C’est lors de deux concerts successivement donnés à la Halle Tony Garnier (à Lyon) et quelques jours plus tard à l’AccorHotels Arena (Paris – Bercy) que nous avons pu découvrir la scénographie et la lumière conçue par Vincent “Lewis” Lérisson, jeune et talentueux éclairagiste pour le « Liberté chérie tour » de Monsieur Calogero.
Vincent Lérisson est un éclairagiste connu et reconnu pour ses lumières impressives et énergiques, totalement jouées en live. Point de time-code ou autres équivalents du « play-back » pour un éclairagiste. Vincent défend une certaine idée de l’interprétation lumière en live qui font sa marque de fabrique.

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S’il n’est pas seul à être extrêmement attaché à l’énergie vivante de la lumière et de son pilotage « à la main », (c’est le cas d’autres éclairagistes, dont moi), nous pouvons au moins souligner que dans ce domaine il figure dans les meilleurs du genre sur notre territoire.
Si on ajoute à ça un goût pour une lumière qui lui est propre et une « patte » qu’on peut identifier comme sa signature, il était important pour nous de faire écho de sa dernière œuvre, tant d’ailleurs, elle est réussie et a été remarquablement reçue par l’ensemble de ceux qui ont pu assister à un de ces concerts.
Le bonhomme est d’ailleurs coutumier du fait. Il a déjà fait preuve de ses talents à intervalles réguliers avec de belles réalisations. Notons qu’il est par ailleurs aussi l’éclairagiste de Justice. Nous vous invitons à parcourir l’article que nous avons déjà réalisé à son sujet sur la tournée de Louise Attaque.

En bas : Antoine Tomasi, Christophe Janin, Cyril Vlaemink, Yvan “Vanvan” Petit Pierre, Alexandre “ La Mangue” Tuloup.
Comme bien souvent, une réalisation de ce type est le travail d’une équipe. Vincent a également ses acolytes qui jouent un rôle essentiel. On peut parler notamment de Sébastien Sacco, qui gère et intègre tous les systèmes réseaux… Il y a Rico, qui gère la machinerie scénique imaginée par notre designer et qui doit faire fonctionner tout un tas d’appareils qui montent et qui descendent tout au long du show… Il y a Jérémy qui seconde Vincent à la console et qui assure son remplacement sur les dates ou il ne peut être présent.
Il y a « Ecureuil » et les équipes de MECAoctet qui ont développé tout un fourbi de motorisation complexe pour donner vie à des énormes ascenseurs qui s’éclairent et qui modifient l’aspect de la scène en permanence… Il y a aussi… bref, il y a plein de monde qui a réalisé ce très beau concept.

La mise en lumière de la scène repose en bonne partie sur deux éléments bien définis et qui sont uniques et remarquables dans le design de ce show.
Tout d’abord un fond, entièrement tapissé de Svoboda asservis, et ensuite, un plafond qui est en fait tout une impressionnante machinerie de « pods » motorisés pouvant agir à toutes les hauteurs, redessinant l’espace scénique et son envergure au fil des chansons.
D’autres dispositifs plus classiques viennent parachever l’œuvre, et nous allons voir en détail comment.
Le fond, les « svob »

Parlons donc déjà du fond. Il s’agit d’un mur de 60 projecteurs Svoboda montés sur lyres asservies Spotlight.
L’assemblage a été réalisé par Dushow, qui a fourni l’ensemble des équipements lumière de la tournée, suivant les demandes de Vincent.
L’arrière des projecteurs reçoit un miroir, reprenant la forme si particulière et asymétrique du Svoboda. Ces miroirs sont réalisés en Dibond, un matériau sur panneau destiné à réaliser des éléments découpés pour la création d’enseignes, de décors, etc… Chaque Lyre avec son Svoboda pèse 54 kg.
La gestion des machines se fait sur 4 paramètres pan et tilt en 16 bits (donc 2 paramètres par fonction) et un cinquième paramètre pour le gradateur externe selon la méthode traditionnelle. Les machines sont positionnées sur une gigantesque grille fabriquée tout spécialement pour l’occasion et qui les présente sous la forme de 6 rangées de 10 projecteurs. L’assemblage est constitué de différents modules.

Chaque module comporte 4 appareils, disposés en carrés, et sont transportés montés et câblés dans des panières de 3 modules. Ils sont montés étage par étage et démontés de la même façon. Une fois accroché, l’ensemble, projecteurs, câblage et grille, pèse environ 4 tonnes. C’est Side-Up qui a réalisé ce système d’accroche, ainsi qu’une bonne partie du décor.
Personnellement j’ai trouvé ça absolument magique. L’aspect chaud et « trad » de cet ensemble, travaillé au milieu d’un dispositif résolument moderne et contrastant fortement avec ce type de source est incroyablement réussi. Vincent est le spécialiste de ce genre de mariage. Ça fait partie de sa signature et de ce qu’il maîtrise en roi.
Le plafond, les pods et leurs « chaussettes »
Toute la partie supérieure de la scène est occupée par un énorme système de ponts qui supporte un ensemble de 21 éléments mobiles, organisés sur trois lignes de 7. Chaque élément porte sur sa face inférieure un Mythos ClayPaky et 3 MagicPanel-FX Ayrton.

Ce carré, bardé de ses projecteurs, peut descendre quasiment jusqu’au sol, entrainant au-dessus de lui le déploiement d’un tissu blanc tendu sur ses 4 faces, à l’intérieur duquel, 2 ClayPaky K20 permettent une colorisation globale de l’ensemble.
Le déploiement se fait sur une course de pas loin de 10 mètres et permet des effets de prise d’espace assez spectaculaires : faire jouer les projecteurs qu’ils soutiennent suivant des angles variant constamment et pouvant passer « en rase motte » au-dessus de la tête des musiciens, mais également d’être un support pour de la projection vidéo sur toute la surface de la toile et sur 3 côtés. Bref, un dispositif très complexe dont on n’a pas fini de décrire tous les usages possibles et qui sont fortement exploités dans ce spectacle.

Quand les pods sont repliés en partie haute, ils laissent place à une scène ample et limpide dans l’espace de laquelle les faisceaux des Svob et des Mythos s’expriment sur de grands volumes.
Le morceau suivant, descendus presque au maximum, le plafond vient « écraser » les artistes confinés dans un espace très bas de plafond à quelques dizaines de centimètres de leur tête…
L’effet est saisissant, comme peut l’être en général la motorisation d’éléments scéniques d’envergure, mais là encore, le concept est vraiment poussé très loin et offre un visuel à chaque fois très inattendu, et fort vecteur d’émotion dans l’ensemble du spectacle.
Le sol

Le sol paraît presque vide tant la machinerie qui occupe le haut et le fond de la scène est imposante, et il a une grande importance, notamment pour son interaction avec les deux gros dispositifs mobiles.
Il est constitué de ClayPaky Mythos, de systèmes de barres à leds motorisées Elation Chorus line, et d’une grosse poignée de stroboscopes Martin Atomic LED.
Le fond de scène est occupé par 6 Mythos et 7 Chorus line. Ils permettent des contrejours parfois très violents et impressifs, et les Mythos permettent aussi d’envoyer des faisceaux vers les MagicPanel-FX situés plus haut, ou même dans les miroirs arrière des Svoboda.

On retrouve aussi ces deux appareils latéralement, avec par côté, trois ensembles de deux Chorus-line montés verticalement collés par deux, et trois Mythos.
Tout ce kit de sol offre une multitude de combinaisons d’usages très bien pensées.

La face et quelques latéraux

Un pont de face équipé de 10 BMFL assure l’éclairage des musiciens. Entre ces projecteurs, 8 Chorus-line viennent prendre place pour répondre à ceux du sol et envoyer des lames de faisceaux plats vers la scène ou vers le public.
Un ensemble de 4 BMFL par côté, positionnés sur des ponts latéraux, vient compléter l’éclairage des musiciens.
La vidéo, un appui stratégique tout en finesse

La vidéo dans ce spectacle n’est pas prédominante et sert simplement à diffuser certains médias en rapport avec les chansons, ou des gros plans d’artistes.
Les images sont projetées sur les toiles déployées par la descente des pods à partir d’un ensemble de 6 vidéoprojecteurs, 2 de 30 000 lumens de face, et 2 de 20 000 lumens de chaque côté pour diffuser certaines images en relief sur les côtés des « chaussettes ».
C’est Alabama qui a fourni la régie vidéo et les équipes. L’habillage des différents angles des « chaussettes » permet un relief vraiment sympa et appuie encore le côté « tridimensionnel ».

Interview de Vincent Lérisson
Nous avons rencontré Vincent Lérisson pour lui poser quelques question à propos de son travail sur cette tournée.
SLU : Comment es-tu arrivé sur ce projet et quel était le cahier des charges ?

Vincent Lérisson : Calogero et son directeur artistique avaient suivi différentes choses que j’avais faites depuis la tournée Justice de 2012 sans trop que je le sache, et ils m’ont contacté pour me proposer de travailler sur ce projet car ils avaient envie de changer d’univers : « On aime bien ta patte », etc. Au tout départ, il y avait même un scénographe pressenti, et ils m’ont finalement confié aussi la scénographie.

Question cahier des charges, je n’en ai pas eu réellement, à part peut-être de Thierry Suc, le producteur, qui souhaitait un design assez coloré et pas trop « noir et blanc ». Et ça correspondait très bien aux demandes de l’artiste qui avait envie de quelque chose de plus « pop » et de plus léger.
SLU : On reconnaît ta “patte”, avec des codes qui te sont chers et que tu déclines de différentes façons, notamment avec ce déplacement de matériel dans l’espace.
Vincent Lérisson : J’aime quand les choses deviennent magiques et prennent vie. C’est quelque chose que je travaille depuis longtemps, que je recherche en permanence. J’aime moduler l’espace par la lumière. Ça passe par l’accroche des projecteurs, l’animation par des mouvements avec des accessoires qui se déplacent autour des artistes sur scène.
J’ai la chance d’avoir trouvé des gens qui savent le faire et qui m’accompagnent.

SLU : Sur cette tournée, il y a beaucoup de matériel qui de toute évidence a été créé et construit spécialement pour ce spectacle. Dans ce cas, qui finance les créations et quelle est la part d’achats spécifiques et de location ?
Vincent Lérisson : Il y a deux parties. La prod finance une partie, comme par exemple les panières de cadres, le hardware des pods, tout ce qui est purement décor et différents accessoires totalement spécifiques au spectacle.
Et pour tout ce qui est motorisation et technologies développées pour ce show, ce sont les fournisseurs qui ont investi pour développer les produits.
Forcément qu’il y a un coût qui est répercuté sur la facturation de la prestation « à la date » de concert, mais c’est un très gros investissement pour ces structures qui ont passé énormément de temps à développer des systèmes très spécifiques pour cette tournée.
SLU : Concernant la vidéo, quel est l’angle sous lequel tu as travaillé pour son intégration dans le show? C’est une volonté de ta création d’intégrer des reprises cam ou une demande artistique?
Vincent Lérisson : Le projet est né avec l’idée de ne pas avoir de vidéo. Et l’artiste a eu quand même le sentiment que dans les grandes salles, ça serait un peu frustrant pour le public éloigné de la scène, de ne pas bien voir les artistes. Mais il avait la volonté malgré tout d’éviter le traditionnel « l’écran vidéo »posé sur scène ou accroché.
Comme j’avais imaginé ce concept avec les « chaussettes » blanches qui se déplient, j’ai pensé qu’on pouvait projeter sur cette surface et même sur les trois faces visibles par le public. Cela nécessitait de placer des vidéoprojecteurs latéraux, mais l’idée d’un effet de relief devenait vraiment sympa.
Ensuite, techniquement, on a mis en place tout un système de mapping qui fait une liaison entre la motorisation des chaussettes et la diffusion vidéo. Il y a un interfaçage qui fait en sorte que l’image ne dépasse jamais la surface déployée par les mouvements des « chaussettes ».

La vidéo n’est pas réalisée ici comme un élément principal du spectacle, mais une fois qu’on a eu les VP intégrés au kit, on a essayé de s’en servir intelligemment à différents moments pour créer certaines textures ou habillages. Les médias sont développés en interne avec Seb Sacco.
La base de la présence de la vidéo dans ce show étant la reprise cam, nous avons au total 4 caméras dont une de face qui capte une bonne partie du show, et trois automatisées réparties sur la scène, pilotées depuis une petite régie près de la scène. Tout passe par un serveur AI Avolites et le mix est contrôlé en live depuis la console light. Les cadreurs ne s’occupent que du cadre, zoom et focus.
SLU : Parlons de ton fameux dispositif de « pods ».
Vincent Lérisson : En fait c’est une idée que j’ai eue sans trop savoir comment la réaliser. Il était question que ça prenne une place importante dans le show. On a un système qui sert à la fois de support aux projecteurs, avec les changements d’angles à volonté, qui permet de moduler le volume scénique au-dessus des musiciens. Les éléments sont décoratifs et s’illuminent par l’intérieur, et enfin on a l’aspect « vidéo » car le système sert d’écran de projection. C’est un dispositif dont l’usage est multiple.

J’ai contacté une entreprise qui réalise et conçoit ce genre de choses pour nos métiers. Il s’agit de MECAoctet. Ils sont très calés en motorisations et asservissements en tous genres et savent adapter des équipements industriels pour créer des tas de choses qui n’existent tout simplement pas pour le spectacle. Et cette société est animée par des gens qui connaissent nos métiers et la tournée. Et là, ils ont parfaitement répondu à nos attentes et plus encore.

SLU : Comment le système est-il géré pendant le show? Tu envoies des commandes depuis ta console?
Vincent Lérisson : Non. Le système est géré par Rico qui est placé sur le côté de la scène. Il a un logiciel spécifique développé par MECAoctets et qui réagit a des tops bien précis.
L’opérateur est indispensable pour des raisons de sécurité essentiellement. Les pods peuvent tous descendre jusqu’au sol mais nous avons réglé des fins de courses pour éviter tout incident.
SLU : J’ai vu que tu utilises vraiment beaucoup la lumière d’ambiance sur le public. C’est une volonté de ta part d’éclairer si fortement le public ?
Vincent Lérisson : C’était une demande de l’artiste qui a besoin de voir les gens. Il est certain que ça peut paraître un peu violent pour le public, mais c’est vraiment important pour lui. Ça lui permet de se sentir plus à l’aise. Ca fait partie des compromis que je dois faire. On a d’ailleurs en cours de tournée ajouté des ponts en salle avec des projecteurs à led SGM P5 pour éclairer le public sous un angle qui est moins aveuglant.

SLU : Ce kit est destiné à ne faire que des grosses salles ou vous envisagez de pouvoir le déplacer en festivals ?
Vincent Lérisson : En festival, on emmène tout sauf les pods. Il y a deux raisons à cela.
La première c’est qu’on va jouer sur certaines dates qui ne pourront pas accueillir une telle structure.
La deuxième c’est le vent… Le système de pods représente une telle prise au vent qu’il n’est pas envisageable de le faire jouer sur des scènes extérieures. Ce sont de véritables voiles de bateau, disposées à quelques centimètres les unes des autres…
On emmène tout le mur de Svoboda, tout le sol, et pour le reste, on s’adapte.

SLU : Tu nous parles de ton équipe ?
Vincent Lérisson : J’ai quelques interlocuteurs principaux qui sont compétents dans des domaines bien spécifiques et avec qui j’aime travailler.
Seb Sacco, pour le réseau, Jeremy au pupitre qui me remplace sur certaines dates, Rico pilote les moteurs, et Poussin fait une des poursuites.
Et je travaille avec l’équipe de Dushow et qui est constituées de gens vraiment top. Il y a notamment Aurélien, le chef poursuiteur, qui travaille avec Calogero depuis longtemps, et qui m’a beaucoup aidé à de multiples reprises lors de la mise en place de la création.
SLU : Tu n’es pas sur tous les shows car tu tournes en même temps avec Justice si je ne me trompe pas ?
Vincent Lérisson : Oui exactement. C’est d’ailleurs la première fois que je ne suis pas tous les soirs aux manettes d’une de mes créations. C’est un peu une découverte pour moi. Ça a de bons et de mauvais côtés. Le bon côté c’est que quand on repasse sur la tournée après un certain temps, on a un regard un peu frais sur le spectacle.
Mais dans l’autre sens, je suis très adepte de faire évoluer le show au fil de la tournée, car bien souvent l’interprétation des artistes peut changer elle-même, et là, je ne peux pas le faire. Quand il y a des changements en cours de route, j’ai besoin de voir les choses pour faire évoluer mes séquences, donc c’est assez difficile pour moi en ce sens.
J’aime modifier, affiner, faire des essais, et en parler ensuite avec l’équipe. J’aime tenir compte du ressenti de chacun. Tout le monde apporte quelque chose au spectacle donc je les intègre dans ce mouvement-là.
SLU : J’ai vu qu’il y a beaucoup de lumière qui peut sembler parfois un peu agressive pour les yeux des musiciens sur scène. Tu n’as aucun souci avec eux de ce côté-là ?

Vincent Lérisson : Il est vrai que « ma patte » est connue pour envoyer des lumières un peu violentes, et dès le départ je les ai prévenus. Donc j’ai amorcé la discussion pour que tout le monde soit à l’aise et comprenne ce que j’allais faire. Il y a des noirs, de la lumière vive, des changements d’angles radicaux, des marquages de « pêches », etc. Je leur demande d’avoir une certaine ouverture d’esprit et d’essayer d’appréhender au mieux la contrainte artistique.

Après, s’il y a des choses qui posent des problèmes purement techniques, on trouve des solutions.
C’est un dialogue que j’ai eu notamment avec Calo en premier pour qu’il ait bien conscience que sur scène ça risquait de bouger, mais qu’une bonne partie des effets qui font ma lumière viennent aussi de là. Tout le monde a joué le jeu, et globalement ça se passe bien.
La motorisation des pods par MECAoctet
Nous avons rencontré Philippe Ducouret, l’un des dirigeants de MECAoctet qui a développé tout le système de pods motorisés. Interview.
SLU : Philippe, peux-tu nous présenter ta société et son intervention sur le show de Calogéro ?
Philippe Ducouret : La société s’appelle MECAoctet et nous sommes une jeune entreprise né il y a bientôt 3 ans, basée près de Toulouse. Nous sommes 4 associés, deux développeurs, et deux spécialistes en électromécanique. Nous travaillons dans le domaine des asservissements de moteurs, et développons le hardware et le software de nos réalisations.

Nous venons d’horizons très différents, avec un Docteur en mathématiques, des ingénieurs venus de l’industrie, mais aussi des gens du spectacle, comme moi qui pratique dans ce secteur depuis de nombreuses années.
Nous connaissons Vincent depuis un moment pour avoir déjà travaillé avec lui sur certains projets.
SLU : En quoi consiste le système que vous avez conçu ?
Philippe Ducouret : Le concept est celui de 21 pods, dont la base carrée mesure 2,3 m x 2,3 m. Ils sont motorisés et asservis de façon indépendante. La descente de chaque pod entraîne le déploiement d’une « chaussette » en toile venant former une surface rétroéclairée qui sert également de support de projection. Chaque élément pèse 495 kg, soit un poids total de 13 tonnes pour l’ensemble des pods.
SLU : Techniquement, ça représente quoi en terme de hardware ?
Philippe Ducouret : La conception mécanique de chaque pod repose sur un double cadre. L’un est fixe, accroché au grill qui supporte l’ensemble du dispositif, et l’autre est mobile et animé en hauteur par un système de moteur qui entraine trois chaines.
Ce cadre tire avec lui les toiles en les dépliant, le tout pouvant descendre sur 9 mètres en supportant un ensemble de 4 projecteurs asservis. La réalisation purement « métallerie » des cadres a été réalisée par la société Side-up basée à Nimes, qui a aussi fabriqué la plupart des panières et chariots de transport des éléments techniques de ce spectacle.

SLU : Et pour la gestion ?
Philippe Ducouret : Nous avons développé le logiciel qui pilote chaque pod de façon indépendante, mais avec aussi une partie d’interpolation (qui permet par exemple de créer des « vagues » dans les déplacements entre les pods).
Le développement software a nécessité de mettre en place également une interface de contrôle pour l’opérateur du show qui manipule le système en live. Il peut en fonction des besoins du show « dessiner » en live une forme que peut prendre l’ensemble des volumes, et gérer le déplacement de chaque unité. Ca peut être un positionnement mais aussi une évolution en mouvement.

SLU : La sécurité ?
Philippe Ducouret : Pour cet ensemble qui évolue au-dessus de la scène, il a fallu aussi qu’on imagine plusieurs niveaux de protection.
Ça passe par des systèmes de freins qui bloquent tout mouvement en cas de rupture d’alimentation, une surveillance du réseau de transmission du data, un coup de poing d’arrêt d’urgence évidemment, etc. Tout est organisé pour qu’il n’y ait pas d’incident.
SLU : Et pour la mise en œuvre ?
Philippe Ducouret : C’est assez simple, il y a un grill en structure carrée de 500 fourni par Transit (qui fournit le rigging sur la tournée), tenu par 12 moteurs de 2 tonnes en mouflage, qui est constitué principalement de trois ponts, correspondants à nos trois profondeurs, et sur lesquels on vient accrocher nos 21 pods (3 x 7).
Ces modules repliés devaient mesurer 1,30m de hauteur, projecteurs compris pour en charger 10 dans une semi.
SLU : Vous avez abordé le dossier d’un point de vue technique, mais avez-vous aussi envisagé les choses d’un point de vue artistique ?
Philippe Ducouret : Absolument ! Il fallait intégrer des données qui sont de l’ordre de l’émotion. Par exemple, dans l’absolu, un simple déplacement de rideau de scène est une action purement technique, mais à laquelle vous pouvez donner « vie » par la façon que vous avez de le manœuvrer. Là c’était un peu la même chose. Il y a eu une grosse part de réflexion concernant le mouvement, la vitesse de déplacement, la façon dont vont évoluer les éléments entre eux, et fournir un résultat qui convienne aux attentes de l’artistique.

Nous avons été séduits une fois de plus, par la mise en lumière somptueuse de Monsieur Vincent Lérisson. Il signe là encore un splendide design faisant preuve d’un bel usage de la technique dans une réalisation surprenante et grandiose, dans une lumière terriblement vivante, entièrement pilotée « en live » par la main et la sensibilité de l’éclairagiste.
Rien ne saura la remplacer tant que la musique « live » aura au moins la prétention de vouloir transmettre une émotion au public. Bravo !
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