A la fin du mois d’août dernier nous sommes allés sur Rock-en-Seine voir et écouter le nouveau système Line Array moyen format d&b introduit en début d’année, d’une part en diffusion principale sur la petite scène Pression Live et d’autre part en complément du J sur la scène principale, en out fill, histoire de se rendre compte si, comme le dit d&b, sa signature sonore est identique au J. Et, pour ce faire, nous avons assisté au concert de Placebo dans la soirée du jour d’ouverture du festival.
Accueillis par Xavier Cousyn et Pierre Scalco du support technique de d&b France qui viennent épauler les équipes de On Off pour Rock-en-Seine, nous commençons notre périple de visite des scènes par le dessous de la scène principale agrandie pour cette édition de Rock-en-Seine et où est rassemblée toute l’amplification et le contrôle de la diffusion de façade et des retours de scène (plus la régie retour), pas moins de 24 racks de trois D12 (Z5310) reliés en bus CAN pour le contrôle et le paramétrage via le logiciel de contrôle à distance R1, soit par des passerelles USB/CAN R60, soit R70 (Ethernet/CAN).
Sous la grande scène, six blocs de 2 x Q1 ont été placés en nez de scène derrière un tulle acoustiquement transparent pour la proximité, sur toute la largeur de la scène.
Pour le lip fill, On/off a placé six piles de 2 x Q1 également réparties sous le nez de scène et cachées par un tulle acoustiquement neutre. Elles surplombent les piles de 2 Jsubs (18) placées à l’extérieur au bas de la scène. Cette disposition permet de mieux couvrir la proximité sans toutefois « matraquer » l’auditoire. La console retour est une Heritage 3000 et à la régie de façade située à environ 60 m de la scène, les ingés son des différents groupes auront à disposition, sur les trois jours du festival, une Heritage 3000, une Profile Avid, une PM5D Yamaha ainsi qu’une Pro6 Midas.
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On Off, prestataire historique attitré de Rock-en-Seine
De gauche à droite à cour de la grande scène, nos interlocuteurs : Xavier Cousyn (support d&b France), Gilles Gautrois (Directeur technique On-off), Guy Vergnol (Directeur commercial On-Off) et Pierre Scalco (support technique d&b France). Seules deux boîtes V sont nécessaires pour déboucher ce côté.
Sortis du dessous de la scène où Xavier et Pierrot nous ont expliqué le positionnement du matériel en place pour la grande scène, nous rejoignons l’équipe dirigeante de On Off avec Guy Vergnol (Directeur commercial), Gilles Gautrois (Directeur technique) et José Tudela (le Boss). On Off est depuis l’origine du festival, la société de prestation attitrée de Rock-en-Seine pour le son.
SLU : Guy, peux-tu nous brosser un tableau rapide de cette édition et de ce que vous mettez en place ?
Guy Vergnol : C’est le 10e anniversaire de Rock en Seine et On-Off fêtera ses 20 ans en janvier 2013. Pour cette édition, une quatrième scène a été ajoutée, et même une cinquième plus petite tout au bout du parc qui est aussi en d&b car on fait l’ensemble de la diffusion du festival.
SLU : Pour l’occasion tu as donc pris du complément ?
Guy : d&b France et Allemagne évidemment nous aident en tant que partenaire, notamment au niveau du V parce que c’est un nouveau système. J’ai en plus sous-traité du J chez Fa Musique et Audio Pro Diffusion car ça fait beaucoup de boîtes pour le gros système. Outre les scènes, on a aussi les conférences de presse, la salle VIP et le camping à pourvoir.
SLU : Combien de J et de V avez-vous mis en place ?
Côté jardin de la grande scène. Au fond la ligne de 10 V de renfort latéral puis la ligne de 20x J de la dif principale (14 x J8 en haut et 6 x J12 en bas). A gauche une grappe de 8 x C4 (coaxiales 12’’) pour les retours de scène latéraux. Noter la caméra télécommandée pour alimenter les écrans géants à Led des concerts.
Guy : Pour le J, ici, sur la grande scène on en a 40 à la face et 16 en délai derrière la régie, soit 56 boîtes et en face sur la scène 2, il y en a 28.
Pour le V, il y en a 32 à la scène 4 (Pression live), 16 à la scène de l’industrie et ici 18 (10 + 2 + 6) pour couvrir les côtés (out fill). On en a acheté 18 pour l’essayer parce que 18 ça correspond aux besoins de salles parisiennes comme l’Olympia ou le grand Rex. C’est un système qui est parfaitement adapté pour ce genre de salle.
SLU : Il comble donc un manque le V ?
Guy : Le J, on arrive à l’utiliser à l’Olympia mais ce sera plus facile maintenant à faire en V.
En revanche le Q était est un peu plus modeste et moins adapté au rock, pas suffisant. Le V est parfait. C’est le bon compromis.
SLU : Les 3 dB de gain annoncés (par rapport au Q), tu les retrouves ?
Pierrot : Entre chaque système maintenant il y a effectivement trois dB. Entre le Q1 et le J il y avait 6 dB. d&b est venu placer le V entre les deux.
SLU : Ça se passe comment pour On Off ?
Guy : On ne se plaint pas. On a bien travaillé cette année et on a des projets jusque mi-2013.
SLU : Tout en concert ? Rien en événementiel ?
Guy : Oui, tout en musique, l’événementiel on en fait mais rarement. On a des contrats, par exemple avec la RATP pour 3 ans, donc nous ne sommes pas fâchés avec la convention. Mais notre marché c’est la musique, le plus possible les tournées. On repart avec Tryo, avec M’Pokora et avec Benabar dans des salles type Olympia où nous mettrons du V.
Le V, un système qui tombe à pic
SLU : Donc le V tombe à pic pour vous ?
La ligne côté jardin de 16 x V (12 x V8 et 4 x V12) de la petite scène Pression Live.
La ligne de V côté pile. Les quatre boîtes du bas sont des V12 dont les trois dernières sont calées avec le Preset Arc (toutes les autres avec le preset ligne). On voit bien les poignées arrière dont nous parlait Pierrot.
Guy : Oui, parce qu’effectivement on a 2 tournées qui partent en J, donc le système V va assurer notre quotidien hors tournée. Tout ce que l’on fait en V maintenant, on le faisait en Q avant. Sur un petit Zénith on mettait 16 ou 24 Q. Ça marchait bien mais ce n’était pas sérieux d’un point de vue logistique. En V on sera beaucoup plus à l’aise et plus à propos. Nous avons été les premiers à l’avoir en France. Il a même fallu que Lulu (Didier Lubin) en pique aux américains. Il est léger et facile à accrocher.
Xavier : La directivité est bien mieux contrôlée que sur la série Q. Héritée du J, voire même un peu meilleure. A 80°, elle est mieux contrôlée jusqu’à 250 Hz. Il y a des ouïes acoustiques qui permettent de maintenir la directivité horizontale plus bas en fréquence. La série Q s’arrêtait à 500 Hz. Après on a une atténuation de 16 dB avec l’impression que le son s’arrête.
SLU : Peux-tu nous préciser les angles d’ouverture horizontale ?
Xavier : Les mêmes que ceux du J : 80° pour le J8 et le V8. Le V12 pour le downfill au sein d’une ligne ouvre à 120° avec une directivité là aussi maintenue jusqu’à 250 Hz.
En revanche il y a une grosse différence de poids entre le V et le J. Le V est bien plus léger : 34 kg pour une boîte contre 66 kg pour le J.
Pierrot : Je l’ai monté tout seul tranquillement en une demi-heure pour un côté. On se fait moins mal au dos (rire).
SLU : Quelles sont donc ces améliorations au niveau de l’accroche ?
Xavier nous montre les améliorations sur le système d’accroche du V, notamment la collerette de préhension ajoutée sur les goupilles
Xavier : Au niveau de l’accroche, c’est une amélioration du J.
Pierrot : Sur le devant, le front link, le J a une pièce toute lisse qui n’est pas pratique à attraper avec les doigts surtout quand tu portes des gants. Une pièce pas facile à sortir. Sur le V, cette pièce a un relief qui permet de coincer ton doigt dessus.
Et le crochet arrière qui avant était tout bête a maintenant une forme spéciale qui permet de le ranger dans la dernière boîte quand il ne sert pas. Il y a aussi deux poignées à l’arrière qui facilitent l’accroche quand tu es tout seul, et même à deux.
Tu accroches les boîtes à l’avant et quand elles sont verrouillées par l’avant, tu laisses pendre la boîte, tu la prends par les poignées, le crochet pend, tu as réglé ton angle et tu lèves l’arrière grâce aux poignées. Ce sont des petits détails de confort qui te font gagner un peu de temps.
On Off a choisi de les ranger par 3 verticalement. Donc tu viens avec ton bumper, tu accroches les trois premières enceintes, tu lèves, t’amènes la caisse en dessous, tu as bien sûr préparé tes angles avant avec les pins. Quand le bumper lève les enceintes, les crochets s’accrochent automatiquement. Et là, tu gagnes du temps au montage.
SLU : Et pour ce qui concerne la couleur sonore du V ?
La ligne de six V retardées en rappel latéral pour couvrir le côté droit dans la profondeur.
Pierrot : C’est pareil que le J. Pour faire de l’out fill (renfort latéral), le V est parfait. C’est un trois voies pareil mais passif. Le Q1 le faisait presque bien mais avec un aigu un peu différent.
Avec le V on a la même couleur dans l’aigu. Tu passes de l’une à l’autre sans pratiquement t’en apercevoir. Pour de l’out fill, tu n’as pas besoin de faire aussi fort. Tu peux mettre une petite banane de V. C’est plus facile à régler. Et avec un ampli tu pousses quatre boîtes, autre économie importante.
Le système V a son sub, le Vsub. Il intègre deux HP contre 3 dans le Jsub. Il est également cardio mais passif. En terme d’économie d’amplification, il est intéressant là aussi car il faut un ampli pour alimenter un J sub alors qu’un même ampli « pousse » 4 Vsub (2 par canal). Et il s’accroche aussi. Sur la grande scène par exemple pour 16 têtes et 6 subs, on utilise 6 amplis. Dans un camion de 20 m3 tu peux ranger toute la diffusion d’une sonorisation de plein air.
La ligne de 12 x 2 VSub à la scène Pression Live (Rock & Electro). Sur la grande scène, c’est le même arrangement mais avec 18 x 2 JSub ! On se rend compte de la déclivité.
Sur la grande scène, l’année dernière on avait 20 m entre les stacks. Cette année on a 26 m. C’est pour ça que l’on a remplacé les Q7 par des Q1 parce que le cône d’ombre était plus important. Et pour éviter de matraquer les gens avec les basses, on a étalé les piles de subs. L’année dernière nous avions 12 piles de 3 subs et cette année 18 piles de 2 subs. On est plus large, on répartit mieux sur le terrain et il y a moins de pression de basse à proximité. Et comme il y a de plus en plus de monde sur les côtés, on a agrandi la banane sur l’extérieur. L’année dernière on avait 3xQ1 et cette année on a 10xV sur le côté.
José Tudela : Depuis trois ans Rock en Seine est au maxi de la fréquentation possible du site. Je pense qu’on est pas loin des 30 000 personnes quotidiennement.
Didier Lubin (Lulu), Directeur de d&b France, vient nous rejoindre.
Didier Lubin (Lulu pour les intimes … et les autres) accompagné d’Eva (à gauche) vient nous rejoindre. Ça tombe bien, on a quelques questions à lui poser.
SLU : Il démarre bien le système V ?
Lulu : oui, en France tout le réseau en a acheté. On a doublé les prévisions. Je pense que c’est un système qui va rehausser le standard des petits systèmes. Pour nous, c’est une réponse aux gens qui ont sorti des systèmes à bas coût pour concurrencer la série Q.
On remonte le standard au niveau qualité et rendement. On avait besoin du V pour faire la jonction avec le J. Les sociétés de sonorisation étaient en attente d’un système qui leur permette de faire des applications un peu plus grosses sans avoir à plonger dans un gros système, en général difficile à amortir en coût.
Une pile de deux VSub cardio (800 WRMS/3200 W crête sous 8 ohms) vue de dos. Un canal de D12 peut alimenter deux VSub constitués d’un 18’’ et d’un 12’’ (arrière). La ligne de 12 x 2 VSub nécessite 6 x D12 en amplification.
Le V est raisonnable en termes de coût et permet de franchir une étape. Accéder au cardio sans que ça coûte les yeux de la tête. On attend un ampli qui va nous permettre de réellement exploiter les possibilités du V. Le sub est prévu pour sortir 137 dB (SPL) mais avec le D12 il est limité à 133 dB.
De même, les «tops» sont prévus pour sortir 142 dB et actuellement avec le D12, ils ne sortent que 139 dB. Quand tout sera optimisé on aura un réel 40 % d’économie.
Peut-être que cet ampli sera présenté en avant-première au SIEL et en présentation officielle à Francfort. Il existe mais il est en test actuellement. Le V sonne vraiment comme un gros système.
SLU : Peux-tu nous donner quelques chiffres ?
Lulu : D&b a vendu 6000 boîtes de V entre fin mars et fin août, nombre qui ne concerne que des tops V8 et V12. Et encore, ils n’arrivent pas à produire. Si on parle en chiffre d’affaires, en 2011 celui-ci avoisinait 48 M€ et la projection pour 2012 se situe entre 54 et 56 M€. Pour Rock-en-Seine, on a fourni le système V de la scène Pression Live. Au départ étaient prévus les C3 et C4 mais comme nous avons un nouveau système, nous avons décidé d’y aller à fond et d’aider On/Off.
SLU : C’est quoi la contrainte de la scène Pression Live?
La scène Pression live vue de la régie. On voit bien les difficultés liés à la configuration : mur à droite et forte déclivité à gauche. L’angulation des boîtes du bas à jardin est un peu plus prononcée avec un boost de 3 dB par rapport à celles à jardin.
Pierrot : Pour la diffusion, c’est le mur à proximité et les immeubles d’habitation mais le plus gros problème de ce lieu, c’est le dénivelé du terrain : environ 1,40 m entre les deux ailes de la scène. La difficulté a été de trouver un réglage de bananes à peu près identique pour que partout sur le terrain il y ait la même couleur sonore.
Mettre les bananes au même niveau pour qu’un auditeur entende les mêmes boîtes.
Après il y a un trou à combler plus important d’un côté que de l’autre. On n’a pas tout à fait les mêmes angles sur les boîtes du bas.
En pratique, on a fait deux bananes différentes et cherché l’endroit où on a à peu près les mêmes courbes avec les deux bananes et les différences de hauteur.
Le plus dur était de ne pas trop modifier les angles au risque de ne pas entendre les mêmes boîtes au même endroit. Les boîtes du bas sont boostées à +3 dB d’un côté, celui en contre-bas. Mais sur la ligne les différences d’angulation d’une banane par rapport à l’autre sont ridicules : 1° ou 2° peut être.
On est partout sur le preset ligne sauf pour les trois boîtes du bas où on a choisi le preset arc*. Ce qui est important, c’est que les bananes soient le plus proche possible en réglage pour avoir le même son.
Comment ça sonne ?
A l’écoute du groupe Electro qui se produit sur cette scène avant que nous rejoignions la grande scène pour assister au concert de Placebo, nous constatons que le V a du coffre comme un gros système, le son est bien plein et le système bien réglé, on ne perçoit pas de trou en se déplaçant d’un bord à l’autre dans la profondeur, preuve que les réglages de Pierrot sont bons. Le DJ s’en donne à cœur joie et monte de plus en plus, à telle enseigne que l’ingé son de façade réduit presque d’autant au fur et à mesure. Le V encaisse bien et ne bronche pas, même à très haut niveau, il n’y a pas de coloration.
L’ingé son de Placebo aux manettes de la Profile Digidesign (enfin Avid) durant le concert. Comme en témoigne le contrôleur de niveau à la régie (à 60 m), ça envoie !
Au début du concert de Placebo alors que le parterre est rempli, il est difficile de se frayer un chemin pour comparer le son de la face dans l’axe à la régie et revenir vers le côté jardin où la banane de V officie en outfill. Nous y parvenons tout de même. Le raccord s’effectue parfaitement et c’est vrai qu’il n’y a pas de différence tonale en médium-aigu. Evidemment il y a moins d’impact dans le bas que sur le J, mais c’est la même signature sonore. Là encore il y a du niveau, un peu trop à notre gré comme en témoigne le contrôleur à la régie, mais ce n’est jamais agressif, le rendu est équilibré même avec des boîtes poussées presqu’au taquet comme quoi le J encaisse sans jamais dénaturer avec un grave et bas médium percutant, ce qui ressort bien sur la batterie. La voix et les guitares de Brian Molko et Stefan Olsdal ressortent bien. Bon soyons honnêtes, l’ingé son du groupe y est aussi pour quelque chose.
A la régie de la scène principale juste avant le concert de Placebo. Xavier nous montre le logiciel de contrôle à distance R1 d&b qui permet de connaître le statut et paramétrer via les amplificateurs - processeurs D12 toute la diffusion de la grande scène en l’occurrence. La liaison s’opère par bus CAN (jusqu’à 800 m de distance) avec soit une passerelle R60 (CAN-USB) soit R70 (Ethernet-CAN).
Une des deux lignes de rappel retardées de 8 x J de la grande scène, celle placée derrière la régie.
*Les presets accessibles sur le D12 pour le système V
Mode Arc/Line : le mode arc est retenu pour des sections de ligne courbées. Le mode Ligne s’applique pour la longue portée, lorsque l’angulation inter-boîte est nulle ou faible. Dans ce cas la bande médium-aigu est atténuée.
Mode Cut : réduit les fréquences basses (coupure – 10 dB à 100 Hz au lieu de 65) pour des configurations avec des VSub ou JSub.
Mode HFC : (High Frequency Compensation) compense la perte d’énergie dans les hautes fréquences en champ lointain (absorption). HFC1 pour les distances de 30 à 60 m et HFC2 pour plus de 60 m. S’applique pour obtenir une bonne homogénéité en fonction de la distance. Le boost est de respectivement 8 et 12 dB centré sur 11 kHz (HFC1) ou 9 kHz (HFC2) avec un relèvement progressif à partir de 2 kHz.
CPL : (coupling) compense les effets de couplage dans le bas médium au sein d’une ligne en fonction de la longueur de la ligne avec un réglage de 0 à -9 dB ; l’action s’apparente à un filtre shelf entre 100 Hz et environ 2 kHz avec l’atténuation max à 100 Hz.
Mode 100 Hz : ce mode s’applique au Vsub lorsqu’il est couplé à des boîtes V et réduit la coupure haute à 95 Hz au lieu de 115 Hz.
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