
Le chanteur M. (Matthieu Chedid pour les intimes) célèbre ses 20 ans de création avec la sortie de son dernier album “Lettre infinie”. L’occasion pour lui d’offrir un moment unique et intime à son public en se produisant dans la petite salle du Cirque d’Hiver. Un lieu baroque et chargé d’histoire construit en 1851 et appartenant aujourd’hui à la famille Bouglione.

Jérémy Bargues, l’éclairagiste de Matthieu, a dû jongler avec le kit de la salle et faire des choix personnels comme demander à MPM, qui fournit l’équipement, d’ajouter des BMFL Blade, des Mac Aura, des tubes led AX1, des barres de leds X4Bar et avec un système de poursuite RoboSpot pour commander un BMFL WashBeam.
Cette série de concerts était une étape laboratoire de création afin de tester, discuter et retravailler une sorte de “pâte à modeler créative”, en prélude à une tournée de plus grande envergure en Zénith et Arena. Elle a démarré en mars et nous sommes conviés à couvrir les dates de la Seine Musicale. Dans un article à paraître on détaillera donc le kit lumière de cœur de Jérémy, l’ajout de sublimes écrans à leds et les automates gérés en midi via Ableton Live.


Le cirque d’hiver un labo de création dans une salle à part
Sans plus attendre, en piste avec une petite vidéo pour vous mettre dans l’ambiance du spectacle du Cirque d’hiver.
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SLU : Jérémy, quelle est ton actu récente depuis la tournée Mojo ?
Jérémy Bargues : Il y a eu Charlie Winston, HollySiz, la tournée de “Lamomali”, celle de la famille Chedid, Jain sur sa première tournée, Raphaël et Indochine à venir pour cet été en festivals. Avec Matthieu, cela va faire sept ans que nous collaborons.
La première tournée c’était pour son album “Îl” avec Dimitri Vassiliu. Puis j’ai continué avec Matthieu pour “La Famille Chedid”, ensuite pour “Lamomali” et aujourd’hui, la tournée de son dernier album, “Lettre infinie” qui célèbre aussi ses 20 ans de création.

SLU : Quelles sont vos habitudes de travail avec Mathieu ?
Jérémy Bargues : Les dates au Cirque d’Hiver sont comme un grand labo où les choses changent un peu tous les jours. Le soir on enregistre le spectacle en plan large pour pouvoir en discuter le lendemain, partager nos ressentis et prévoir les changements pour le spectacle qui suit. Ce tri se fait afin d’arriver à une tournée des Zéniths où l’installation sera complètement différente mais reprendra tout de même des éléments de cette première série de concerts au Cirque. Au final, c’est vraiment un travail à plusieurs mains.

Alain Millon et François Causse ont collaboré à la partie automate. Au niveau de la scénographie, les idées de base viennent de Matthieu et chacun rebondit que ce soit au niveau du son, de la lumière, de la mise en scène. Chacun apporte sa petite touche. Personnellement, ce qui m’impressionne chez lui c’est sa capacité à se renouveler, avec un Gimmick marqué pour chacun de ses albums, qu’il soit visuel ou musical.
La tournée “Lettre Infinie” fêtant les 20 ans du baptême de M, le show reprend un peu tous ses petits objets “Gimmick”. On retrouvera donc la guitare rose, les lunettes de Peggy Guggenheim, les lunettes à leds, la perruque de Machistador, les lunettes miroirs de la tournée “Îl” (à Leds aussi d’ailleurs) et enfin la veste à rayures avec la coiffe en or du dernier album.

SLU : J’imagine que ce choix du Cirque d’Hiver a dû constituer un petit challenge d’un point de vue technique mais aussi artistique. Quelle a été votre approche de ce lieu atypique ?
Laurent Chéné : Le Cirque offre un caractère et un rapport au public qui intéressaient Matthieu, d’autant qu’il est parti sur un concept solo à la Rémy Bricka. Ses musiciens sont donc des automates.

D’autre part, le show a pour particularité de devoir s’intégrer à l’infrastructure technique existante. Il nous fallait donc utiliser le kit lumière du Cirque d’hiver. C’était le deal de départ car leur propre spectacle se produit du samedi au lundi et nous prenons la suite du mardi au vendredi et ce pendant deux semaines. On ne pouvait donc pas faire une alternance sur toute l’installation matérielle pour d’aussi courts délais.
Jérémy Bargues : En effet, passer des Claypaky Profile 1500 à des BMFL les aurait obligés à refaire toute une programmation de show, ce qui était inenvisageable au niveau timing de montage et d’encodage. J’ai donc utilisé le matériel en place avec quelques ajouts dont 4 BMFL Blade dont un en accroche plein centre pour projeter des gobos custom.

Le parc de Mac Aura a également été augmenté pour disposer de sources de proximité pour les instruments automates et bénéficier de petits aplats de lumière.
Il y a aussi des petits Par 16 installés sur la batterie qui est déplacée pendant le spectacle, barres à leds motorisées X4Bar, des tubes led AX1 pour cercler la piste, et enfin un RoboSpot afin de suivre Matthieu même dans les angles morts de la scène.
Des BMFL Blade en ajout pour s’approprier le kit du cirque d’hiver
SLU : Comment as-tu utilisé les BMFL Blade et pourquoi ce choix précisément ?
Jérémy Bargues : Je les avais déjà utilisés sur la tournée “Lamomali” et il me fallait de la puissance et de la polyvalence pour pouvoir répondre aux différents besoins. En plus, je ne pouvais ajouter que quatre appareils du fait du manque de place.

Celui qui est accroché plein centre a également pour but de texturer la piste avec des gobos que j’ai fait fabriquer pour illustrer certains des titres chantés par Matthieu. Le sol de la piste étant blanc et de forme circulaire j’y ai tout de suite vu une projection de la sérigraphie du disque “Lettre infinie”.

Ça permettait aussi d’emmener l’ambiance de Matthieu dans ce lieu. La roue d’anim du BMFL Blade est mortelle, on peut mettre des effets ou faire onduler les projections. Pour le titre “L’autre Paradis”, je projette une lune et ça fonctionne très bien.
J’en ai également deux à contre pour les entrées et sorties des invités ou pour un contre douche sur l’artiste car il y a une espèce de fosse d’orchestre qui ne m’a pas permis d’installer un vrai contre. Et enfin un dernier est installé au sol derrière le gong.
SLU : Tu les as utilisés en découpe ?
Jérémy Bargues : Oui, sur le piano, et les automates. Pour moi c’est un produit super propre et efficace, je n’en vois pas d’autres aujourd’hui qui puissent rivaliser. J’en aurai 30 dans le kit de la tournée Zénith.

SLU : Et pour les Mac Aura comment s’est faite ta réflexion ?
Jérémy Bargues : On a choisi d’ajouter des Mac Aura à leur kit qui en comprenait déjà pas mal et surtout au sol pour garder une homogénéité globale. C’est d’autant plus important pour les Wash. J’aime le Mac Aura, il est petit avec une ouverture idéale pour éclairer les totems et la patate est suffisante pour les deux-trois effets que je voulais faire. Je l’utilise depuis longtemps, il est efficace en source proche, notamment pour prendre les musiciens.
SLU : Ils ne se plaignent pas d’avoir une source led en proximité ?
Jérémy Bargues : (rire) Apparemment ça va, mais je les dose bien sûr et la lentille est plutôt pas mal. On peut mixer le faisceau et l’effet Aura pour moins leur éclater la tête. Pour moi le duo Mac Aura/ BMFL est le kit de base même si je cherche encore le wash ultime.

SLU : Le RoboSpot pour une scène centrale est une vraie solution ?
Jérémy Bargues : C’est l’outil parfait pour le show parce que Matthieu bouge beaucoup. Il fait des tours de piste, il va dans le public… J’en aurai deux sur la tournée des Zéniths à la face et en contre. Il y a un très court phénomène de latence de 150 millisecondes au niveau du flux vidéo mais Laurent, qui n’avait jamais utilisé de RoboSpot, l’a pris en main très facilement.
SLU : D’où viennent ces tubes qui cerclent la piste ?
Jérémy Bargues : Ce sont des tubes led Astera AX1. Ils sont complètement autonomes en énergie car ils sont sur batterie et je les contrôle en DMX sans fil par la GrandMa. Il y a un petit matriçage qui patche les cellules en 16 leds RGBW par tubes.

SLU : Tu prends le risque du DMX sans fil ?
Jérémy Bargues : Ces tubes intègrent un récepteur LumenRadio plutôt performant. Je les ai utilisés sur d’autres tournées et ça fonctionne bien. Le seul problème avec le DMX sans fil c’est qu’on ne peut pas faire du flash super-rapide parce qu’on perd quelques signaux parfois ce qui créé une sorte de traînée. Pour le Cirque d’Hiver j’ai réfléchi au placement pour éviter que les signaux ne soient brouillés.
Ça marche tellement bien que les émetteurs sont simplement installés en ligne sur 4 m de long. Ils sont en plus autonomes en énergie. Je les choisis car il fallait pouvoir faire le tour de la piste avec de la puissance sans que ce soit un enfer en termes de câblage. Les batteries sont mises en charge tous les soirs mais elles pourraient tenir 2 à 3 shows consécutifs sans les recharger (en supposant de ne pas faire de balances et de répètes).

SLU : Comment est gérée la lettre lumineuse que Matthieu utilise pour s’auto-éclairer ?
Jérémy Bargues : C’est un système totalement autonome conçu par Visual Système, qui avait déjà conçu les lunettes à leds de la tournée précédente. C’est d’ailleurs le même système qui a été mis en place. Un petit interrupteur fait contact et allume les LED quand l’objet s’ouvre en laissant passer le courant. C’est Matthieu qui gère son propre éclairage, il doit simplement regarder constamment la lettre pour que le public ait cette sensation de lecture.
SLU : Tu pupitres sur GrandMA3…

Jérémy Bargues : Ben oui, à un moment faut franchir le pas, mais comme tu le sais, elle tourne encore avec le soft du 2 en attendant que le 3 soit stabilisé. J’essaye de me décharger de plus en plus du côté technique pour me consacrer à l’artistique surtout pour un projet comme celui-ci où l’artiste demande beaucoup de présence.
Pour l’encodage, JC Aubré m’a donné un coup de main et parfois, pendant les répètes, Laurent Chéné prend le relais aussi à la console. C’est bien d’avoir quatre mains pendant les retapes où tout rebondit sur tout. J’avais aussi ma vieille console une MA Light Commander 12/2 avec des accès directs. C’est pratique en création pour tester certaines choses rapidement.

Éclairer Matthieu
SLU : Comment gères-tu la face, et les contres dans ce lieu circulaire ?
Jérémy Bargues : C’est assez particulier. Les contres par exemple, on oublie, mais ce qui est spécifique au Cirque d’Hiver sera possible en Zénith, d’autant plus que j’adore travailler les contres au sol et avec Matthieu on s’entend bien à ce sujet.

Le RoboSpot est essentiel car même s’il a été pensé comme un contre douche, il devient un contre pour le bout de la piste ou une face quand Matthieu se retourne pour le public situé à l’opposé dans la salle. En plus de ce système nous avons accès à deux poursuites Victor Robert Juliat pour assurer une couverture complète de l’espace.

SLU : Est-ce que cette scène circulaire a généré d’autres challenges ?
Jérémy Bargues : Le Cirque est un challenge en soi pour l’avoir pratiqué déjà deux fois. C’est tout de même une salle particulière avec une scène centrale et circulaire dont on essaye de se dégager un peu en enlevant des couches au fur et à mesure des passes.
L’objectif étant de ne conserver que ce qui est essentiel en lumière toujours dans cette idée de seul-en-scène. Il faut donc chercher à recentrer le focus sur lui avec une logique identique pour les automates. Je ne sais pas si j’y arrive mais j’ai vraiment essayé de créer quelque chose de nouveau en plus de jouer avec ce lieu qui est magnifique.
SLU : Cette ambiance cirque sera-t-elle reprise dans les Zéniths ?
Jérémy Bargues : Beaucoup de choses commencent à s’écrire ici donc des éléments seront semblables du point de vue de la mise en scène et du déroulé du spectacle. C’est le côté laboratoire de création dont je te parlais. Par contre, la configuration scénique n’étant pas la même, d’autres éléments seront apportés comme des VL10 Vari-Lite et des écrans led.

Conclusion
Jérémy m’a impressionné dans l’approche unique de son éclairage au Cirque d’Hiver. Essayer de se détacher de la salle mais aussi l’utiliser pour créer des tableaux intimistes et poétiques. Un grand écart en plus d’être un challenge. Il a su traduire les envies de Matthieu Chedid et avec sa baguette magique (c’est-à-dire des BMFL Blade) s’approprier l’espace. Les gobos fabriqués pour l’occasion se prêtent magnifiquement bien à la piste ronde. Notamment quand ils projettent une surface de lune, très poétique, pendant le titre “L’Autre Paradis”.
Les tubes Astera AX1 vivent tout autour de la scène et sous les projections de fumée. Un cerclage qui complète parfaitement les effets des Mac Aura. Ces derniers qu’ils soient dirigés en proximité vers les musiciens automates ou utilisés pour des effets sont pêchus et petits, pratique pour se faufiler dans une salle déjà bien chargée. Le show évolue depuis une ambiance seul-en-scène en passant par un joli cœur lors du duo avec sa fille Billie Chedid, prête à écrire son histoire comme elle le chante elle-même.

Puis les ambiances se succèdent. Parfois un tableau aux couleurs chamarrées en hommage au cirque, puis un autre très graphique et géométrique pour “Le complexe du Corn-Flakes” et surtout une apothéose Disco où le public est invité à danser sur scène avec -M- au rythme de solos improvisés à partir d’un de ses titres les plus connus, “Machistador”. Une parenthèse survoltée où tout le monde se lâche. Génial !
L’avant-dernière date de cette série au cirque d’hiver a été un prélude à la tournée ayant démarré en mars 2019. Nous avons été conviés à couvrir les dates de la Seine Musicale, Nous en profiterons pour interviewer Jérémy sur son Kit lumière et sa collaboration avec les écrans à leds ainsi que sur la gestion des automates via un réseau midi relié à un Live Ableton. On chuchote que MPM qui a fourni l’équipement a acheté les derniers hybrides VL 10 Vari-Lite pour Jérémy, et que le chanteur sème régulièrement sa poursuite tellement il court partout. Ça promet !

Les Plans




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