En signant la lumière du nouveau télé crochet proposé au public français par M6, Swann Mytnik rejoint le cercle fermé des directeurs photo de prime time à succès, et collabore par la même occasion à un concept d’émission de télé extrêmement novateur, puisque totalement interactif.
Rising star est un concours de chant certes, mais de nouvelle génération puisque c’est vous, nous, les téléspectateurs, qui votons pour encourager ou éliminer un aspirant chanteur et nous seuls. Un jury consultatif est bien présent, mais c’est le public qui décide d’élever ou non son favori au rang de future star.

Sur un plateau complètement innovant, articulé autour d’un mur vidéo gigantesque qui se lève selon les votes exprimés via une application Smartphone et Internet entièrement gratuite et bien pensée, les artistes en devenir évoluent, d’abord cachés par le mur, puis découverts si ils récoltent plus de 70 % d’avis positifs, sous les faisceaux des nombreux projecteurs accrochés par les équipes du prestataire partenaire Phase 4 dans tous les recoins d’un studio à la mesure du show, à la toute nouvelle Cité du Cinéma de Saint-Denis.
C’est au milieu d’un décor et d’une machinerie impressionnants que nous avons rencontré Swann et son équipe lumière, en plein rush, pendant les répétitions d’une émission de variétés pas comme les autres…

D’abord émerveillés par la grandeur et la beauté du plateau, nous ne sommes pas au bout de nos surprises en découvrant un kit lumière qui associe anciennes machines fétiches du designer (les Studio Color High End), projecteurs à succès (Sharpy Clay Paky) et Spots Vari*Lite.
Pourtant les lyres automatiques accrochées ici, souvent par centaines, servent toutes le propos du show et du magnifique décor créé par Olivier Illouz, en toute liberté même si le concept est adapté d’une idée déjà existante.
SLU : Swann, comment travaille t-on le design d’un show qui est une adaptation de format ?
Swann Mytnik : «Rising star est un gros chantier. D’un point de vue du budget, de la taille du plateau et surtout de l’importance que donne la chaîne à l’émission, pour M6 c’est un gros investissement qui est dans les tuyaux depuis un petit moment. C’est en effet une adaptation de format israélien qui a été vendu au Portugal, en Allemagne, aux USA et au Brésil. Mais bien que l’émission tourne déjà dans pas mal de pays, nous avons été libres d’imaginer un design lumière, vidéo et décoration sans être obligés de respecter un cahier des charges. Par contre la seule réelle charte obligatoire est celle de l’écran mur, donc de l’essence même du show, ce qui est normal. Donc Olivier Illouz, le décorateur, a imaginé un projet spécifique pour la France.

Le mur vidéo : Star de l’émission ?
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SLU : Vous avez donc dû conserver le même type d’écran ?
Swann Mytnik : Non, ici la technologie utilisée pour le mur est de la led, alors qu’en Israël ils ont utilisé des vidéoprojecteurs. Nous n’avons pas fait le même choix car les limites de la projection se posent quand on fait un tableau très éclairé, avec beaucoup de lumière, sur un sol brillant comme ici. On a alors trop de réflexions et on délave littéralement l’écran. Ça a été mon premier signal d’alerte auprès de la production qui voulait partir elle aussi sur de la projection classique.

Trop compliqué, délavé en permanence et le résultat d’ailleurs sur la version israélienne n’est pas au rendez-vous ; dès qu’ils allument les lumières l’image n’est plus «propre».
En plus sur ce plateau, nous nous sommes donné la possibilité, une fois l’écran baissé, de garder un certain niveau lumineux derrière selon nos besoins.
Par exemple, le début des éliminations s’est déroulé écran baissé dans le noir, mais au fur et à mesure des émissions, la production a voulu quand même habiller cet espace. Du coup, on se retrouve écran fermé avec beaucoup de lumière, et beaucoup de réflexions, mais l’écran reste propre et lisible quoi qu’il arrive grâce à la puissance lumineuse et au pitch des leds.
En plus, utiliser la technologie led présente moins de contraintes en terme d’installation et de contrôle, même si on a déjà une grosse contrainte de poids puisque le mur pèse environ 6 tonnes avec tout les moteurs, sur une surface assez réduite finalement. D’ailleurs, losque le mur est en activité, tout le plafond du plateau vibre !

SLU : Alors le choix d’un grand studio, ici à la Cité du Cinéma, s’imposait-il ?
Swann Mytnik : Certainement. Je pense qu’on n’aurait pas pu faire ça sur un autre plateau. C’est le seul endroit qui nous permet d’avoir autant de hauteur pour dégager l’écran et l’occulter car un grand masque noir vient se positionner derrière. Je connais peu de plateaux qui offrent autant de hauteur sous plafond et de capacité de charge au mètre carré.
SLU : Quelles sont les dimensions de l’écran/mur ?
Swann Mytnik : Pas loin de 16 m d’ouverture pour 4,5 m de haut. C’était la seule contrainte au cahier des charges.
SLU : Et en plus ce n’est pas le seul écran du plateau ?
Swann Mytnik : En effet, nous disposons de plusieurs plans vidéo. D’abord le grand écran du fond qui est éclaté sur les côtés avec des barres de Mistrip pour les lignes. Au fond on a un écran reculé sur un deuxième plan pour créer l’entrée des chanteurs et animateurs en conservant la continuité de l’image de fond. Un autre souligne le bord de scène et le fameux écran escamotable est incurvé et doublé, écran intérieur pour offrir au chanteur la vue des avatars de votants et extérieur pour donner au public la vue du chanteur quand l’écran est baissé.
SLU : J’imagine qu’avec tout ce dispositif, l’emplacement des caméras est essentiel ?
Swann Mytnik : Il y a une caméra intégrée dans le mur, dans une petite fenêtre créée en supprimant un module dans l’écran. Un junior à l’intérieur pour la face, un deuxième à l’extérieur en fond de scène devant l’orchestre, une steady cam, une portable et la grue qui peut passer sur le coté et peut aussi capter la scène pour des plans de transitions qui démarrent derrière le mur et se terminent en salle pour montrer le jury ou le public.

SLU : L’écran mur principal est incurvé, comment est il assemblé ?
Swann Mytnik : L’écran est constitué de modules dont la base arrière est inclinée de manière à pourvoir les orienter dans les deux sens. On peut former des surfaces concaves ou convexes grâce à leur support biseauté.
C’est la société XL Vidéo qui a fourni et installé tous les écrans du show, une société qui a démarré il y a quelques années avec les concerts de U2. Ils ont créé les premiers grands murs sur leurs tournées, ce sont des experts en la matière!


SLU : Une telle installation doit nécessiter un temps de montage énorme !
Swann Mytnik : Ah oui ! C’est pour cela qu’elle est fixe et pérenne pendant la durée de l’émission. Ca serait ingérable à démonter ! Avec plus d’une semaine de montage, c’est un énorme chantier.
Le kit lumière: un challenger de taille !

SLU : La lumière s’intègre parfaitement dans l’imposant décor du studio, comment avez vous collaboré avec Olivier Illouz ?
Swann Mytnik : En fait le décorateur était sur le projet avant moi. Il a donc travaillé en amont et fait une proposition qui intégrait la lumière dans son décor, ce qui était une bonne chose car il avait construit dès le début un design complètement cohérent. Ce n’est pas une couche qui s’ajoute à une autre, et ainsi de suite… Nous pensons décoration et lumière en même temps, et ce depuis le début.
Olivier avait par exemple dessiné le mur éclaté en y intercalant quelques projecteurs, ce qui me laissait une grande latitude pour ajouter des choses et les agencer comme j’en avais envie. De la même manière, il a imaginé «le lustre» (le chapeau en hauteur au dessus du plateau avec les éléments vidéo à led) et j’y ai ajouté du FL 650, des Studio Color et des Sharpy.


SLU : On retrouve des Studio Color High End dans ton kit, ces machines sont indémodables !
Swann Mytnik : J’utilise et j’utiliserai toujours des Studio Color ! Avec moi, ils ne risquent pas de disparaître des designs ! C’est, à mon avis, le projecteur qui a les plus belles couleurs, encore aujourd’hui… Il n’a pas un rendu en puissance exceptionnel, mais la machine est relativement fiable malgré les années, et les couleurs sont juste magnifiques. Il n’y a pas un Wash qui sache faire des couleurs comme un Studio Color. Je n’ai pas trouvé d’équivalent. J’ai pourtant cherché, que ça soit en led ou lampé, mais je n’ai pas trouvé de rival à sa trichromie parfaite. Dans mes designs, en projecteurs automatiques réellement, il y aura toujours du Studio Color pour éclairer le public car, sur tous les Wash qu’on trouve aujourd’hui, le magenta tire sur le bleu, le vert n’est pas assez, voire pas du tout lumineux, et du coup tu n’arrives pas à faire de vraies palettes de couleurs.


SLU : C’est une certaine exigence aussi à laquelle tu as été habitué aux côtés du directeur photo Jean Philippe Bourdon dont tu as été le pupitreur pendant près de 15 ans ?
Swann Mytnik : Probablement, mais je dois être le seul à penser ça, car tous les fabricants continuent à assembler des trichromies que je trouve complètement aberrantes. Quand tu vas les voir en leur disant, voilà il y aurait un parc potentiel de presque un millier de lyres, on aimerait bien avoir un projecteur récent (le Studio Color n’est plus commercialisé par High End bien que son SAV soit toujours en activité et qu’on trouve toujours des pièces de rechange) qui s’inspirerait du bain de cette trichromie qui est juste magique, j’ai vraiment l’impression que ça me semble pas être dans leurs priorités. Donc j’utilise des Studio Color pour éclairer le public et l’orchestre.
SLU : Tu n’as même pas trouvé ton bonheur du côté des Wash à leds ?
Swann Mytnik : Ajouter des leds ici, c’est compliqué… Et pour d’autres raisons. Je n’aime pas beaucoup la led. D’abord parce que tu ne peux pas, selon moi, faire du bleu très dense avec et surtout, parce que c’est une lumière qui est très agressive en télévision. Les caméras encaissent très mal, ça sature tout de suite en couleurs, même si leur niveau n’est pas énorme. Ce n’est pas, à mon sens, une jolie lumière. Les caméras sont tout de suite flairées, ça excite le capteur, je ne suis pas fan.
J’ai quand même des Mac Aura dans le kit mais ils sont en contre-jour donc très rarement dans l’œil des caméras. Ca ne me dérange donc pas plus que ça, les gens les ont dans le dos, ça me va. En plus leurs couleurs sont quand même parmi les plus jolies en led actuellement. C’est une Wash que j’utilise de temps en temps en douche sur un public, du coup elle ne gène pas les cameras et c’est un bon compromis.

SLU : Difficile de passer à côté des Sharpy Clay Paky et la superbe cage de faisceaux qui entoure les artistes en début de chanson ?
Swann Mytnik : Ah oui, y en a un petit paquet (une centaine quand même…), tout autour du plateau.
C’est un projecteur qui fait un beau faisceau, que tout le monde connaît, certes, mais qui marche très bien! Même si il ne présente pas un potentiel énorme en terme de création car on est arrêté par le nombre de couleurs proposées, on doit en utiliser juste 7 ou 8 sur la totalité entre les attentes de la production et les propres limites de la machine. On a aussi toujours cette teinte légèrement bleutée sur le Sharpy, mais c’est un bon projecteur, très présent dans le concept et à l’image.
SLU : On trouve encore d’autres automatiques fournis par Phase 4 dans le kit ?
Swann Mytnik : Oui, des VL 3015 Vari*Lite au plafond. Ils me permettent de casser un petit peu le coté faisceau super serré du Beam, pour respirer un peu. On trouve aussi des VL 3000 au sol et des modules de Datakolor agencés par trois, accrochés sur une lyre fabriquée sur mesures par Phase 4 pour les mettre dans cette position-là, sur un pont à la verticale inclinée. Elles sont associées à un VL 3000 en contre en bas public et à un Mac Aura.

SLU : Comment as-tu travaillé tes faces, notamment mur fermé ?
Swann Mytnik : On a placé des VL 1000 sur l’écran qui me permettent de faire les faces quand le mur est baissé et du coup quand il se lève, les projecteurs piquent en même temps dans le même timing que les moteurs, ça me permet ainsi de faire une transition entre les VL1000, quand le mur a une hauteur suffisante, et les poursuites Ivanhoé et Aramis qui prennent le relais ; on fait alors une bascule.
Ça marche super bien, même si les artistes ont tendance à avancer d’instinct vers le public, déplacement que l’on peut rattraper avec l’aveuglement d’ouverture du mur. Ça m’a sauté à l’esprit tout de suite que ça devait suivre et monter, et j’ai souligné ce point à la production dès le départ du projet en disant :
il faut que nos faces soient régulières entre mur fermé et levé, et surtout pendant qu’il se lève. Dans la plupart des pays qui ont adapté le format, il y a en fait au dessus un passage entre le mur et le plafond, mais nous, on a un masque noir, c’est complètement fermé, donc il fallait trouver une autre solution.

SLU : Tu parles d’aveuglement à la montée du mur, tu le fais avec du trad’ ?
Swann Mytnik : Oui, nous avons des Sunstrip dmx pour souligner l’écran et faire l’effet d’aveuglement quand le mur se lève. On a aussi, en traditionnel, cinq poursuites en arc de cercle à la face et du FL 1300 partout sur le mur dans la continuité des barres vidéo ainsi que des Molefay que j’aime vraiment bien utiliser.
SLU : Avec un tel système vidéo et lumière, il faut être précis sur les contrôles. Qui gère quoi?

Swann Mytnik : Les vidéos des bandeaux en nez de scène, en liseré, ou en leds intelligentes au sol sont gérées par les équipes d’XL avec des médias serveurs vidéo D3. L’écran de fond reçoit lui les médias de deux Hippotizer Green Hippo. L’équipe lumière à la console ne gère que l’écran de fond et ses rappels latéraux et bandeau avant, nous ne nous occupons pas de l’écran escamotable.
Nous avons quand même un nombre important de sources vidéo ici à contrôler, avec de la capture vidéo en plus pour pouvoir afficher les pourcentages des votes récoltés par les candidats sur les cotés dans les modules carrés. Viennent s’ajouter au signal de l’écran du fond, un à jardin, un à cour, et un de plus pour le mur qui a un nombre de pixels énorme ! L’image est très grande, donc fonctionne avec plusieurs serveurs vidéo, tous synchronisés.
Cédric est le pupitreur lumière sur une GrandMA2 MA Lighting et Kevin au pupitre vidéo aussi sur une GrandMA2 en réseau.

SLU : Finalement en étant aux commandes de la lumière d’une si grosse émission, ce qui est une première pour toi, quelles étaient tes craintes et appréhensions sur le fonctionnement du kit in situ?
Swann Mytnik : Ce qui m’inquiétait le plus c’était les faces mur baissé. J’ai pris le pari de les mettre au dessus sur un moteur asservi, en sachant que si il y avait des vibrations on aurait pu avoir des soucis, mais ça va pour l’instant, ça tient le coup. C’est à peu près tout, il n’y avait rien de très inquiétant, et même à l’usage, je n’ai presque pas fais de modifications. Dans l’ensemble je suis retombé sur ce que j’avais imaginé au début, en préparation et ça colle, çà rend ce que je souhaitais. La production est contente, je me dis que j’ai réussi mon pari, c’est un concept qui marche bien.»

Un pari plus que réussi. Pour sa première grosse émission de prime time, et en direct, Swann Mytnik signe une lumière riche et personnelle qui apporte chaleur et relief au plateau et au décor. Pourtant la vidéo, omniprésente sur le show, car rattachée au concept même de l’émission occupe tout l’espace et génère beaucoup de lumière.
L’intelligence du concept lumière de Swann Mytnik réussit à faire cohabiter et exister des centaines de projecteurs automatiques dans un décor déjà très brillant. Son point fort, une vraie conscience des caméras et du rendu à l’image avec un choix de projecteurs adaptés, tels que les Sharpy Clay Paky qui font, encore une fois, un grand numéro à l’écran. Qu’ils soient éparpillés sur l’ensemble des ponts et cerces qui surplombent le plateau, réglés au millimètre pour un effet de cage autour des candidats, ou intégrés aux décors latéraux, chaque tableau leur fait une place de choix.
Mais ce que Swann sait vraiment bien faire, ce sont les couleurs, denses, saturées et riches, grâce à une légion de Studio Color Hig End qui viennent baigner d’ambre ou de magenta un public très bien éclairé. Les niveaux sont parfois très élevés sur l’audience, mais encore une fois il faut bien exister sur un tel plateau…
Son travail d’ajustement des faces chanteurs est remarquable grâce à son idée originale de relayer les cinq poursuites installées dans la salle en hauteur par une rangée de VL 1000 mur fermé et conforte notre envie de suivre la longue carrière qu’on lui présage.
Mention spéciale au décorateur Olivier Illouz qui signe lui aussi un concept intelligent car conscient de la globalité d’un show, qui doit faire cohabiter de concert lumière, décor et vidéo. Le mur éclaté sur les murs latéraux du studio est une pure merveille de mouvement et de perspective.
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