu audiophile, je mets au défi n’importe quel système résidentiel d’apporter de telles sensations, un tel plaisir.
Qui plus est, le ratio direct/réverbéré naturellement très élevé, apporte une précision du rendu et une spatialisation sans merci, les enceintes jouant le rôle des surround étant de qualité et puissance identiques à la face ce qui est rare, même en studio.

Idem pour les subs qui ne font pas qu’une bave d’escargot cinéphile mais complètent fidèlement et sans ramollir le bas et l’infra. C’est ce côté jusqu’au-boutiste de l’univers pro qui fait le charme et la force d’Island comme certainement les autres offres résidentielles de L-Acoustics Creation.

20 dB de contour en hi-fi ? Pfffff…

J’avoue avoir redécouvert Jean-Michel Jarre avec Island, ou mieux encore j’ai écouté *enfin* Jean-Michel Jarre en dehors du cadre désuet de la hi-fi et de la stéréo qui n’a que peu à offrir à une musique qui se nourrit d’espace.

La collaboration entre l’artiste, Hervé Desjardins de Radio France et les équipes de L-Acoustics a accouché d’un bijou sonore. Pareil pour Molécule dont un extrait de la musique montre à quel point elle est composée à 360° et exploite au mieux l’énorme potentiel en termes d’immersion mais aussi le rendu patateux d’Island.

La faim de sensations justifie les moyens

Égoïste, exclusif et addictif, Island est un objet unique et qui embarque, si l’on met de côté la ligne source, l’essentiel de l’ADN de L-Acoustics, et rien que pour ça il a sa place dans nos colonnes. À la question de savoir si ce type de système se vend bien, Franck nous a répondu d’un très habile : « ce n’est pas le but ». Island n’en reste pas moins le porte-drapeau d’une firme dont les produits et la R&D sont assez polyvalents pour aller jouer les chamboule tout aussi dans l’univers feutré de la hi-fi de prestige.

Enfin si vous pensez qu’il s’agit d’un caprice, sachez que c’est bien L-Acoustics que les Américains de C-SEED ont choisi pour équiper leurs écrans repliables de très, mais alors très grande diagonale et prévus pour s’ériger et se déplier en extérieur ou sur les ponts des yachts. Qu’importe le caisson pourvu qu’on ait l’ivresse !

D’autres informations sur le site L-Acoustics

 

Crédits - Texte : Ludovic Monchat - Photos : Ludovic Monchat, L-Acoustics

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