Cette machine n’est pas sans rappeler le Studio Color 575 High End, un des plus gros succès et standard de l’éclairage de spectacle et de télévision des années 90 à nos jours.
L’Alchemy 5 est un peu comme un hommage à ce projecteur dont les qualités de lumière sont encore et toujours reconnues.
Il offre a priori tout ce qu’un éclairagiste attend d’un faisceau wash au bord doux, si doux grâce à la lentille Fresnel, sa fameuse banane rotative, mais surtout ce que la led, apporte comme nouvelles possibilités. Nous l’avons testé dans le studio d’Impact Evénement.
On regarde ça !!!
[private]
Physiquement, l’engin nous est incontestablement familier par ses proportions mais dans une construction très actuelle et revisitée. La large lentille Fresnel est grande ouverte devant sa petite tête carrée aux arêtes arrondies, montée sur une lyre pivotant sur une base assez plate. Ce projecteur a vraiment une bonne bouille.
Il est équipé d’un moteur à 6 teintes de leds, rouge, vert, bleu, blanc, lime, ambre, et cyan, d’une puissance totale de 450 W. Ce mélange promet des couleurs somptueuses, des teintes très profondes et équilibrées, ainsi que la flexibilité des blancs. Question effets l’Alchemy 5 propose de la couleur à l’infini, un zoom pour ouvrir et fermer le faisceau, deux frosts, et une banane rotative (la célèbre !). On a fait le tour.

Voyons comment est conçu l’engin

La tête
La tête de l’Alchemy 5 se démonte en ôtant ses deux demi-capots tenus par trois vis quart de tour à tête plate. L’ajustement est précis et le remontage se fera sans difficulté.
L’intérieur est simple. Au fond siège la boîte à lumière, c’est-à-dire la platine comportant les leds, fixée sur des radiateurs à caloducs, refroidis par quatre gros ventilateurs.
En sortie, on découvre une roue recevant deux frosts et deux filtres dichroïques, puis vient le beam-shaper entraîné et indexé par une poulie.
Le zoom, qui implique la translation de la majestueuse lentille Fresnel, est monté sur un chariot entraîné par un système à 4 vis sans fin. Chose intéressante à noter, à l’extinction du projecteur, le zoom rentre automatiquement et vient se caler légèrement de travers, totalement bloqué pour le transport.


Juste une chose, malgré les recommandations du manuel qui indiquent qu’il faut nettoyer les filtres et éléments optiques régulièrement, la construction de la tête n’est vraiment pas bien pensée pour faciliter les opérations de maintenance… Tous les démontages sont à envisager avec des tournevis torx de différents diamètres, sans véritablement donner un accès facile au nettoyage ou remplacement d’éléments. Alors certes, il y a peu de raisons d’intervenir en théorie, sauf qu’il faut effectivement nettoyer de temps en temps. Cette opération demandera de la minutie et du temps.
Dans ses petits bras musclés…
Les bras sont recouverts par deux capots latéraux et avec deux carters pour entourer le bas de la lyre. Les capots latéraux se démontent à l’aide de 3 vis torx, et laissent découvrir d’un côté la courroie du tilt, le moteur étant situé dans la base, et de l’autre l’électronique et le moteur de pan. Bonne chose : la courroie de tilt peut être facilement changée. La lyre est blocable en pan et tilt par deux boutons.
La base reçoit deux poignées joliment intégrées au design de l’appareil. Le dessous de la lyre intègre les trous de fixation des supports oméga pour l’accroche. Ces derniers, livrés en standard, seront appréciés des lighteux.


Trois positions par oméga vont pouvoir offrir des écartements différents entre les clamps, ce qui est presque indispensable dans la plupart des cas, notamment quand il faut accrocher un projecteur à un endroit précis et que les entretoises ou autres jonctions de ponts obligent à décaler les projos. Le dessous du socle comporte aussi une barre de fixation pour l’élingue de sécurité.

Le panneau de connecteurs présente une entrée et une sortie True1 pour l’alimentation, (la machine consommant environ 450 W, on peut en linker environ 5, voire 6 sur une ligne limitée à 16 A), une embase RJ45 pour la mise en réseau, des entrées et sorties pour le signal DMX en XLR3 et XLR5 doublées.
Le menu

Toutes les fonctions classiques sont configurables depuis le menu, à commencer par l’adresse DMX, le mode (il y en a principalement 3 aujourd’hui, les configurations ArtNet / sACN, le réglage de la fréquence de balayage des leds (de 600 à 5 000 Hz), l’émulation de l’inertie d’une lampe tungstène, la gestion de transitions de couleurs particulières, etc. L’Alchemy 5 ne manque pas de ressources !
Fonctionnement, lumière, couleurs, et faisceau…

L’Alchemy 5 donne tout ce que la technologie led peut apporter d’intéressant, comme la facilité à gérer la couleur sur tout le spectre, la stabilité de colorimétrie et l’éviction d’une bonne partie de systèmes mécaniques, autour d’un besoin bien précis : projeter le faisceau wash à bord doux devant lequel on s’est tous émerveillé en 1994 et il le fait très bien.
Au plus serré, le faisceau fait un angle d‘environ 10°. Non, ce n’est pas un bâton de 4 ou 5°, c’est un vrai wash pour éclairagiste. Ses 10° lui vont à merveille. Lorsqu’on serre ce faisceau, la lentille frontale se déplace vers l’avant et entraîne avec elle une couronne « coupe flux » évitant certaines lumières parasites. Il en reste un petit peu hélas, mais rien de dramatique. Ce phénomène léger disparaît totalement lorsqu’on ouvre le faisceau.


L’ouverture maximum est de 45°. On peut encore gagner un peu d’ouverture et de douceur grâce à deux frosts, un léger et un plus fort. On doit ainsi a priori sans problème arriver aux 47° annoncés par le fabricant.
Et pour finir, n’oublions pas le fameux beam-shaper, indexable et rotatif, permettant de modeler notre faisceau en « banane » et de l’orienter à volonté. Il peut même être animé en rotation assez rapide, constituant presque un effet dynamique à lui tout seul. Que du bonheur.
Le faisceau est magnifique mais il laisse voir un léger (très léger) trou en son centre, perceptible à partir d’une certaine distance (disons environ 5 mètres), et par un œil particulièrement exercé. Ce phénomène est plus visible sur certains mélanges de couleurs que sur d’autres.
On a même parfois l’impression que le flux n’a pas tout à fait la même direction en fonction des couleurs, ce qui n’est pas le cas en réalité. On l’a remarqué, mais pour dire vrai, ça n’enlève pas grand-chose aux qualités de ce fantastique projecteur montrées dans cette vidéo.
Mesures photométriques

On démarre par le derating, toutes leds à pleine puissance et nous mesurons l’éclairement au centre toutes les 5 mn pour tracer la courbe.
Avec une atténuation qui ne dépasse pas 1,93 % après 5 minutes de chauffe, on peut considérer que le derating est négligeable.
Faisceau serré
Au plus serré, toutes diodes à pleine puissance, nous mesurons un angle de 10,63°, un éclairement au centre de 9 034 lux (8 860 lux après derating) et un flux de 8<900 lm (8 730 après derating).
Faisceau large toutes leds à pleine puissance
Au plus large correspondant à un angle de 45,8°, toutes diodes à pleine puissance, nous obtenons un flux de 9900 lumens (9700 lm après derating). La courbe d’intensité lumineuse est régulière avec cependant un petit creux au centre.
Faisceau large blanc calibré à 5100 K
En regardant les blancs calibrés, on a une impression de plus de puissance, confirmée par la mesure d’éclairement au centre, alors pour en avoir le cœur net, on repart pour une série de mesures tous les 10 cm sur notre cible. Impression confirmée, le flux monte à 11 000 lumens (10 770 après derating) et l’indice de redu des couleurs est excellent : RA de 97. La courbe d’intensité lumineuse a perdu son petit creux au centre.
La couleur. Gestion des 6 teintes de base
En mode étendu, on a accès à différents systèmes qui nous permettent de choisir nos couleurs. Tout d’abord, on peut gérer directement les 6 teintes de leds de la machine : rouge, vert, bleu, ambre, lime, et cyan. Le « lime », pour ceux qui l’ignorent, c’est un genre de vert citron très acide. Pour ce qui est de ce que DTS appelle « cyan », on pourrait dire qu’il ressemble à un 116, soit un bleu vert assez dense, une sorte de « bleu canard ».

Le mélange de toutes ces teintes permet de jouer de façon équilibrée. Mais ce n’est pas si simple, d’autres paramètres interviennent…
Tout d’abord, il vous faudra choisir à partir de quelle température de couleur vous voulez obtenir vos teintes. Un canal de 0 à 100 % permet de façon linéaire et progressive de faire varier votre « blanc de référence » de 1 900 K à 10 000 K.


Ensuite, vous pouvez appliquer un niveau de vert (en background… un peu comme si vous pouviez choisir la tronche verdâtre d’une lampe MSR un peu fatiguée, jusqu’à la neuve et plus encore), permettant d’aller jusqu’à un « minus green » variable à souhait.
Deux couleurs additionnelles, cette fois-ci à base de filtres dichroïques sont disponibles sur la roue qui comporte également les frosts. Il s’agit d’un Deep Blue et d’un Deep Red placés dans le spectre aux frontières du visible.
Globalement et en détail, les teintes obtenues sont absolument superbes. Notamment les rouges et ambrés qui n’ont jamais encore été vus avec cette patate sur un faisceau de ce type ! Quant aux blancs, vous pouvez TOUS les réaliser. Dans toutes leurs petites nuances, et avec toutes ces subtilités techniques qui ne se voient même pas à l’œil, mais dont le résultat à la caméra fera probablement la différence.

Autre méthode de couleurs : la bibliothèque de gélatines
L’Alchemy 5 donne accès à une banque d’environ 200 références de gélatines LEE (sur deux canaux pour le mode étendu, environ 100 par canal, une seule des deux pages en mode standard), appelables directement par une simple valeur DMX. Une bonne librairie s’impose, ou alors on imprime le listing de la bibliothèque et on rentre les valeurs !
On a joué un moment avec ces banques de couleurs. Elles sont visiblement très proches de la réalité. La réalité étant très subjective, une gélatine donnera une lumière complètement différente suivant la source, l’état de la lampe, (l’état de la gélatine même !) la gradation de la lampe en question, bref… Un numéro de gel LEE, n’est pas absolu ! Mais avec l’Alchemy 5, vous pouvez indiscutablement reproduire ce que vous voulez.
Un canal vous permet également de gérer le fondu de transition entre les teintes, et un autre vous permet de gérer le fondu dans le mode gélatine et aussi le fondu entre une gélatine et une couleur du mixage des 6 couleurs de base. C’est plus que complet. Trop probablement même… Mais ça existe.
Utilisation et canaux DMX…
5 modes sont disponibles pour piloter notre Alchemy 5.
- Le mode « CCT », en 20 canaux, donne accès à la totalité des fonctions de la machine, mais ne permet de choisir que les couleurs des bibliothèques de gélatines LEE.
- le mode « Expo » à 13 canaux est un mode assez similaire mais simplifié.
- Les 28 canaux du mode « Advanced » donnent libre accès à tout. Ce mode vous permet d’agir sur le color-mixing des 6 teintes avec les différentes options de couleurs possibles… Mode complet, mais très complexe. Il peut s’avérer plus simple si vous utilisez une console très avancée qui va faire le travail à votre place (sous réserve d’une librairie plus qu’exemplaire), sinon ça peut vite devenir un casse-tête.
- Le mode « basic » est sur le même mode opératoire que le « Advanced », mais supprime quelques fonctions.
- Un cinquième mode, fraîchement arrivé, nommé « CMY Emulation », permet de gérer la machine comme si vous aviez un projecteur basique en CMY, avec toutes les facilités que ça implique. Vous avez tout de même la possibilité de jouer en même temps avec la variation de la température de couleur, le minus green, et le rappel des bibliothèques de couleurs LEE. Avec ce mode, tout le monde s’y retrouve de façon simple et en exploitant la totalité du potentiel de la machine.
Gradation, des courbes exemplaires
L’Alchemy 5 propose 4 courbes de dimmer. « Quadratic », « Gamma 2.2 », « S-curve » et « Linear ». Les courbes que nous avons tracées sont remarquables. Rarement (pour ne pas dire jamais, à moins que ma mémoire ne me fasse défaut) je n’ai obtenu des courbes aussi propres et limpides.


La linéaire, est juste une diagonale quasi parfaite, avec ce qu’il faut en bout de course pour éviter un « accident » visuel, le quadratic est également un exemple…


Le strobe est ultra-efficace bien entendu puisque aucun élément mécanique ne vient prendre du flux au passage.
Déplacement de la lyre
Ce joli faisceau se déplace bien évidemment ! Il n’est pas ultra-vif mais suffisant pour permettre un positionnement parfait, et permettre de beaux effets de déplacement, sans à-coups, et avec peu de bruit. L’ensemble du projecteur est d’ailleurs assez silencieux globalement.
Gestion du bruit
L’Alchemy 5 bénéficie de deux réglages de ventilation. Un réglage « operating mode », et un réglage « fan ». Ils, peuvent interagir l’un sur l’autre suivant un diagramme bien précis.
– Le réglage « Fan » : Le mode « Constant » permet d’avoir toujours le même niveau de ventilation quelles que soient les conditions de travail des sources led. Le mode « Automatic » assure un déclenchement autonome de la ventilation, c’est-à-dire à partir du moment où la température des sources atteint 40°.
– Deuxième réglage : « Operating mode ». En « Operating Mode », on a le choix entre un mode « standard » et un mode « silent ». En standard, ce qui va faire la règle est le réglage que vous aurez choisi dans la configuration « FAN ».
En mode « Silent », la machine va réduire un peu la vitesse de déplacement pan, tilt maximum possible et réduite la ventilation en diminuant la puissance envoyée aux leds, y compris en optimisant la configuration « FAN » que vous aurez choisie. Ainsi, elle se met dans une situation où elle va de fait être assez silencieuse, au niveau ventilation, mais aussi au niveau de tous bruits mécaniques.
En conclusion
L’ALCHEMY 5 est une fantastique petite machine qui vient fournir ce que certains éclairagistes attendaient depuis bien longtemps, un vrai faisceau wash qui revient à l’essentiel et qui, faisant fi des modes, utilise les dernières technologies pour délivrer une lumière magique.
Malgré tous les clins d’œil au « classique » du genre, DTS apporte une machine plus qu’actuelle qui a toutes les qualités, y compris le rapport qualité prix, pour devenir un incontournable. Une machine offrant un faisceau remarquable, des couleurs magnifiques, des blancs sublimes et malléable à souhait…En tout cas moi j’en veux !!!
On aime :
- La machine
- Le faisceau
- Les couleurs
On regrette :
- L’accès difficile pour l’entretien
Les tableaux
[/private]