Système de Tracking lumière Follow-Me, Jouer aux caméras et à la souris

Dans le cercle restreint des poursuites automatisées, Follow-Me fait figure d’Outsider. Seul système à ne dépendre d’aucun matériel physique propriétaire, ni console, ni interface ou type de projecteur particulier, ce software hollandais mise tout sur son expérience et la puissance de son tracking 3D informatique.

Le système complet Follow-Me présenté par ESL, utilisé ici avec Wysiwyg pour leurs démonstrations.

L’Idée

Follow-Me est né suite à une demande particulière de Jip Nipius, alors éclairagiste du groupe de pop-rock anglaise Suede sur la tournée de 2013. Ne pouvant utiliser de poursuite traditionnelle, il cherche une solution pour pouvoir utiliser à cet effet les automatiques du pont de face.
Deux hollandais d’expérience, Gary Yates fondateur de Keylight Wireless Event Lighting et Erik Berends propriétaire de la compagnie State Core, volent à sa rescousse. Ils développent une solution si prometteuse que bientôt les demandes affluent.
Après Radiohead c’est Def Leppard, Katie Perry, Pink, Justin Timberlake, Cher, Shania Twain, Pearl Jam, les festivals Glastonbury et PinkPop qui adoptent leur système. Ce système, baptisé Follow-Me, est aujourd’hui entouré d’un certain nombre d’accessoires quasiment indispensables.


Le Concept

Si Follow-Me est si apprécié, c’est tout d’abord grâce à sa compatibilité universelle. Ne dépendant d’aucune marque établie, il fonctionne selon trois principes simples :

le schéma de principe pour deux « poursuiteurs » avec l’assistance de la console lumière.

1- Le cœur du concept est un logiciel 3D fonctionnant sous MacOS dans lequel les positions de tous les projecteurs et les dimensions de la scène sont intégrées.
Comme dans beaucoup de visualiseurs 3D, un marqueur sert ensuite de cible aux spots sélectionnés, transformant leurs déplacements virtuels en débattements Pan et Tilt tangibles.

2- Par la suite, une caméra filmant la scène depuis le grill permettent de calibrer plus finement les positions par rapport à la réalité et de bénéficier d’un support visuel.

3- Des interfaces spécifiques, mais non obligatoires, donnent la possibilité enfin à l’opérateur Follow-Me de déplacer sa cible en fonction de la conduite lumière, et de récupérer éventuellement d’autres paramètres, tel le zoom ou l’intensité.

Si le principe peut sembler un peu plus long à mettre en route, par la nécessité d’avoir des relevés XYZ relativement précis de chaque machine à piloter, il ne présente cependant aucune limite en quantité ou type de projecteurs.

L’Installation

Marc Pioger, responsable technique d’ESL Paris (distributeur du Follow-Me en France), est un interlocuteur privilégié pour découvrir le système en profondeur.

Deux déclinaisons existent. La première, le mode simple, pour utiliser une cible avec trois projecteurs en complète autonomie. La deuxième, plus standard, permet d’utiliser dix cibles, donc dix opérateurs en simultané, un nombre illimité de projecteurs et d’incorporer les informations provenant de la console lumière. C’est donc cette dernière que nous essayons.
Première étape, insérer le plan de feu en 3D dans le logiciel. Cette étape cruciale demande un peu de temps mais fonctionne de fait comme tout logiciel de prévisualisation. Chaque projecteur est « patché » avec sa marque et son modèle, son adresse et mode DMX, ses coordonnées X,Y,Z et ses options d’inversion pan tilt le cas échéant.

Ici le plan de feu est basé sur des Mac Viper Profile, mode Basic. Dans l’avenir, un import CSV sera possible depuis Wysiwyg pour récupérer directement les informations du plan de feu.

La tentation peut être grande d’y placer tous les automatiques du show pour pouvoir, le cas échéant, piocher dedans à volonté. Par expérience, on gagne beaucoup de temps en ne choisissant au préalable que les projecteurs, en face ou en contre, les mieux placés et les moins en douche, pour éviter les phénomènes de « Flip » inhérent à cette configuration. Le logiciel Follow-Me permet alors de contrôler différents paramètres : les Pan et Tilt évidemment, mais aussi l’iris, le zoom, le shutter, l’intensité et les couleurs.

Pouvoir mixer les informations de la console et celles du Follow-Me nécessite de différencier les deux sources. Un protocole de mélange, ou Merge, est intégré dans Follow-Me. Un projecteur ne pouvant avoir qu’une seule adresse, c’est au niveau des univers, en Art-Net, que la différence se fait. Deux patchs d’univers doivent donc être envisagés. Le premier, Univers In, correspond à celui de la console lumière. Le deuxième, Univers Out, est le patch utilisé par le logiciel et correspond aux branchements physiques des projecteurs.

L’utilisation du Follow-Me nécessite donc une vraie méthodologie au moment du plan de feu et ne peut pas vraiment s’ajouter en dernière minute sur une installation existante.
Pour pouvoir passer rapidement d’une gestion des asservis avec la console ou depuis le logiciel de tracking, une librairie de contrôle en 6 canaux est intégrée par projecteur, sur un autre univers, afin de laisser l’opérateur basculer entre les deux systèmes ou donner des limites à certaines fonctions.

Le Pilotage

Deuxième point, choisir ses interfaces de commande. Une simple souris est naturellement peu propice à diriger en réel un groupe de projecteurs en pan et tilt. Alors, pour piloter un ensemble de spots, une cible générée par le logiciel servira de guide aux automatiques sélectionnées.

Chacune des 5 croix de couleur représente une des cibles générées par le logiciel, une par musicien. La caméra offre un plan large depuis le pont de face, afin d’être le plus précis possible.

C’est cette « Target » que dirige le « poursuiteur » à l’aide d’une souris 3D de son choix. Pour ce faire l’écran du Follow-Me mixe l’image provenant d’une caméra et la ou les « Targets » suivant le nombre d’opérateurs réquisitionnés.

Chaque interface se reconnaît automatiquement par le logiciel et possède ses propres réglages.

Si toute souris 3D fonctionne aisément, ESL recommande d’utiliser les interfaces Follow-Me pour plus de confort. Ainsi leur souris 3D se branche en réseau, jusqu’à 10 par ordinateur, et comporte une molette de déplacement X,Y, deux boutons et deux encodeurs rotatifs configurables. Ceux-ci pourront accueillir différents paramètres, iris, zoom ou intensité par exemple, ainsi que des presets de rappel de position.

Une autre interface, le mini-contrôleur Follow-Me, comporte quatre faders, quatre boutons et quatre encodeurs rotatifs, pouvant accueillir d’autres paramètres ou presets. Dans tous les cas de figure, la console lumière garde la main sur tous les projecteurs, et seul le pupitreur peut choisir de donner la main aux opérateurs Follow-Me avec, suivant les options, tout ou partie des paramètres.

Le mini-contrôleur (à gauche) se câble à la souris 3D (à droite) par un câble XLR4. Le petit afficheur permet de repérer et changer sa cible sans lâcher l’interface

Pour aider les « poursuiteurs » différentes astuces ont émergé avec l’expérience et les retours du terrain. Ainsi une limitation XY des projecteurs permet d’éviter certaines zones indésirables hors de la scène ou des mouvements trop compliqués pour les projecteurs trop proches.
Le Continious Beam Size permet de faire varier automatiquement le zoom pour toujours avoir la même taille de faisceaux malgré les déplacements.

Les presets de position servent à rappeler sans viser plusieurs mémoires de positions, les emplacements type des musiciens ou le centre scène par exemple. Pour synchroniser les différents modèles d’automatiques ensemble, et éviter que les plus rapides distancent les autres, des réglages indépendants d’inertie et de vitesse sont regroupés dans le paramètre « Fixture Accélération ».
Un seuil d’intensité maximal peut aussi être défini depuis la console pour limiter les valeurs de dimmer envoyées par les opérateurs Follow-Me. Un temps de fade In et de Fade Out lors de l’activation et du relâchement des projecteurs en mode poursuite peut enfin être réglé par le pupitreur, de même que le choix des cibles à suivre pour les spots, et ce à tout instant.

La Calibration

Les 9 plots sont représentés par les croix phosphorescentes dans la démo-room ESL.

Pour faire correspondre l’image reçue par la caméra physique au plan de feu du Follow-Me, une calibration est nécessaire. Pour ce faire, la procédure demande de dessiner neuf points physiques sur la scène, puis de reporter les distances correspondantes dans le soft.
Après avoir cadré un plan large, le plus à l’aplomb de la scène si possible (idéalement le pont de face), il faut créer une matrice de 3 x 3 points, c’est-à-dire séparer la surface en trois profondeurs (avant-scène, milieu, lointain) et trois largeurs (jardin, centre, cour).
Les distances des intersections seront ensuite renseignées dans le logiciel, avant que le pupitreur dirige chaque projecteur vers les plots pour calibrer précisément le système.

Ils sont représentés ensuite par des points verts dans le logiciel. Ici l’image de la caméra est remplacée par une sortie vidéo provenant de Wysiwyg, afin de simuler une scène complète.

Un montage réel ne pourra jamais être, au centimètre près, exactement le même que sur les plans 3D. En tournée, où quelques ponts peuvent s’accrocher différemment suivant les salles, il conviendra dans un premier temps de bien choisir le point Zéro de référence, puis de modifier les offsets de position et rotation des projecteurs suivant les nouvelles coordonnées.
Enfin, une dernière calibration des projecteurs, à l’iris serré sur le point central, est primordiale pour permettre d’affiner au maximum le système de tracking. En pratique, cela demande environ une heure au démarrage de la tournée, puis vingt minutes une fois la procédure bien acquise.

La Vision

Si tout type de caméra peut s’utiliser, du moment qu’elle possède un port SDI, Follow-Me préconise deux marques, Black Magic et Marshall, pour bénéficier de toutes les fonctions de contrôle. Cette dernière fait partie du kit caméra conseillé. Follow-Me accepte l’utilisation de plusieurs caméras simultanées.

La caméra Marshall CV502-MB, avec son adaptateur SDI-Thunderbolt Black Magic Ultra studio mini recorder et son adaptateur USB / RS485.

A l’abri dans son boîtier custom Touring avec alimentation PowerCON et sortie Neutrik 5 points pour la vidéo, la caméra Marshall avec une rotule 360 ° pour le focus caméra, un collier pour tube de 50 mm et un œillet pour l’élingue de sécurité.


La particularité de la caméra Marshall est de bénéficier d’une vision infrarouge pour observer dans la pénombre l’ensemble de la scène. Il peut être aussi intéressant de compléter cette caméra avec un projecteur infrarouge ou d’équiper le costume de l’artiste principal avec une diode infrarouge. Dans tous les cas de figure il convient de rester toujours concentré sur l’écran, sans interférence visuelle avec un autre angle de vue.

Les Protocoles

Pour s’intégrer au mieux dans la régie des tournées, plusieurs automations sont possibles, dont l’interfaçage en Midi et l’échange d’informations en PSN. Dans le futur, le protocole sACN sera aussi intégré.

Les échanges d’informations de positions et d’orientation permettent…

Le protocole PSN, pour PosiStageNet est en train de s’imposer dans la gestion des éclairages en tracking, mais aussi dans celle du mapping vidéo dynamique et du pilotage des ponts mobiles.
En réception et en émission, Follow-Me échange des coordonnées X,Y,Z pour chaque élément. Ainsi le logiciel récupère les offsets de position des moteurs asservis et modifie en conséquence les tracking.
Il envoie aussi ses propres informations de réglages vers des médias serveurs compatibles ou des consoles lumières.

… ici avec Wysiwyg et Green Hippo, de déplacer une fenêtre vidéo mappée sur la scène.

ESL assure la distribution exclusive pour la France et la prise en main de Follow-Me.
Après une première présentation et un test officiel pour Rock en Seine, sur la scène Bosquet, le système Follow-Me a convaincu plusieurs sociétés pour son potentiel, notamment sur les défilés de mode et les événements sportifs ou événementiels dans les Arénas et les palais des sports.


Les prix publics annoncés sont les suivants :

  • Version Light (Simple) : 4 270 € HT
  • Version Full : 14 700 € HT
  • Interface souris : 795 € HT
  • Mini-contrôleur : 795 € HT
  • Kit caméra Marshall : 1 769 € HT

Et d’autres informations sur le site ESL France

 

Crédits -

Texte & photos : Tristan Szylobryt – Vidéo : ESL

Laisser un commentaire