Après le FORTE, un profile doté d’un moteur LED de 1000 W, lancé en 2021 et que nous avons testé dans nos colonnes, Robe lance le iFORTE, identique en puissance, optique et fonctions, mais classé IP65 pour affronter les contraintes du plein air.
Dans ce test, nous ne reviendrons pas sur les fonctions identiques à celles du FORTE (voir le banc d’essais ici), nous allons plutôt détailler les aspects techniques qui caractérisent cette nouvelle version IP65, et faire état des différences que nous avons pu observer entre les deux machines.

[private]
Les machines en version IP 65 sont souvent plus lourdes, d’entretien plus délicat et possèdent des caractéristiques qui leur sont propres tant les conceptions mécaniques sont spécialement étudiées pour s’intégrer parfaitement dans le concept de « machine étanche ».
ROBE voulait que son iFORTE puisse s’affranchir de ces inconvénients, et que déjà, sa machine soit absolument similaire à la version « non IP. En ce sens, même physiquement c’est assez réussi. Extérieurement le iFORTE est très très proche du FORTE, quelques millimètres par-ci par-là ne modifient pas son allure générale. Si vous n’avez pas le nez dessus, vous êtes incapables de les différencier. Question poids, là aussi on est très proche avec seulement 2,5 kg de surpoids soit 42,5 kg.
L’aspect « maintenance » a été très étudié
Une machine étanche demande de la minutie en cas d’intervention ou de réparation éventuelle (un simple changement de gobo par exemple). Quand la machine est remontée, il faut s’assurer qu’elle est toujours parfaitement étanche, au risque de subir des pannes à court ou moyen terme. Le iFORTE bénéficie en interne d’un système lui permettant d’effectuer des auto-tests de pression interne grâce à certains capteurs embarqués, et d’identifier tout problème de passage d’air inopportun.
L’un des enjeux de l’étanchéité d’une machine de ce type est l’équilibrage des pressions de l’air entre l’extérieur et l’intérieur de l’appareil. Le déséquilibre de pression présente un risque de condensation interne dont l’humidité est visible sur les optiques bien sûr, mais dont les effets seront, un jour futur, aussi problématiques pour les éléments mécaniques et électroniques internes.
Le iFORTE utilise des valves d’équilibrage de pression dont la régulation permet d’ajuster en permanence la pression interne de la machine. La régulation a besoin d’être continue car la pression va être modifiée sous l’effet de l’élévation de température interne lors de la sollicitation des leds.
Pour information, lors de la montée en température de la machine jusqu’à la pleine puissance des leds, environ 7 litres d’air sont extraits de la machine pour garder l’équilibre en pression. A l’inverse, quand on l’éteint, 7 litres d’air vont entrer, éventuellement chargés d’humidité…
L’autre astuce de Robe est d’associer ces valves à des capsules filtrant l’humidité pour garantir l’arrivée d’un air quasiment sec. Pour donner un exemple, l’air ambiant en extérieur en plein été est chargé de 50 à 60 % d’humidité. Après filtrage par les capsules, le taux est réduit entre 3 et 5 %. Même en cas de variation de pression, il n’y a aucune condensation dans l’appareil.
Le iFORTE étant destiné également à être utilisé en hiver, il a aussi tout un dispositif de protection contre le froid. Celui-ci s’organise encore autour de systèmes de capteurs, ici, de température, et dont les informations vont permettre au soft de réagir. L’appareil va pouvoir fonctionner normalement jusqu’à – 10°. En dessous de cette température, (les roulements à billes sont serrés gelés, les huiles sont figées, etc.) la machine va lancer des séquences lui permettant de faire remonter sa température interne.
Dans un premier temps, notamment en phase de veille, elle va utiliser ses moteurs comme des résistances. Du courant va passer dans les moteurs, sans les faire tourner, jusqu’à faire remonter la température jusqu’à zéro degré. A zéro degré, la machine va faire bouger un tout petit peu les moteurs pour vérifier que rien ne coince et que rien n’est bloqué, et si tout va bien, le soft lance un petit reset du projecteur qui est de nouveau opérationnel.
Pour information, chez ROBE, les projecteurs ne font plus de reset pan/tilt. Les différentes technologies de capteurs utilisées permettent directement à la tête de se positionner où il faut. Exit les longues secondes où le projo faisait son petit tour complet dans tous les sens pour finir par se positionner là où le DMX l’appelait. Tous les produits de la gamme ROBE vont bénéficier de ce système à présent et pouvoir loger dans des endroits exigus n’autorisant que des débattements limités.
Le iFORTE peut être alimenté en permanence (et c’est du coup indispensable en cas d’utilisation prolongée en extérieur), et ne consomme plus que 20 W en mode « stand-by ». Seules certaines séquences de régulation interne comme celles que nous venons de décrire lors de problèmes de températures extrêmes peuvent ponctuellement amener le projecteur à consommer un peu plus, mais leur raccordement permanent n’entraîne pas de consommation coûteuse.
Le iFORTE a cependant une limite par rapport au FORTE. Le manuel nous indique qu’en utilisation extérieure, il ne peut être monté de côté. A plat au sol ou sur un pont, pas de soucis, mais latéralement, non.
Démontage / construction

La plupart des carters formant la coque externe du iFORTE utilisent un matériau particulier. Il s’agit d’un alliage en grande partie réalisé à base de magnésium. C’est une des raisons pour laquelle ce projecteur IP65 est à peine plus lourd que sa version «standard».
Les zones étanches de la machine sont la tête, le centre de la lyre, et une partie de la base. Les bras n’en font pas partie. Tout ce qui s’y trouve est potentiellement exposé à l’humidité ou à des différences de pression sans problème.
Entendons-nous, ce n’est pas ouvert de partout non plus, mais si quelques gouttes s’introduisent à l’occasion, il n’y aura pas de bobo.
Dans l’un des bras, on retrouve le classique dispositif pan/tilt avec les courroies et les tendeurs pour assurer le déplacement site et azimut de la tête, tandis que dans l’autre, on découvre une grosse gaine plastique renfermant le câblage qui passe de la base jusqu’à la tête, ainsi totalement protégé, entouré par deux longues capsules transparentes remplies de genres de petites billes de couleur orangée.

Ces deux capsules, reliées par un réseau de tuyaux permettent le filtrage de l’humidité de l’air en entrée / sortie de tête. La capsule de gauche est surmontée directement par la valve servant à équilibrer la pression à l’intérieur de la tête.
Le matériau filtrant est à base de gel de silice absorbeur d’humidité. On nous a montré l’aspect que les billes peuvent avoir après un certain temps d’utilisation. La couleur passe de l’orangé au marron, et ça peut aller jusqu’au noir lorsqu’elles sont fortement saturées en eau.
ROBE annonce que pour un usage régulier, le remplacement des cartouches doit s’envisager à une fréquence d’environ un an. Ce qui laisse quand même pas mal de latitude pour travailler sereinement avec les iFORTE.
Pour ouvrir la tête, il suffit de retirer les 2 demi-capots qui l’entourent fixés par 6 vis de chaque côté. Tout à l’intérieur est plus ou moins comme dans le FORTE, à l’exception d’une petite carte fixée sur un côté à proximité de l’un des bras. Il s’agit de la carte de suivi environnemental. Bardée de capteurs, elle sert d’interface pour l’analyse permanente de l’état des conditions atmosphériques dans le projecteur.

La lentille de sortie est recouverte d’un traitement oléophobique et hydrophobique qui lui évite au maximum d’être squattée par des gouttelettes de fluides quelconques (comme de l’eau de pluie par exemple…) qui pourraient créer des dépôts dommageables à la lumière.
Comme pour le FORTE, le iFORTE possède un moteur de leds facilement interchangeable (toute la série dont le nom se termine par « TE » : « Transferable Engine » en bénéficie) et possède les mêmes caractéristiques électriques et optiques, simplement c’est un module spécifique par son mode de refroidissement et les besoins de dispositifs étanches. Les matériaux sont différents, davantage de vis, un système de joint, et une connectique étanche enfichable directement dans l’appareil.

La ventilation des sources se fait par 6 gros ventilateurs, 3 qui soufflent et 3 qui aspirent l’air, autour des radiateurs et caloducs reliés au moteur de leds de façon très classique.
Ces ventilateurs sont étanches et leur compartiment n’est donc pas soumis à une restriction anti-pluie. (La pluie doit même pouvoir améliorer la qualité du refroidissement…)
Dans la tête, on trouve aussi de chaque côté, deux autres petites capsules, plates et ajourées, contenant les petites billes orange.
Elles sont là pour absorber l’humidité « complémentaire », au cas où il resterait encore un petit je ne sais quoi d’humide dans l’air. Il y a aussi deux de ces capsules dans la base de l’appareil.
Les capsules sont toutes remplaçables très facilement en quelques tours de main, et ont un coût presque négligeable, mais au besoin, il est aussi possible de les reconditionner soi-même, en les séchant simplement dans un four à micro-ondes. Là en revanche, la manip, notamment pour les capsules du bras, est plus délicate car il faudra vider les billes des capsules, et bien les remettre à l’intérieur, bien les tasser, et surtout ne pas en perdre pour conserver toutes les propriétés filtrantes, etc. Donc, œuvrer soi-même sur ce dossier est tout à fait possible mais un peu plus technique…
La base comporte également des éléments électroniques et mécaniques qui sont conçus anti pluie (avec des petites capsules anti humidité). Ainsi la base est également ventilée. Ça permet notamment d’éviter un poids dissuasif comme ce fut parfois le cas sur certaines machines étanches d’autres générations et dont le refroidissement reposait essentiellement sur la dissipation par des éléments complets de l’architecture de la carcasse.


On remarque la présence de deux petits « dômes » qui dépassent de la base sur sa partie haute, en diagonale. Il s’agit d’antennes pour le signal DMX Wireless (sans fil). Dans le FORTE, elles sont intégrées dans la base, les coques étant en plastique, ça ne pose aucun problème pour la propagation des ondes.
Ici, avec les coques en alliages métalliques, c’est plus compliqué. Les antennes disposent donc de ce petit champ extérieur. Une seule aurait suffi mais la deuxième vient garantir une bonne liaison dans toutes les directions, le soft de la machine sélectionnant de lui-même l’antenne qui aura le meilleur signal de réception.

Le panneau de connecteurs reprend toutes les embases du FORTE, mais cette fois recouvrables par un capot de protection.
La double connexion réseau est équipée de la technologie « Epass » permettant la recopie du signal même lorsque l’appareil est hors tension.
Sur ce panneau se retrouve aussi le porte-fusible général de l’engin ainsi que la batterie remplaçable qui alimente l’afficheur pour le paramétrage hors secteur. Une version existe pour installations fixes en extérieur, où tous les connecteurs sont remplacés par des presse-étoupe totalement étanches.
Test de pression
En refermant la machine, nous nous livrons donc, comme le prévoit la procédure, a un test d’étanchéité. Il nous suffit pour cela d’aller dans le menu « Pressure test » et de lancer « start test ».

Dans ce mode, une valve solénoïde bloque le passage de l’air, et permet donc aux capteurs internes de vérifier s’il y a une variation de pression à l’intérieur de la tête.
Pour que l’intérieur de la machine monte en pression, le procédé utilisé est celui de l’augmentation de la température interne. Le software ferme les couteaux et envoi la lumière a 100 %.
Le test complet prend environ 5 minutes et se fait tout seul. Si une perte de pression est détectée, la machine vous le signale et il vous restera à bien revérifier que vous avez tout refermé correctement en relançant un test de pression.
Les ouvertures de capots étant très simples à effectuer, il a peu de risques que ça soit un casse-tête… Mais si suite à un choc la carcasse est déformée, vous savez qu’il y a problème et qu’il y a une fuite quelque part…
Robe nous signale que la pression environnante est aussi prise en compte. Si vous êtes en bord de la mer ou à la montagne, la pression n’étant pas la même, le software est capable de le prendre en compte dans l’analyse et les comparatifs de pression qu’il va effectuer.
Infos connectées
ROBE a toujours été assez fort concernant l’interface projecteur / utilisateur. Les applications smartphone et connectivités diverses, qui permettent aux techniciens d’interférer avec les machines, fonctionnent assez bien depuis quelques années déjà. Ici encore, sur le iFORTE, il est possible d’avoir de nombreuses infos permettant le suivi et l’entretien des machines de différentes façons.

L’une des plus complète consiste à connecter le projecteur (ou une série de projecteurs) via un switch en réseau sur un ordinateur. Il suffit alors d’ouvrir le navigateur internet, de taper l’adresse IP du projecteur, et une page web révèle l’état de la machine en direct.
Vous pouvez alors y voir l’ensemble des paramètres électroniques, refroidissement, température interne et externe, tensions électriques, trame DMX, signaux de commande, données des capteurs (température, pression, etc.) Bref, vous disposez d’un état des lieux précieux et complet en temps réel.
Comparaison lumière… Est-ce que la lumière est aussi FORTE ?

Eh bien oui. On peut dire qu’à l’usage, entre FORTE et iFORTE, la différence minime ne sera pas sensible à l’œil. Le derating de 7,5 % pour le FORTE passe à 8,4 % pour le iFORTE.
Les flux comparés entre les deux machines (celui du FORTE de notre premier test, et celui du iFORTE aujourd’hui) sont quasiment identiques à moins de 10 % près.
En comparaison à 20°, notre angle de référence, l’éclairement au centre après derating du iFORTE est de 13 000 lux contre 14 300 pour le FORTE et le flux passe de 34 600 lumens à 31 600 toujours après derating.

L’amplitude du zoom devient un poil plus large sur le iFORTE : 5,4° – 53,1° contre 5,5° – 51,4° pour le FORTE.
Par ailleurs, la totalité des essais que nous avons effectués montrent que les gobos, couleurs, prismes, sont les mêmes sur les deux versions et les courbes de dimmer Square Low se confondent.


Conclusion
Le iFORTE est, comme le FORTE, une machine puissante et étonnante. Elle a pour elle en plus son indice de protection « IP65 » la rendant insensible aux phénomènes extérieurs. Je dis bien « phénomènes extérieurs » et non simplement « conditions météo » car si le iFORTE est bien sûr une machine idéale pour utilisation par tous les temps, elle le sera aussi pour toutes applications en intérieur avec un avantage considérable, celui d’avoir une machine dont l’entretien global est réduit à son plus strict minimum.
Avec une tête complètement étanche, finis les nettoyages intempestifs et autres maintenances courantes… On change les petites cartouches une fois par an, on donne un coup de chiffon sur la lentille, et zou… C’est aujourd’hui un axe de réflexion qui est au cœur des préoccupations de nombreux prestataires qui s’intéressent à l’« IP » pour bénéficier de parcs polyvalents, durables, mais aussi s’affranchir d’autres problèmes liés à la mise en œuvre de projecteurs plus classiques.
A côté de ça, avec le iFORTE, Robe pousse encore plus loin et avec brio tous les process technologiques de développement et d’applications vus jusqu’ici sur les projecteurs asservis. La réalisation est à mon sens exceptionnelle.
On aime :
- Tout, il fait tout bien
- L’intelligence de conception
On regrette :
- Rien
Vidéo Robe de comparaison des deux machines
iFORTE & FORTE comparison video from ROBE lighting on Vimeo.
Plus d’infos sur :
– le site Robe Lighting France
– Banc d’essais du FORTE dans SoundLightUp : FORTE Robe, le rival du BMFL
Tableau général
[/private]